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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
1963- l'auteure à 23 ans, elle suit des cours de littérature qui lui permette de pénétrer dans une autre classe sociale intellectuelle, loin du petit monde de ses parents. Mais voilà, la liberté sexuelle a un prix et quand elle se retrouve enceinte, une seule certitude pour elle : ne pas le garder, rester libre, choisir, s'en sortir.
Mais c'est un parcours difficile, une situation lourde : « il y avait les autres filles, le ventre vide, et moi ». C'est pour elle un échec social d'être enceinte et ce n'est pas possible ; elle le sera plus tard, avec plaisir, disposant de son corps et de son choix et je pense à tous ces pays qui remettent en question ce droit si difficilement acquis.
Faire appel à des amis d'amis, voir des Médecins qui ne l'aideront pas, se sentir exclue, déclassée, la peur, le regard des hommes fasciné quand ils sont au courant, l'attente mais aussi une volonté inextinguible d'aller jusqu'au bout.
Elle y arrive grâce à une « faiseuse d'anges » une « passeuse d'enfants » que l'auteure met en parallèle avec « les passeurs de migrants » : les femmes et les migrants veulent quelque soit la souffrance, y arriver et dans les passeurs, il y a ceux qui mettent de la javel dans le vagin et ceux qui stérilisent tout, ceux qui appuient sur la tête dans l'eau ou ceux qui sécurisent.
Il y a la solitude, la douleur, la crudité volontaire de la scène de l'expulsion du foetus. Non, avorter n'est pas un acte que l'on fait par plaisir. Avorter c'est de la douleur, c'est un choix difficile et conscient. Arrêtons de penser qu'on le fait, comme on va s'arracher une dent.
Donc, comme d'habitude, Annie Ernaux va droit dans le sujet avec sa sincérité habituelle, cash, et ça marche, parce qu'il n'y a pas d'apitoiement, juste des faits et des sensations crues. Un témoignage indispensable.

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Je n'avais encore jamais lu Annie Ernaux, j'ai décidé de commencer par celui-là. J'ai été émerveillé par l'écriture de cette autrice, c'est simple sans fioriture mais tellement agréable à lire. Un sujet extrêmement délicat qui mérite que l'on en parle. Et surtout un livre qui nous plonge dans la difficulté que représentait ce genre de situation à l'époque de la jeunesse de l'autrice.
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Annie Ernaux, je connaissais de nom. On en a beaucoup parlé puisque cette année elle reçoit le prix Nobel de littérature. A vrai dire, cette autrice me faisait un peu peur. A tort… Alors en passant dans une librairie j'ai jeté mon dévolu sur « L'évènement ». Bien m'en a pris.
Tout le monde connait l'histoire… Une aventure amoureuse, une grossesse non désirée, un avortement. Mais l'avortement est clandestin puisque bien avant la loi Weil.
En fait Annie Ernaux nous raconte cette tranche de vie avec des mots simples de « tous les jours ». Elle déroule l'histoire de manière limpide, fluide, et parfois crûment. Bon nombre de femmes ont dû se reconnaitre dans cette histoire. Elle a le mérite, le courage, d'exprimer un ressenti personnel transposable à beaucoup.
Elle dénonce l'hypocrisie médicale ambiante à ce sujet, mais aussi celle de son entourage.
Le livre est une confession personnelle, mais aussi un acte de courage au nom de toutes celles qui ont dû avorter. Au travers de ce récit on prend conscience des mentalités, du contexte social. On en apprécie que davantage l'évolution, et on peut mesurer le chemin parcouru grâce à Simone Weil.
Ce livre est à lire (quelle que soit notre idée de l'avortement). Il permet de mieux appréhender le sujet et surtout de comprendre qu'une femme peut se trouver en détresse lorsque la grossesse n'est pas désirée.
Une chose est sûre je lirai un autre livre d'Annie Ernaux.
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Juste mon ressenti en quelques mots : bouleversant, indispensable lecture en ces temps de régression quant au droit des femmes à disposer de leur corps. Un immense respect pour cette femme, son engagement, son travail d'écriture. Je vais poursuivre ma lecture de l'oeuvre d'Annie Ernaux, après La Place et L'Ecriture comme un couteau. J'ai simplement apprécié les critiques et citations d'autres lecteurs car je trouve difficile d'écrire une chronique de cette lecture. Marquée par la petite phrase « je ne suis pas le plombier ! » lors de la prise en charge « punitive » à l'hôpital, petite phrase, immense déflagration.
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Je n'ai jamais été emballée par le style d'Ernaux mais, Prix Nobel oblige, je me suis dit qu'il était temps de choisir dans la PAL une de ses oeuvres pas encore lue.
C'est l'Evénement qui est sorti. le style froid, littéralement chirurgical, dénué de sentimentalisme voire d'émotions est plutôt adapté au récit de son avortement en 1963. le lecteur ne s'apitoie pas sur le sort de cette jeune fille devenue femme au moment de l'écriture ( 1999). Parce qu'elle assume entièrement son choix. La démarche est précaire, rien n'est organisé dans la société pour aider les femmes, le mot avortement n'est pas prononcé, on trouve la faiseuse d'anges par le bouche à oreille et cette dernière opère avec les moyens du bord, souvent par cupidité plutôt que par conviction. Bref, Ernaux dépose sur la page blanche son expérience brute : elle parvient à ses fins avec l'aide d'une copine, paie 400 francs l'intervention qui n' aboutit pas immédiatement car c'est à la cité universitaire qu'elle verra, sous ses yeux et entre ses mains, le dénouement. Elle clôt son parcours de femme interrompant volontairement une grossesse à l'Hôpital Dieu après une hémorragie. Il n'y a pas l'ombre d'un regret ni d'un remord, pas non plus de fatalisme mais un existentialisme pur et dur: cette jeune femme déterminée fait ce qu'elle pense devoir faire pour son bien, prenant à bras le corps sa vie, son indépendance, sa volonté, elle y met toute son énergie. C' est comme une parenthèse, une ellipse puisqu'elle reprend son mémoire de maîtrise là où elle l'avait arrêté, elle se sent différente, seulement différente.
N'invitant pas le lecteur à la compassion ou l'empathie, nous ne sommes que les témoins de son choix et ses actes, on peut à peiner les juger qu'on soit pour ou anti, là n'est pas le propos, on est face à une personne libre qui regarde sa vie en face. J'ai trouvé cette manière extrêmement bien choisie pour parler de ce thème.
Ce livre permet certainement de mieux comprendre l'intérêt de la loi Veil en 1975. D'ailleurs ce récit doit être assez proche de ceeux des femmes de cette génération qui ont été utiles à Veil pour mener l'enquête et défendre avec vigueur son projet de loi, devant un parterre d'hommes totalement déconnectés des réalités féminines en France (réalités populaire, ouvrière, rurale aussi bien que bourgeoise et citadine). Les archives sont criantes de vérité.
Repensant à l'année d'écriture de ce roman, 1999, je me suis soudain souvenue qu'à cette époque, des commandos anti ivg intervenaient encore dans certains hôpitaux de France, les salles d'avortement étaient encore parfois tenues "secrètes". C'est dire si la question reste épineuse, il n'y a qu'à voir l'actualité transatlantique.
En 2022 la prise en charge des femmes semble plus humaine, et moins tabou (j'écris seulement "moins" car un documentaire france culture passé récemment sur les ondes montre bien que l'ivg n'est toujours pas sans faire de remous).
Pour conclure, j'ai beaucoup aimé ce roman, même si je reste un lectrice très distante d'Ernaux. Toutefois j'attends avec une certaine impatience son discours à Stockholm, dans quelques semaines...Peut être aura-t-elle un message pour Camus dont le discours de Suède figure parmi ceux que je préfère.
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L'événement d'Annie Ernaux.

« La seule vraie mémoire est matérielle »

Annie Ernaux expose l'événement qui a eu lieu en janvier 1964, elle avait 24 ans alors. Enceinte d'un homme qu'elle côtoyait pour le plaisir ou parce que c'est ainsi que ça se faisait, elle ne sait pas trop, elle est confrontée a la nécessité viscérale d'avorter. Rappelons le, ce n'est qu'en 1975 que la dépénalisation de l'avortement a été amorcée.
Nous comprenons donc qu'un avortement en 1964 ça se fait nécessairement clandestinement.

Et qui dit clandestinité, dit moult combat pour trouver la personne qui acceptera de procéder à l'acte avec les risques légaux et physiques que cela induit. Annie Ernaux raconte comment elle a atterri impasse Cardinet dans le XVII arrondissement de Paris.

Elle exprime la souffrance indicible ressentie le jour J, la fameuse nuit du 20 au 21 janvier. Elle exprime le calvaire des émotions dans son esprit, l'incapacité de vivre autre chose normalement tant que l'événement n'a pas eu lieu. Elle décrypte son état mutique avec des bribes de son agenda de 1963-1964, se servant ainsi de la preuve matérielle des ressentis. Sans jamais sombrer dans une part de lyrisme dû aux souvenirs altérés. L'événement n'a rien de lyrique. Elle aurait pu se laisser tenter par une écriture enrobée pour séduire mais elle emprunte son ton le plus sincère, cru pour dessiner la puissance de sa galère, elle, jeune fille qui venait de faire un transfuge de classe.

Elle fait de cet événement une condition sine qua none pour désirer un enfant, se sentir en adéquation avec la violence qu'induit le fait d'être enceinte et d'accoucher. Je ne sais pas d'où elle a pu tirer cette force pour transformer l'événement en désir. Il y a dans ce livre une force qui a la fois m'échappe et me tord l'estomac. Car elle ne laisse rien au hasard, c'est brut et c'est à lire. A lire pour se souvenir d'où nous venons, pour conserver en mémoire l'indicible.
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J'ai redécouvert ce texte à la faveur de deux "événements" : le prix Nobel de littérature attribué à Annie Ernaux, et l'adaptation de ce livre à l'écran par Audrey Diwan. Quel choc, des années après, de relire l'inrelisable. Annie Ernaux excelle dans l'art du récit à ne pas y toucher, elle ne frôle rien, mais laisse tout planer. Tout est profond, bien dit, et fait écho à quiconque a, un jour, vécu. Un prix Nobel largement mérité !
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Aux six juges de la Cour suprême des États-Unis (six contre trois) qui ont statué que la Constitution américaine ne confère pas le droit à l'avortement,
Au gouvernement hongrois qui a fait inscrire dans la constitution que "la vie humaine est protégée depuis la conception",
Au parlement polonais qui n'autorise l'avortement qu'en cas de "danger pour la mère ou de viol",
Et aux milliers d'autres législateurs qui s'arrogent un droit absolu sur le corps, le choix et la vie des femmes,
Apprenez qu'une femme qui veut avorter le fera.
Dans la clandestinité, l'illégalité, le danger de mort, quels que soient les risques encourus, mais elle avortera. Elle a-vor-te-ra.
L'immense obstination à avorter n'a jamais été aussi bien traduite que par Annie Ernaux. Son "évènement" en 1963, elle l'a porté en elle pendant plus de trente ans, jusqu'à l'écriture de ce livre en 1999, et elle en reconstitue avec minutie les épisodes grâce à ses notes d'alors, agenda, journal intime, avec une admirable sincérité.
Et avec une acuité terrible, elle analyse même la différence de traitement entre son statut d'étudiante et celui d'une "vendeuse de Monoprix" : même si la sororité du malheur existe, la classe ouvrière, sans argent, sans respect, souffre encore davantage.
Mais qui a bien pu juger que l'écriture d'Annie Ernaux était "blanche", "neutre" ? Pour ma part elle m'a soulevée d'émotion à chaque page, chaque mot. Choisir une citation ? J'aurais voulu vous recopier tout le livre…
À l'annonce de son prix Nobel, j'ai filé emprunter trois oeuvres d'Annie Ernaux à la bibliothèque ; j'ai commencé par "L'évènement"car j'avais tellement, tellement aimé le film. Et sans images, sans musique, ce roman, ces mots nus, m'ont bouleversée encore bien davantage.
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Annie Ernaux a reçu le Prix Nobel de littérature il y a quelques jours. Une récompense qui me ravit et qui m'a donné envie de me replonger dans l'oeuvre de cette grande dame ! Il se trouve qu'après avoir lu « le jeune homme », au printemps, je m'étais procuré « L'Evénement » dans la foulée. Je l'avais laissé de côté, et j'ai été ravie de pouvoir m'y plonger ces jours- ci.

« Si beaucoup de romans évoquaient un avortement, ils ne fournissaient pas de détails sur la façon dont cela s'était exactement passé. Entre le moment où la fille se découvrait enceinte et celui où elle ne l'était plus, il y avait une ellipse. » Nous sommes en 1963. L'avortement est interdit, tabou, secret. C'est une honte pour les femmes qui y ont recours. Annie Ernaux est estimée du fait de son statut d'étudiante en Lettres. Elle se détache du milieu prolétaire de ses parents. Mais son état de jeune fille enceinte va la ramener directement, aux yeux des gens, dans la condition sociale de ses parents

« Il y a une semaine que j'ai commencé ce récit, sans aucune certitude de le poursuivre. Je voulais seulement vérifier mon désir d'écrire là- dessus. Un désir qui me traversait continuellement à chaque fois que j'étais en train d'écrire le livre auquel je travaille depuis deux ans. Je résistais sans pouvoir m'empêcher d'y penser. M'y abandonner me semblait effrayant. Mais je me disais aussi que je pourrais mourir sans avoir rien fait de cet événement. » Ce récit autobiographique a la particularité d'avoir été rédigé en deux temps : les notes prises dans un journal intime en 1963, et une espèce de « retour sur expérience » daté de 1999. Une prise de recul intelligente qui permet au lecteur de mesurer la profondeur de la réflexion menée par Annie Ernaux sur son projet d'écrire sur la Vie.

« J'ai fini de mettre en mots ce qui m'apparaît comme une expérience humaine totale, de la vie et de la mort, du temps, de la morale et de l'interdit, de la loi, une expérience vécue d'un bout à l'autre au travers du corps. » La loi, parfois immorale, souvent remise en question, a beau avoir évolué en France, il est toujours aussi mal vu d'avorter. Et parce que ce droit est de plus en plus en danger dans le monde, il est salutaire que des romans tels que « L'Evénement » soient publiés et lus, encore et encore.

Au final, un récit touchant qui suscite nombre de réflexions, sur le corps des femmes, les valeurs, parfois (souvent) contradictoires, véhiculées par notre société, et la nécessité – toujours – de l'écriture. Un livre qui confirme le bien- fondé de la récompense du Nobel. Indubitablement.
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1963, Rouen. Prête à tout pour mettre un terme à sa grossesse, Annie, jeune étudiante va devoir affronter cette épreuve, seule…
Alors qu'avorter est encore interdit et puni, et ne sachant ce qui l'attend, elle reste déterminée à ne pas garder l'enfant.

C'est la #journéeinternationaledesfilles le bon moment pour te parler de ma lecture ; le roman autobiographique d'Annie Ernaux publié en 2000. Dans la narration, on ressent sa nécessité de nous confier son parcours, c'est fort.

Son témoignage est bouleversant. Sans pudeur, elle relate les faits, de l'annonce jusqu'à « l'issue ».
Par des mots simples et singuliers, elle décrit d'abord la honte, puis la souffrance psychique éprouvée durant plusieurs semaines. Sa 1ère tentative ratée qu'elle entreprend seule à l'aide d'une aiguille à tricoter, puis la recherche longue et fastidieuse pour trouver celui ou celle qui réalisera l'acte clandestin, alors condamné à l'époque. Après plusieurs passages devant des médecins méprisants incapables de l'aider, elle trouve enfin la bonne adresse. Vient ensuite la douleur physique. Que d'épreuves subies pour se sentir enfin «libérée» et revivre «normalement»

Je ne peux qu'être soulagée que cette époque soit révolue.
Je suis toujours sidérée quand je lis des récits de faiseuses d'anges et de toutes ces femmes qui y ont laissé leur vie par peur de ne pouvoir ou vouloir la donner. Merci à toutes celles qui ont lutté pour obtenir la légalisation de l'avortement.

Je regarderai l'adaptation ciné diffusée actuellement sur Canal +. Puis vendredi soir, j'irai voir « Simone, le voyage du siècle ». Pour exprimer mon respect à ces combattantes.
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