Citations sur La vraie vie (515)
Ma mère, elle avait peur de mon père.
Et je crois que, si on exclut son obsession pour le jardinage et pour les chèvres miniatures, c’est à peu près tout ce que je peux dire à son sujet. C’était une femme maigre, avec de longs cheveux mous. Je ne sais pas si elle existait avant de le rencontrer. J’imagine que oui. Elle devait ressembler à une forme de vie primitive, unicellulaire, vaguement translucide. Une amibe. Un ectoplasme, un endoplasme, un noyau et une vacuole digestive. Et avec les années au contact de mon père, ce pas-grand-chose s’était peu à peu rempli de crainte.
Les histoires, elles servent à mettre dedans tout ce qui nous fait peur, comme ça on est sûr que ça n'arrive pas dans la vraie vie.
Il n'a pas bougé. Et, en même temps, il m'a prise dans ses bras. Avec ses yeux.
Il y a des gens qui vont vous assombrir le ciel, qui vont vous voler la joie, qui vont s'asseoir sur vos épaules pour vous empêcher de voler.
"J'aimais la nature et sa parfaite indifférence .{...}
Mon pére démolissait ma mére et les oiseaux s'en foutaient.
Je trouvais ça réconfortant.
Ils continuaient de gazouiller, les arbres grinçaient, le vent chantait dans les feuilles du châtaignier .
Je n'étais rien pour eux. Juste une spectatrice . Et cette pièce se jouait en permanence .Le décor changeait en fonction de la saison, mais , chaque année, c'était le même été , avec sa lumiére , son parfum et les mûres qui poussaient sur les ronces au bord du chemin....."
Je refusais d’être une proie ou une victime, mais je voulais rester vivante. Vraiment vivante. Avec des émotions. J’ai fait un effort pour pleurer, je sentais que c’était nécessaire, un réflexe de survie. Je donnais de grands coups de pioche pour dégager ma source intérieure. Je n’ai pas eu besoin de creuser longtemps. Les larmes ont jailli en un déluge salé sur mon oreiller
Enfoncer cette lame dans de la chair vivante était interdit. Viscéralement, du plus profond de ma condition d’être humain, des millénaires de civilisation ont hurlé que je n’avais pas le droit. Que ça serait pire que la mort. Que je n’étais pas faite comme ça. La haine volcanique que je ressentais pour mon père. Ses mains de bourreau. Son haleine de furoncle. Les mots d’amour qu’il ne m’avait jamais dit. Les cris de ma mère.
Avec l'âge, moi aussi, je finirais par rouiller comme une vieille clôture.
Alors, j’ai décidé que moi-aussi, j’allais inventer une machine et que je voyagerais dans le temps et que je remettrais de l’ordre dans tout ça.
A partir de ce moment-là, ma vie ne m’est plus apparue que comme une branche ratée de la réalité, un brouillon destiné à être réécrit, et tout m’a semblé plus supportable. Je me suis dit qu’en attendant que la machine soit prête, en attendant d’être capable de revenir en arrière, il fallait que je sorte mon petit frère de son silence. P 51
J’aimais la nature et sa parfaite indifférence. Sa façon d’appliquer son plan précis de survie et de reproduction, quoi qu’il puisse se passer chez moi. Mon père démolissait ma mère et les oiseaux s’en foutaient. Je trouvais ça réconfortant. Ils continuaient de gazouiller, les arbres grinçaient, le vent chantait dans les feuilles du châtaignier. Je n’étais rien pour eux. Juste une spectatrice. Et cette pièce se jouait en permanence. Le décor changeait en fonction de la saison, mais chaque année, c’était le même été, avec sa lumière, son parfum et les mûres qui poussaient sur les ronces au bord du chemin.