Blackwood

Et il aurait voulu en faire de même. Se déposer à la porte de quelqu’un pour qu’on le trouve. Qu’on s’occupe de lui. Qu’on le nourrisse. Qu’on lui donne un endroit où dormir. Mais il était trop mauvais et trop laid et tout ce qu’il voulait c’était rendre ses coups au monde. Faire rouler cette foutue bagnole et les laisser ici et c’est ce que j’aurais dû faire depuis le début. J’aurais dû porter moi-même le gamin au magasin de l’Armée du Salut. J’aurais jamais dû la laisser m’accompagner même si elle m’a supplié de le faire. D’être la dernière à le toucher. J’aurais dû y aller seul et continuer de rouler et les laisser se débrouiller.

On aura un endroit où loger et alors on pourra penser à la suite. Elle savait qu’il mentait mais l’avait tout de même cru dans l’espoir de laisser son sentiment de culpabilité derrière elle. Puis elle s’était réveillée dans la Cadillac le lendemain et ils étaient repartis.

Faut qu’on se débarrasse d’un des deux. Le petit garçon endormi dans les bras de sa mère. Sa bouche ouverte et ses lèvres sèches. On peut pas continuer comme ça. C’était un calcul élémentaire pour lui. La simple équation qui disait pas assez pour survivre et trop de poids à porter dans cette vie, et il n’avait jamais cru que c’était son sang qui coulait dans les veines de l’enfant de toute manière.