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Critique de Bigmammy


Faute d'avoir lu « La ferme des animaux » de G. Orwell, j'ai surtout le souvenir des délicieuses Fables de la Fontaine, et du premier livre de mon enfance : la bande dessinée de Calvo « La Bête est morte » qui expliquait aux enfants de l'immédiat après-guerre le conflit mondial.
La transposition d'une situation contemporaine dans une Communauté d'animaux est un procédé littéraire et philosophique classique. Celui-ci est parfaitement réussi.

Krasnaïa est donc une dystopie, miroir de nos travers politiques actuels. Raphaël Enthoven y dénonce les dérives d'une société hyper démocratique, où les groupes innombrables d'écoles de pensée se gargarisent de mots, dans le déni général d'une violence parée de toutes les excuses de la couleur, du statut économique, etc … Les libertés sont donc aussi menacées dans une société hyper démocratique que sous les régimes totalitaires car « la foule n'est pas moins tyrannique que le tyran dont elle conchie l'autorité. » On aura deviné une allusion aux Gilets jaunes …
Car la liberté est un risque, et le mauvais usage que l'on en fait n'est pas une raison de la restreindre. « Je ne peux pas interdire aux animaux qui le souhaitent de se soumettre » dit un sage.

Un récit aussi désopilant que complexe, où une première lecture se passe à tenter de décrypter les personnages sous les avatars animaux qui leur sont attribués, et une seconde plus approfondie, nécessaire pour en tirer la leçon politico-philosophique.

L'identité de certains des personnages croqués est transparente : Zozime l'Ancien en Mitterrand, Vladimir l'Animat (l'ex-Régent) François Hollande qui a renoncé à se représenter, représenté cruellement sous les traits d'un cheval qualifié de « couille molle priapique », Mirko le loup est Emmanuel Macron, Dinia la taupe qui n'a pas le physique de ses ambitions : Zemmour, Lavka l'ourse est Marine le Pen, Avtoran Sarkozy, Bagato, l'ânon qui ne peut grandir Jean-Luc Mélenchon, Douraka l'hirondelle albinos qui vit son albinisme comme un destin de victime permanente et prône les réunions racialisées Rokaya Diallo.

Quant aux douces hermines, jadis décimées pour leur fourrure, elles nourrissent une herminophobie persistante, largement partagée par les animalistes (carnivores de droite) et sans doute aussi quelques herbivores qui leur reprochent leur talent et leur patrimoine. Cependant, sans doute afin de brouiller les pistes, l'auteur concède que ses personnages lui ont parfois échappé au risque (certainement calculé) de rendre certaines attributions hasardeuses.

L'essentiel est donc, sous l'humour massacrant et la satire non déguisée de nos moeurs et divisions politiques actuelles, d'écouter le message. La sagesse émane du discours du discuteur en chef, Metchat le pédagogue, un Maine Coon géant, aussi puissant qu'un Lynx (comme Avtoran), chargé d'assumer les disputes entre citoyens de Krasnaïa, organiser les oppositions (animer le Débat Public ?) et faire naître le doute entre fractions persuadées toutes de détenir la vérité. Hélas, croire qu'on apaise la colère en y cédant à moitié est une illusion renouvelable dont bien des gouvernants accommodants – dont Mirko – ont eu à se repentir. Il en fera les frais.

Une lecture très divertissante, avec des portraits terriblement vachards – et d'autres fort indulgents. Je laisse le soin aux lecteurs – ne pas oublier une feuille pour prendre des notes – de deviner en quels animaux sont croqués Ségolène Royal, Anne Sinclair, Marlène Sciappa, Bernard-Henri Lévy, François Fillon, Didier Raoult, Christiane Taubira, Chirac, entre autres. Pour ma part, j'ai échoué à démasquer la patronne des dogues (flics), Iréna la renarde, Kératine le ragondin et Gavariat. Il me faudra bien une seconde lecture … comme au Parlement.


Lien : http://www.bigmammy.fr/archi..
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