D'abord le constat : même si la Terre continue de tourner avec une régularité exemplaire, le monde ne tourne pas rond, lui. Modification en profondeur du climat, pollution à outrance, inégalités sociales ou sociétales, perte de la diversité (tant au niveau de la faune et de la flore que d'un point de vue plus général, y compris les modes de pensée), pillage et appauvrissement des sols, déforestation…
Jusque là, tout le monde est parvenu à être d'accord.
Ca diverge un peu quant aux causes qui sont totalement imputables à l'Homme.
Si vous souscrivez à ce bilan et à ses causes, il faut lire
le Grand Vertige.
Pierre Ducrozet y propose une solution. Imparfaite puisque fondamentalement humaine, mais qui au moins a la qualité d'exister.
Je vous présente Adam Thobias, une sommité internationale tant sur le plan scientifique qu'écologique. Cependant ce n'est pas le personnage central du roman, juste l'élément déclencheur, celui qui tire les ficelles.
On suit le parcours de trois participants à ce grand projet. Je préfère dire participant à militant : cette volonté de changer le monde (encore une fois) n'est pas portée par un désir révolutionnaire mais parce qu'il n'y a plus d'autre alternative désormais. Soit on change de paradigme, soit on disparait. C'est aussi simple que ça. Ceux là ne sont pas portés par une idéologie mais simplement parce qu'il n'y a pas d'autre solution dorénavant.
Collecter des informations sur l'état de la planète pour parvenir à inventer autre chose. Une révolution, c'est avant tout détruire ce qui existe (et qui ne tourne pas rond), cette fois il serait plutôt question d'Evolution (passer à autre chose).
Très bien. Seulement cette utopie aura bien du mal à se mettre en place, Thobias fricotant un brin avec les services secrets et la majorité des gouvernements ne voyant pas plus loin que le bout de leur nez.
On y croise des savants, des spécialistes dans tous les domaines, des bonnes volontés et au milieu de tout ça, June, une jeune femme un peu rebelle qui se cherche avant tout (on pense à l'héroïne de Millenium). Elle sera emportée par ce tourbillon comme aurait pu l'être d'autres jeunes femmes un peu perdues en leur temps : dans la Résistance au début des années 40, dans ces mouvements marxistes en mai 68, dans les luttes féministes du début des années 70.
A ses côtés, d'autres individualités, en particulier Nathan, un botaniste génial, qui a eu l'idée de synthétiser les propriétés extravagantes d'une plante rare pour utiliser au mieux l'énergie solaire sans tomber dans le photovoltaïque, gros consommateur de terres rares.
Le livre alterne donc, comme une radioscopie de la Terre, allant de pures merveilles aux dérives humaines. Entre la beauté solennelle des grands espaces et une pollution qui vient se nicher dans les moindres recoins. Et aussi un certain désenchantement devant l'inutilité de tout ça. Car ceux qui décident ne se sont pas encore débarrassés de cet égoïsme libéral : moi d'abord, la planète (donc tous les autres) après.
Il se trouve que ce roman a prit une autre dimension quand je suis tombé sur un article concernant le mal être (le malaise) des jeunes face au défi écologique : changer ou disparaitre. Cette nouvelle génération vivrait très mal, d'un point de vue psychologique et psychique, cet héritage imposé et, franchement, on peut aisément le comprendre.
Alors, peut-être que la solution viendra de cette future génération (ils ont entre 8 et 15 ans, ces névrosés écologiques) qui aura, enfin, pris conscience que nous ne sommes que les locataires et non les propriétaires de notre environnement.
Attendons 30 ou 40 ans pour voir, peut-être, un monde nouveau remplacer cette machine technologique qui nous offre, à nous la minorité privilégiée d'un monde surpeuplé, un confort jamais atteint dans l'histoire de l'humanité.
30 ou 40 ans. Il sera peut-être trop tard.