- Je me demande ce qu'on peut bien faire d'un lange d'enfant quand on n'a pas d'enfant...
- Je me le demande aussi, dit Mme Dodin, mais si on essayait de tout comprendre, on aurait pas assez de sa vie.
C’est en général celui qui vide le dernier sa poubelle qui essuie la colère de Mme Dodin. Jusqu’au dernier elle se contient encore mais au dernier, régulièrement, elle explose. C’est là une des servitudes particulières à notre immeuble du 5 de la rue Sainte-Eulalie. On s’y fait engueuler parce qu’on a une poubelle à vider. Autrement dit parce que l’on mange, donc parce que l’on vit encore, donc que l’on n’est pas encore mort.
Pourquoi que chacun il la viderait pas, sa poubelle ? Pourquoi faut-il qu’il y en ait qu’une seule qui vide les chiures de cinquante autres.
Ainsi Gaston, c'est jour-là, n'est pas rassurant. Il porte à réfléchir bien des gens qui le rencontrent. Il les fait s'arrêter, pensifs, et peut-être pour la première fois de leur vie, devant un balayeur de la ville de Paris. C'est-à-dire qu'il leur fait découvrir qu'un jour, un simple balayeur pourra peut-être les concerner de près, que ça les regarde donc, comme leur vie a eu le regarde, lui.
- Ça pisse, donc ça boit, dit Mme Dodin.
- Ça me rappelle, dit Gaston, quelque chose. Un philosophe a dit la même chose : « Je pense donc je suis. »
Pourquoi que chacun il la viderait pas, sa poubelle ? Pourquoi faut-il qu'il y en ait qu'une seule qui vide les chiures de cinquante autres ?
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