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3,53

sur 306 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Une biographie romancée extrêmement bien documentée, contant l'histoire de Juette qui a eu le "malheur" de naître femme dans un monde dominé par les hommes (patriarcat, clergé...). Son émancipation après le traumatisme d'un mariage trop précoce, d'un bébé mort né puis d'un enfantement non désiré, est vue du point de vue de Juette et en parallèle de son ami Hugues qui chacun à leur façon montrent l'impact du questionnement moral, presque philosophique, dans un monde et une époque où il ne faisait pas bon questionner les dogmes établis.
Un roman que j'ai beaucoup aimé, tant dans le fond que dans la forme
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Je connais cet auteur pour l'entendre sur France Inter et dois reconnaître que je ne l'apprécie pas. Pourtant, les prix et critiques que ses livres suscitent me laissaient penser que je ne devais pas m'arrêter à cette inimitié. Chez Emmaus, je trouve celui-ci dont le thème m'intéresse beaucoup. Dans la continuité du « Domaine des murmures » que j'avais dévoré. Et je dois donc reconnaître que cet auteur a une écriture d'une délicatesse rare, travaillée sans être ampoulée ou boursouflée, simple et fine, sensible et sensuelle qui dit si bien les sentiments. le récit est déroulé à deux voix. le seul bémol qui n'en est pas vraiment un est que parfois je me suis perdue dans le déroulement des événements. En tous cas, bravo
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Peut-on parler de douceur pour évoquer les hérésies cathares ? Je ne sais pas et à la vérité peu me chaut car qu'importe le sujet quand on a la plume de Clara Dupont-Monod. Et douceur, c'est encore bien peu de chose. Elle a l'agilité délicate et déterminée de l'enlumineur à la feuille d'or, le feu, la rage de la peau qui frissonne pour la première fois d'autre chose que du froid. Elle est tout à la fois la caresse te la piqûre, l'assouvissement et la frustration, le flot qui emporte et le petit caillou dans la chaussure. Ah, j'aime cette plume. Une plume qui gratte, qui écorche, qui égratigne, qui laisse une marque, un sillon, un chemin. qui tatoue. Cette sensation revigorante de s'asseoir devant l'âtre pour écouter l'histoire de quelqu'un qui n'es là que pour le plaisir de raconter. Sans la moindre tentative de déconnexion. On l'écouterait pendant des heures. Et cette Juette. Combien de Juette alors ? Combien de Juette encore aujourd'hui ? Combien s'abîment dans des cocons dont on ne connaît pas, ou plus, l'origine. Combien sommes-nous à perdre nos vies, vraiment ou aux yeux des autres , combien de chemins sont ainsi barrés ? Juges dangereux, stériles, inconnus, pour ceux qui n'ont même pas l'idée de se planter un instant devant. Clara Dupont-Monod sait écrire les femmes, et les hommes du reste, magistralement encore, et les incompréhensions, les indifférences, les doutes, et les poids sur la poitrine. les indécisions et les convictions. Qui brûlent les entrailles. Elle sait écrire le feu. Qui dévore tout sur son passage, qui dévaste. Qui assainit. Il y a dans ce tout petit volume un goût de fin et de commencement. Comme de nouvelles épices. Un étonnement. Un émerveillement. Une vie plus savoureuse.
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Huy, petite ville de bord de Meuse à la fin du 12ème siècle. Juette est une jeune fille éprise de liberté et curieuse, qui réprime son imagination débordante et ses questions sur la religion pour ne pas déplaire à son père, receveur des impôts de l'Evêque, et à sa mère, « bonne chrétienne » rigide qui lui témoigne peu d'affection. Plus vraiment enfant mais pas encore tout à fait femme, elle « comprend toujours ce qui échappe aux autres » mais « la seule chose [qu'elle n'a] pas comprise, c'est cette phrase : « Oui, je le veux » » (p.85) qu'on lui fait prononcer à 13 ans à peine, sans qu'elle ait voulu quoi que ce soit. La voilà mariée, mère à 15 ans et veuve à 18 ans. Elle s'oppose à son père qui souhaite qu'elle se remarie, entre dans l'ordre des Veuves et se dévoue corps et âme pour soigner les lépreux de Huy en compagnie d'autres béguines.

Défendant une religion plus juste, sans clergé dont elle dénonce les vices et l'oppression, opposée à l'institution du mariage, refusant la maternité alors qu'elle a mis au monde un fils, rejetant les hommes qu'elle considère comme des ogres dévoreurs des rêves de femmes, Juette nage à contre courant de la pensée médiévale dans laquelle elle vit.

J'ai découvert le roman de Clara Dupont-Monod grâce à un podcast de la série « Une ville à l'oreille » proposé par le Centre Culturel de Huy qui lui était consacré. En général, les vies de Saints, même romancées, ce ne sont pas des lectures qui m'attirent particulièrement... Mais ma curiosité a été attisée par le fait qu'une auteure française choisisse d'écrire un roman sur la vie de Saint Ivette de Huy, une sainte somme toute méconnue (même par les habitants de la région, moi la première). En plus de me plonger dans l'histoire d'une jeune fille déterminée et révoltée, folle pour les uns, adulée par les autres, je suis également allée fouiller un peu plus dans l'Histoire de cette partie du Moyen Âge car le roman fourmille d'allusions à des faits historiques : les cathares, Amaury de Bène et la condamnation de ses disciples, la naissance du mouvement des béguines à Liège... Se divertir tout en apprenant, c'est toujours un plaisir pour moi, même sur un thème aussi particulier.

J'ai beaucoup apprécié ce récit à deux voix : d'un côté, Juette livre sans détour ses doutes, ses peurs, ses aspirations ; de l'autre, son ami et confident, Hugues de Floreffe, chanoine prémontré, offre sa vision de la jeune fille et du regard que le monde porte sur elle (historiquement, c'est par lui que nous est parvenue l'histoire de Juette). L'alternance de ces deux points de vue ainsi que le style de Clara Dupont-Monod, agréable, abordable et tout à la fois réaliste et poétique, créent du dynamisme, ce qui fait que l'on ne s'ennuie pas (parce que parfois, voire même souvent, les vies de Saints, ça peut être barbant...).

Voilà une lecture inhabituelle mais que je ne regrette absolument pas, d'une part, pour en avoir appris encore un peu plus sur un pan de l'histoire (bien que romancée) de ma région au Moyen âge et, d'autre part, pour cette figure de femme « militante » hors de son temps.
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L'histoire d'une " Féministe du Moyen-Age"

Ce court roman historique à deux voix évoque la condition des femmes au Moyen-âge, le mariage précoce et forcé des adolescentes, qui confère respectabilité et protection aux jeunes adolescentes, mais qui est surtout une affaire de sous.

C'est un regard dur et sans concession que la jeune femme jette sur la gent masculine et sur l'Eglise, toute puissante, celle qui scande la vie des femmes et des hommes du Moyen Âge, institution incontournable, plus riche que le roi, qui dispose d'un pouvoir politique, social et moral considérable.
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Ce roman est assez bref et pourtant je l'ai lu très lentement. Et pour cause : chaque mot se savoure, chaque phrase se réfléchit. Dans un style complexe et poétique, Clara Dupont-Monod nous livre une histoire assez terrifiante, qui nous choque d'autant plus que l'héroïne est très jeune.

Nous sommes au XIIe siècle, dans la bourgeoisie belge. Enfant rêveuse et solitaire, qui confie ses "histoires" à son seul ami le moine Hugues de Floreffe, Juette est mariée à 13 ans, et veuve à 18 après avoir eu deux enfants. le mariage la traumatise et la dégoûte des hommes, autant du sexe masculin que de l'humanité en général.
Sa voix nous prend à la gorge, tout comme celle d'Esclarmonde, l'héroïne du roman de Carole Martinezdu Domaine des Murmures. Au début du récit, le regard d'enfant de Juette montre le ridicule de certaines habitudes et de la société en général, dont l'auteure a très bien reconstitué la mentalité de l'époque, tout en faisant preuve d'une grande maturité. le livre dénonce la barbarie et l'intolérance en général : celle commise envers les femmes, mais aussi dans un cadre religieux, avec la persécution des cathares.
Dans la seconde partie, Juette dit non au mariage et à la société. Elle mène une vie de sainte en vivant avec les lépreux, devient mystique et gagne une sorte d'aura dans sa région. Elle décide de se venger en exigeant une vie exemplaire de tous et en ne pardonnant personne...

J'ai adoré ce roman, et le bonus a été lorsque j'ai découvert à la fin qu'il s'agissait d'une histoire vraie, celle de sainte Ivette, dont la vie nous est parvenue par le récit d'un certain Hugues de Floreffe... A lire !
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Trouvé par hasard dans une librairie solidaire, acheté car l'auteure écrit si bien, défend si fortement ses idéaux, j'ai ouvert ce livre, lu ses pages.

Et j'ai été comblé, par ce voyage dans un moyen-âge si éloigné et finalement si proche, page après page. L'aveuglement religieux et la violence des hommes, la folie des gains et du pouvoir mais toujours au détriment des femmes, de leurs savoirs et leurs capacités à exister, à analyser le monde. Dans un moyen-âge que certains pourraient retrouver aujourd'hui, une jeune femme avance malgré les embûches, s'impose non pour dominer mais pour aider les autres, pour montrer la face cachée et immonde des hommes, des religieux.

J'ai adoré ce parallèle avec aujourd'hui, j'ai adoré le style riche et ciselé de l'auteure
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Ah quelle femme ! Quelle liberté ! Quel courage dans ce monde de brutes, de jouisseurs, d'hypocrites !


Me voilà revenue du Moyen-Age, plus précisément du 12e siècle à Huy, une belle petite ville qui se reflète dans la Meuse, entre Namur et Liège, en Belgique.
Juette est une frêle jeune fille de 13 ans destinée à se marier et à ployer sous le poids de son mari toutes les nuits, à accoucher deux fois, la première d'un enfant mort, et à subir à nouveau les assauts de l'homme. Elle en tirera une haine féroce, elle qui rêvait de légendes et de chevaliers preux, courageux et amoureux fou d'une Dame pure.
D'autant plus qu'elle croit en Dieu, mais d'une foi pure, elle aussi, libérée de cette servitude imposée par l'Eglise catholique qui régit tout, prières, gestes et pensées. Eglise catholique corrompue, au clergé jouisseur et profiteur. Des hommes, encore !
Elle rejoint en pensée les Cathares et les Vaudois qui se font entendre à cette époque et qu'on va persécuter, eux qui voulaient, comme Juette, une religion plus proche de Dieu, plus égalitaire, plus juste, plus pure.


Je me rends compte que j'ai employé trois fois le mot « pure » et ce n'est pas un hasard, car il parcourt tout ce livre pour culminer dans les derniers chapitres où la pureté tend au paroxysme et donc à la haine. Hugues le religieux, l'ami et confident de Juette, en sera d'ailleurs complètement désolé (et moi aussi).
Je dis « Hugues », et ce Hugues de Floreffe a existé, c'est lui qui a relaté l'histoire de Juette, vraie elle aussi, dont l'auteure s'inspirera pour écrire ce roman poétique et remarquable par son envolée lyrique.


J'ai adoré, peut-être parce que Clara Dupont-Monod a réussi à toucher ce désir infini de liberté, ce rêve de m'affranchir des règles en tout genre. J'aimerais tellement aussi « être à part » et en faire à ma guise, tout au moins suivre les principes que je m'impose à moi-même, uniquement.
Juette m'a fait rêver, moins par son désir extrême de pureté que par sa liberté intérieure et tenace.


La passion selon Juette : intacte, débordante, vraie...pure !
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"La passion selon Juette", roman découvert au fil de mes pérégrinations sur Babelio, aura été une excellente surprise.

C'est en premier lieu une jolie immersion au coeur du Moyen Âge, sur les bords de Meuse, dans la ville de Huy où Juette a passé toute sa vie. La ville est un personnage à part entière du roman et son ambiance est retranscrite avec beaucoup de réussite : places et ruelles, marchés, artisans, églises, etc.

Le récit alterne les voix de Juette et de son ami et confident, le chanoine Hugues de Floreffe. Les deux voix s'enchaînent à merveille au fil de la vie de Juette, mariage, maternité, veuvage, charité au sein d'une léproserie, puis mysticisme et réclusion volontaire.

C'est une oeuvre romanesque mais qui semble basée sur une solide base historique.

Le personnage de Juette est dépeint avec finesse et intelligence, elle est décrite comme une féministe en avance sur son temps et inadaptée à la société de l'époque, qui ne laissait que peu les femmes s'exprimer.

La plume est jolie et le rythme est assez lent, la lecture se fait très tranquillement mais avec beaucoup de plaisir.

Une très belle découverte...
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Juette, enfant comprend très vite que l'organisation sociale du moyen âge dans lequel elle vit est terrible, que le mariage auquel on la destine débouche souvent sur la mort. Combien de femmes résistent à un accouchement. D'où l'obsession de la retraite qui l'animera plus tard car se retirer c'est se protéger. Cet espace clos dans lequel Juette a été élevée est asphyxiant, tous les matins elle coud devant le foyer, elle aurait préféré festonner sous l'arbre de la cour. Pour sa mère, l'obéissance, la pureté et la sagesse sont des vertus cardinales, on réprime les petites filles dites insolentes en leur nouant fermement les cheveux derrière la tête, souffrance physique dont elle se souviendra longtemps. Dirigée et éduquée tout au long de son enfance et de son adolescence pour être une bonne épouse, Juette trouvera en sa maturité bien peu de consolation.
« Je sais ce qu'une fille doit taire pour devenir femme. Mais je sens un doute terrible, planté en moi comme une épine. Je n'ai pas protesté. J'ai laissé faire parce qu'on ne défie pas l'ordre des choses. On ne défie pas son père ni Dieu ».
« Je m'appelle Juette, j'ai quinze ans. Je suis mariée. J'ai sans doute été punie parce que je suis mauvaise ».
Si elle a un corps, elle l'ignore, la maternité, elle ne l'apprendra pas avec sa poupée mais avec l'homme qu'elle épouse à 13 ans. Elle n'était pas prête pour un tel mariage où l'amour n'entre pas en ligne de compte, celui-ci lui apportera un radical dégoût des hommes. L'homme sera pour elle l'ennemi de chaque instant.
« Après l'enterrement, j'ai placé mon enfant. Je ne veux plus en entendre parler. Je le verrai toujours comme la graine issue d'un mariage. Et puis c'est un garçon. J'ai fabriqué un ogre de plus. Une faute impardonnable, à ajouter aux autres ».
Et pour échapper à des tentatives de remariage imposé par ses parents, Juette après son veuvage s'occupera des lépreux, et s'imposera par sa foi , ce sera une renaissance pour elle et une grande joie permise, elle se sentira libre et son âme sera soulagée.
« Je découvre la liberté. Nous nous organisons comme bon nous semble. J'aime l'idée que chacune et libre de repartir à tout moment. Nous ne sommes pas unies par un voeu mais par le même choix… J'écoute mon coeur. Ce n'est qu'à lui que je dois d'être ici… le dévouement sans le serment. La religion sans clergé. »
Hugues de Florette, son ami et confident lui aura appris le langage intime pour parler à Dieu. Elle se sent pure et commence à avoir des extases . Juette n'a plus peur de l'enfer.
« On vous fait croire que le salut se vend comme une batterie de casseroles. Quel est ce Dieu qui alourdit les poches de l'église. Ce n'est pas le même que je vois dans mes extases ».
Toutefois, c'est une période très difficile pour Juette car le clergé est corrompu et sa condition de femme libre et autonome, sa résistance à toute forme d'autorité gène les ecclésiastique. Elle a de plus une façon exceptionnelle de pratiquer sa foi et en toute liberté elle enseignera à d'autres jeunes femmes qui la suivront et la protègeront avec un fort élan de sororité car Juette est sans cesse menacée par l'ultime sanction des « fauteuses de troubles ».
Clara Dupont-Monod retrace ici l'histoire intime et secrète de Juette, jeune femme du moyen-âge en faisant ressortir une forte résistance féminine pour faire face au monde des hommes qui l'entoure grâce à une foi sans faille et elle ira jusqu'au bout des élans de son âme, de sa fidélité à Dieu et à la Dame Blanche qui lui a donné son pardon. Juette est une héroïne dans un monde où les hommes d'église se veulent supérieurs aux femmes et qui lui ont déclaré la guerre car l'une des plus grandes craintes de l'église était que des femmes comme Juette se mettent à prêcher ! Ce qui est inconcevable pour l'époque car cela risquerait d'empiéter sur les brisées du clergé.
J'ai passionnément aimé ce livre, Clara Dupont-Monod a de l'élégance dans l'écriture, de la douceur, de la hardiesse et de l'audace. C'est une belle découverte sur l'éducation des filles au moyen-âge et sur les béguines. Pour poursuivre avec ces figures de femmes libres et solidaires, l'écrivaine et journaliste Aline Kiner a écrit « la nuit des béguines » qui me semble en accord avec celui-ci. Ce sera donc ma prochaine lecture.

Lien : https://leschroniquesdecoco2..
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