Tout ce que je connaissais jusque-là de Djian, c'était l'adaptation de ce roman au cinéma par
Jean-Jacques Beineix. Autant dire que cette chronique du roman risque de beaucoup parler du film. Et ce qui est curieux pour commencer, c'est qu'au fil de ma lecture mes souvenirs du film se réveillaient, alors que je croyais n'en avoir qu'un souvenir assez lointain, une ou deux scènes ou péripéties en plus de la scène d'ouverture dont tout le monde se souvient, pas plus. Cette scène d'ouverture, dans le film, secondée ensuite par l'interprétation de
Béatrice Dalle, présentant l'intérêt de donner une grande intensité et une grande place au personnage de Betty, autour duquel tout peut tourner à loisir. le roman, il me semble, manque de ce centre aussi incandescent. Après ça coule bien quand même, Djian est un conteur efficace dans la maîtrise des codes de ses modèles nord-américains (le livre s'ouvre sur une citation de Brautigan et les quatre cents pages suivantes ressemblent à une traduction un peu rapide d'icelui), saupoudrés de procédés qui m'ont interpellé (narrateur et lieux dont on ne dit jamais les noms, sans passé, sans famille, le tout formant un réalisme insouciant ne cherchant pas à en imposer par un soin inutile du détail).
Bon, ça se traîne quand même un peu en longueur dans le dernier tiers du livre, avec quelques pages superflues où l'auteur tire un peu à la ligne avec des formules du genre "La vie, c'est pas un stand de foire avec tout un tas de lots bidons à décrocher..." et autres "Le monde est comme ci et comme ça, les gars, c'est moi qui vous le dis...", avant de conclure avec un métier certain par deux - trois chapitres brillants d'efficacité et de souffle narratif. Bref, je reverrais bien le film, et je suis pas contre non plus me farcir d'autres Djians.