AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,82

sur 123 notes
5
2 avis
4
4 avis
3
3 avis
2
0 avis
1
1 avis

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Un anti-héros alcoolique qui sombre puis se reprend et vainc l'addiction et se réconcilie avec lui-même. A la fois hyper-réaliste, drôle et touchant. Dan Fante digne fils de son père!
Commenter  J’apprécie          50
La tête hors de l'eau
Dan Fante (Pulse/13E Note 2012)
Mooch
(Canongate US/2000, Harper Perennial/2009)

L.A., Bruno Dante, est un travailleur passe-partout. Il déteste tout. Sa ville, son boulot et lui-même. Il perd et trouve des jobs. Entre et pendant les heures de prestations, il cuve. Un fils d'écrivain oublié, fauché, mort. Il déprime, c'est chronique, ce n'est pas une déception passagère. Il écrit à l'occasion et espère être publié. Il n'arrive pas à écrire. L'alcoolisme, son mal-être, ses échecs professionnels ne sont pas le problème principal…
Il s'en accommode à la limite.

« … mon problème c'était les gens. Et il y en a partout. » p20

Cela ne l'empêche pas d'être gentil et franc, généreux, parfois passionné, il dépense sans compter pour lui ou pas et surtout quand il est énervé. « Rien à foutre », il assume et fait ce qu'il veut, imbibé ou non.

Il vit entre deux eaux, saoules ou à jeun pendant plusieurs mois, c'est la pire difficulté qui soit. Un vrai cauchemar.
Le défi est de garder un job, une sinécure, en fonction de l'humeur, il change souvent.
La solidarité entre anciens alcooliques reste un phare dans la nuit. Même s'il reste peu convaincu de l'intérêt des réunions aux A.A. (Alcooliques Anonymes), de l'efficacité des phrases de motivation à l'eau de rose, ces rencontres restent un point de repère de marin pêcheur pour ne pas fracasser la coque de son bateau sur les récifs d'une normalité incompréhensible.
Et cela implique de se rendre aux réunions au moins 3X par semaine. Une roue insoutenable tourne et le mène à la tentative de suicide.
Tant qu'il est impossible de s'assumer, le loyer par exemple, la buée voile la vue sur le monde.

Puis il rencontre Jimmy. Elle est une option à laquelle Bruno n'était pas préparé. Séduisante, manipulatrice, une entraîneuse pour payer sa came et toute saleté disponible pour s'achever plus vite. Même si elle se sert de lui, il ne lâche pas prise et espère la sauver.
Ce qui éveille sa lucidité fragile et sa destruction lui souffle dans le cou pour le ramener sous l'eau.
Il la désire, l'aime, la veut, peu importe son je-m'en-foutisme. Une relation clash, torride pareil à l'état de Bruno par rapport à sa vie et sa relation aux autres.

« Personne ne se souciait plus des mots. La littérature était plus morte qu'une redif de la série Seinfeld... La vraie vie, c'était un film de flics et une paire de nichons siliconés » p60

Difficile d'écrire et d'y croire. La dépendance que connaît Bruno réduit sa capacité à créer. Pourtant, les mots l'habitent, restent présents. le néant l'envoute dans son combat pour la sobriété. Son échelle pour grimper et sortir de ce puits sans fond est un assemblage de lettres.

L'amour le bouffe autant que la bouteille, sauf que pour le premier rien n'est prévu pour le vaincre. Pas de réunions des A.A., des amoureux anonymes. La boisson et son abus sont des notions plus quantifiables, dont les conséquences sont faciles à cibler physiquement et mentalement. Aimer est pire que d'ingérer un litre de vodka. Tu ne sais pas ce qui t'attend.

Sans sentiment, sans attention partagée, Bruno perd le contrôle. Il plonge dans ce qu'il rejette. L'errance. Jusqu'à ce qu'au plus bas, il crie à l'aide.

La vérité transpire le livre. En totale cohésion avec le quatrième de couverture, une introduction très juste, tout est vrai. Une écriture triste, caustique, aérée, crue. Une histoire dans le smog de LA, c'est du « Blue Jay Way » de Fabrice Colin vu d'en bas, c'est du Patrick O'Neil, du Tony O'Neill, du Mark Safranko, sarcastique à la Fante père et à la Bukowski. Tout ce monde se rejoint sous le même toit : 13E Note (ceci était un spot publicitaire :-)).

La décadence et la déprime des bas fonds, à l'opposé de celle des mythes et des légendes hollywoodiennes. Un roman noir réaliste où la solidarité poussée (entraide profonde et sincère entre anciens alcooliques) et ironique (les performances à fournir au travail) chevauche le pessimisme d'individus qui n'existent plus. Des plantes qui vivent grâce à la photosynthèse, nourrie de lumière, plantée dans le crack et arrosée à l'alcool. Leurs couleurs, leurs éclats, leurs dynamismes évaporés, des mortes assurées, toutes mort-nés. Ces plantes sont là, absentes, transparentes dans un décor déprimant, elles sont délavées par le temps.

Un mélange d'amour-haine entre un homme et une femme. Représentatif de la position qu'a Bruno à L.A. L'amour-haine entre Los Angeles, son travail et lui. le liquide à 40 ° transparent est la bouée pour garder la tête hors de l'addiction à l'amour, à la boisson, à la dépression. L'anesthésiant contre ces symptômes incontrôlables. Une flotte dangereuse, traite, avocate du diable. Garder la tête hors de l'eau quelle que soit sa consistance n'est pas une mince affaire.

« J'ai su pourquoi j'aimais cette fille. Elle était comme mon défunt père, en guerre contre sa propre existence » p185
Commenter  J’apprécie          40


Lecteurs (256) Voir plus



Quiz Voir plus

Dead or Alive ?

Harlan Coben

Alive (vivant)
Dead (mort)

20 questions
1821 lecteurs ont répondu
Thèmes : auteur américain , littérature américaine , états-unisCréer un quiz sur ce livre

{* *}