Les époux restèrent et, malgré l’amour qu’ils me portaient, la nostalgie me gagna. Les enfants me manquaient. Bien sûr, ils me rendaient visite, mais ils avaient changé. Je ne retrouvais plus cette simplicité qui avait fait notre quotidien. Je regrettais l’innocence perdue. Avec amertume, je constatais leurs différends. Les rancœurs avaient pris la place des chamailleries…
Ma vie bascula lorsque la mort emporta Mme Belasko. Un souvenir atroce que j’aurais aimé effacer de ma mémoire. Et quand, quelques mois plus tard, son époux me quitta à son tour, mon cœur se brisa.
La rancune est la plus dévastatrice des tempêtes, disait papa. Elle désunit les frères et les sœurs. Elle détruit les familles.
(...), quand on est con, c'est comme quand on est mort : c'est à jamais .
Cinq domestiques pour deux personnes. Philippe avait trouvé cette proportion ironique. Lui n’avait même pas une femme de ménage à son service, personne pour laver son linge ou lui préparer ses repas. Il s’était mis à sourire. Être divorcé et célibataire présentait des inconvénients. Avoir une épouse se révélait pratique pour celui qui n’avait pas les moyens d’embaucher du personnel.
La vie est cruelle. On se croit à l'abri du malheur. On pense que les meurtres ne s'inviteront jamais dans notre foyer, que seuls nos voisins peuvent être les protagonistes de faits divers sordides. C'est faux. Les drames frappent n'importe qui, n'importe quand. L'horreur est commune. Elle nous guette tous.
Lorsque la famille s'était installée au domaine, papa avait insisté pour donner un nom à la maison. Selon lui, c'était une marque d'affection, une preuve d'amour.
Chaque famille possède des secrets. La nôtre semblait exceller en la matière.
Certains jours sont restés gravés dans ma mémoire. [...]
Ma vie bascula lorsque la mort emporta Mme Belasko. Un souvenir atroce que j'aurais aimé effacer de ma mémoire. Et quand, quelques mois plus tard, son époux me quitta à son tour, mon cœur se brisa. [...] Qu'allais-je devenir ?
Ma solitude ne dura pas.
Quatre jours après le décès de M. Belasko, les enfants décidèrent de se réunir, une dernière fois, entre mes murs.
Cette première nuit de l'été, la plus courts de l'année, fut la plus longue de mon existence. Je savais ce qui m'attendait. Je savais que les cinq frères et soeurs hausseraient le ton et que j'assisterais, impuissante, à leurs querelles. Mais jamais je n'aurais imaginé être témoin d'une telle tragédie.
Les émotions non exprimées ne meurent jamais. Elles sont enterrées vivantes et libérées plus tard de façon plus laide.
La rancune est la plus dévastatrice des tempêtes, disait papa. Elle désunit les frères et les sœurs. Elle détruit les familles.