Citations sur La maladie de la mort (37)
Vous demandez comment le sentiment d'aimer pourrait survenir. Elle vous répond : Peut-être d'une faille soudaine dans la logique de l'univers. Elle dit: Par exemple d'une erreur. Jamais d'un vouloir.
Et puis elle demande : Vous voulez quoi ? Vous dites que vous voulez essayer, tenter la chose, tenter connaître ça, vous habituer à ça, à ce corps, à ces seins, à ce parfum, à la beauté, à ce danger de mise au monde d'enfants que représente ce corps, à cette forme imberbe sans accidents musculaires ni de force, à ce visage, à cette peau nue, à cette coïncidence entre cette peau et la vie qu'elle recouvre. Vous lui dites que vous voulez essayer, essayer plusieurs jours peut-être. Peut-être plusieurs semaines. Peut-être même pendant toute votre vie. Elle demande : Essayer quoi ? Vous dites : D'aimer.
Elle est plus mystérieuse que toutes les évidences extérieures connues jusque-là de vous.
Vous devriez ne pas la connaître, l’avoir trouvée partout à la fois, dans un hôtel, dans une rue, dans un train, dans un bar, dans un livre, dans un film, en vous-même, en vous, en toi, au hasard de ton sexe dressé dans la nuit qui appelle où se mettre, où se débarrasser des pleurs qui le remplissent.
Vous pourriez l’avoir payée.
Vous auriez dit : il faudrait venir chaque nuit pendant plusieurs jours.
Elle vous aurait regardé longtemps, et puis elle vous aurait dit que dans ce cas c’était cher.
« Vous lui demandez comment le sentiment d'aimer pourrait survenir. Elle vous répond : Peut-être d'une faille soudaine dans la logique de l'univers. Elle dit : Par exemple d'une erreur. Elle dit : jamais d'un vouloir. Vous demandez : Le sentiment d'aimer pourrait-il survenir d'autres choses encore ? Vous la suppliez de dire. Elle dit : De tout, d'un vol d'oiseau de nuit, d'un sommeil, de l'approche de la mort, d'un mot, d'un crime, de soi, de soi-même, soudain sans savoir comment. » (p. 52)
« Elle vous demande si elle vous est utile pour faire votre corps moins seul. Vous dites que vous ne savez pas bien comprendre ce mot lorsqu'il désigne votre état. Que vous en êtes à confondre entre croire être seul et au contraire devenir seul, vous ajoutez : Comme avec vous. » (pp. 12-13)
Vous demandez comment le sentiment d’aimer pourrait survenir. Elle vous répond : Peut-être d’une faille soudaine dans la logique de l’univers. Elle dit : Par exemple d’une erreur. Elle dit : jamais d’un vouloir. Vous demandez : Le sentiment d’aimer pourrait-il survenir d’autres choses encore ? Vous la suppliez de dire. Elle dit : De tout, d’un vol d’oiseau de nuit, d’un sommeil, d’un rêve de sommeil, de l’approche de la mort, d’un mot, d’un crime, de soi, de soi-même, soudain sans savoir comment. Elle dit : Regardez. Elle ouvre ses jambes et dans le creux de ses jambes écartées vous voyez enfin la nuit noire. Vous dites : C’était là, la nuit noire, c’est là
Vite vous abandonnez, vous ne la cherchez plus, ni dans la ville, ni dans la nuit, ni dans le jour.
Ainsi cependant vous avez pu vivre cet amour de la seule façon qui puisse se faire pour vous, en le perdant avant qu’il soit advenu
Elle sourit, elle dit que c’est la première fois, qu’elle ne savait pas avant de vous rencontrer que la mort pouvait se vivre.
« Vous lui demandez : En quoi la maladie de la mort est-elle mortelle ? Elle répond : En ceci que celui qui en est atteint ne sait pas qu'il est porteur d'elle, de la mort. Et en ceci aussi qu'il serait mort sans vie au préalable à laquelle mourir, sans connaissance aucune de mourir à aucune vie. » (p. 24)