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À la fin des années 70, dans une ville côtière japonaise, une jeune adolescente est kidnappée alors qu'elle sort de son cours de Badminton. D'autres Japonais, plutôt des jeunes gens, vont connaitre le même sort. Quelques années plus tard, en 1987, un avion de la Korean Airline explose en plein vol, la police de la Corée du Sud arrête une Japonaise qui se révèle être une Coréenne du Nord.

Évaporés, éclipsés, des gens disparaissent, sans que jamais, pendant trente ans, on ne sache ce qu'ils sont devenus. Un jour pourtant, à l'occasion d'un rapprochement, pour des raisons stratégiques, de la Corée communiste avec le Japon, le voile est levé en partie sur ses mystérieuses disparitions.

Dans ce roman, Eric Faye, merveilleux conteur et remarquable enquêteur, nous fait découvrir l'histoire incroyable, mais pourtant bien réelle, qui relie les enlèvements au crash de l'avion coréen. Il montre les agissements d'un Etat voyou, mais surtout il montre comment, après des décennies loin de son pays, on devient un autre homme, un apatride dans son pays d'origine, quand ce que l'on a toujours désiré, revenir chez soi, se produit - et c'est tout à fait passionnant.
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Enlevés sur les côtes japonaises, kidnappés pour servir la cause d'un pays paranoïaque, rééduqués intellectuellement… Pour certains, la parenthèse désenchantée se traduit en décennies d'embrigadement.

Je referme ce livre assez perturbée, sidérée du contexte géopolitique qu' Eric Faye transpose en un roman en forme d'enquête d'investigation, attachant, addictif et fort documenté.
Je ne connaissais pas le sort de ces évaporés, ces "éclipses", enjeux dans une guerre d'espionnage entre la Corée du Nord et le reste du monde. J'ai lu avec des pauses internet pour parfaire le sujet. C'est une plongée dans un univers complètement ubuesque, où l'individu est transformé en objet à des fins politiques ou stratégiques.

En creux du "fait-divers" épouvantable, se glisse une réflexion sur la capacité de résilience des individus, leur faculté troublante d'adaptation quand les années passent et que la vie personnelle reprend ses droits (mariage, enfants, travail), et le décalage énorme du retour dans une société maternelle devenue à son tour étrangère.

Des évaporés, déracinés au départ comme à la fin d'une vie en no man's land.

Incroyable lecture...
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A la fin des années 70, la Corée du Nord a kidnappé sur les côtes japonaises des hommes et des femmes étrangers, parfois très jeunes, de tous milieux,( un archéologue, une collégienne, une future infirmière) pour en faire des acteurs de films de propagande ou pour enseigner leurs coutumes et leur langue à de futurs espions de Pyongyang.
Ces japonais kidnappés vont former des agents secrets nord- coréens à devenir totalement japonais afin qu'ils puissent infiltrer au mieux ce pays!!

On qualifie de "Cachés par les dieux" en japonais ces disparus qui ne laissent aucune trace, pas un seul indice, qui mettent en échec les enquêteurs .
Un fait historique que j'ignorais , dont l'auteur , avec talent et fougue, dans un style neutre, justement "faussement banal "et détaché nous rend compte: les enlèvements puis le quotidien âpre de ces gens perdant leur identité, tentant de retrouver en eux la capacité de vivre!
Des existences qui ont basculé pour de longues années , au service d'un régime totalitaire, impénétrable, paranoïaque! fou! inique !

C'est un roman historique à la version romancée extraordinaire, une enquête et une investigation fascinantes, parfaitement documentées, au suspense minutieusement agencé!

Il a valeur de document passionnant , glaçant et implacable sur la dictature la plus hermétique de la planète !
C'est un choix littéraire intelligent, précieux.
Il nous livre une réflexion intense sur la capacité de résilience et d'adaptation incroyables de ces hommes et de ces femmes "volatilisés ".

La vérité douloureuse de ces personnages infiniment émouvants pour leur manière de résister tout en s'adaptant au pire , transformés qu'ils sont , malgré eux, en fait , en"objet,"à des fins politiciennes .
L'auteur a la capacité impressionnante de saisir l'imaginaire et la vie secrète de ces "éclipsés ".
Lu d'une traite , dans le cadre du prix historique Jean d'Heurs spécifique à mon département .
Au terme de cette lecture poignante , on a envie de crier :Vive la Démocratie !



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JAMES BOND : ENFONCÉ...

Au commencement était le folie des hommes, de quelques hommes. Et ce chaos engendra une succession ininterrompue d'autres chaos, des plus gigantesques aux plus insignifiants, du moins, tant que les regards ne se portent pas vers eux ou encore du point de vue de ces monstres froids que sont les Etats.
L'un de ces grand chaos débuta dans les années 50. Cela s'appellera "La Guerre de Corée" devant le tribunal de l'histoire. Depuis ce temps-là, trois générations d'autocrates brutaux et déments se succèdent au nord du 38ème parallèle, créant du même coup la première dynastie communiste familiale, celle des fameux Kim, semant la terreur autant à l'intérieur de leur pays que parmi les voisins plus ou moins proches, ayant pour détestation première les immédiats voisins Japonais ainsi que les plus lointains américains.
Tout le monde le sait depuis les premiers James Bond - accessoirement en ayant parcouru des documents traitant de l'espionnage et du contre-espionnage, lesquels faisaient florès durant les grandes années de guerre froide -, en matière de coups bas, de tripatouille, d'assassinat abjects, d'entourloupes délirantes, de création d'officines douteuses ou de projets fous, difficile de décider qui était le maître. Cependant, en découvrant ce très sidérant ouvrage d'Éric Faye, énigmatiquement intitulé Éclipses japonaises, nous sommes enclins à penser que ces fameux Kim de Corée du Nord remportent décidément la palme des entreprises les plus démentiellement fumeuses !

Ainsi, de la fin des années 70 jusqu'au milieu des années 80, des agents envoyés en missions d'infiltration par le pays du matin calme sur les côtes japonaises en revinrent, épisodiquement, avec des autochtones parfaitement inconnus, modestes, indifféremment d'un sexe ou de l'autre (voire les deux d'un seul coup de filet) mais présentant cependant tous une caractéristique commune : leur relative jeunesse, tournant, à une exception près, autour de la vingtaine d'années. C'est ainsi une petite vingtaine d'humbles nippons - possiblement plus même si le gouvernement japonais n'en a jamais reconnu officiellement que dix-sept tandis que le régime de Pyongyang n'en avouera que treize - qui furent "éclipsés", retranchés, «cachés par les Dieux» ajoute plus hermétiquement l'auteur. Quant au but même de ces enlèvements chroniques, leur seul énoncé ferait presque rire si cela n'avait pas détruit la vie de ces malheureux qui n'avaient rien demandé que de vivre leur vie sans inquiéter personne : donner des cours de "japonité" à la crème des crèmes de l'espionnage nord-coréen ! Permettre ainsi que ces derniers, une fois passé les douanes, les contrôles aériens, les interrogatoires de police, pensent (au moins en surface), agissent, parlent, se coulent dans la société nippone comme s'ils en avaient toujours fait partie. Des vies contre des cours...

C'est le parcours brisé de ces gens simples, très différents les uns des autres tant par leurs origines sociales que par leurs trajectoires intimes dans lequel l'auteur de Nagasaki nous permet de nous plonger sans relâche mais avec une infinie retenue, délicatesse, bienveillance. Usant d'un style sans fioriture excessive ni effets de manche superflus, sans pour autant tomber un seul instant dans le genre journalistique ni démonstratif, Éric Faye nous fait entrer avec un sens inouï du détail qui compte, de la psychologie humaine, dans ces drames polyphoniques et invraisemblables - n'affirme-t-on pas régulièrement que la réalité dépasse la fiction ? -, le terme de «sidération» revenant à plusieurs reprises sous sa plume pourtant très sûre. Pour autant, si les faits sur lesquels s'appuient l'auteur sont absolument véridique, c'est bel et bien à une fiction, et de quelle efficacité !, que nous avons ici affaire. En cela, il confirme les propos d'un fameux écrivain britannique de romans noirs, Tim Willocks, qui expliquait ceci à propos de la distinction entre fiction biographique et récit de non-fiction : «S'il existe, dans son histoire [l'auteur évoque un personnage inspiré d'un individu réel], la moindre poésie ou vérité, je crois qu'il est plus probable de la voir émerger de la fiction que de faits réels. C'est cela la grâce de la fiction - cette capacité à nous offrir la vérité au lieu de simples affirmations.» En quelques mots bien pesés, l'auteur de Bad city blues saisit-là non seulement une vérité mais exprime sans le savoir ce que l'on ressent précisément à la lecture d'Éclipses japonaises. Avec intelligence et une sensibilité - une empathie - incroyable à l'égard de ses personnages, monstres de papier autant que portraits de "vrais" gens, l'auteur nous guide à travers ce réseau inextricable de petits et grand événements, d'accidents sur le fil de l'existence, de destins croisés et décroisés, de détails infimes se transformant, effet papillon oblige, en véritables bouleversements.
Sans jamais s'appesantir inutilement par le biais d'un pathos facile, trop évident avec un tel sujet, sans en rajouter sur des thématiques essentielles - rien qu'à les effleurer, il en donne la substance essentielle - , Éric Faye nous parle de ce qu'est le destin et de tous ces impossibles qui finissent pourtant par advenir : telle cette japonaise se retrouvant mariée et mère de deux enfants avec un ancien déserteur américain de quinze ans son aîné, au beau milieu de ce pays totalement paranoïaque... Tout cela parce qu'au lieu de prendre le chemin le plus court pour rentrer chez elle, juste avant son enlèvement, elle voulu faire un détour par le glacier ! Il évoque aussi l'enfermement, dans cette prison qu'était cette Corée pour ces dizaines de malheureux qui s'y retrouvèrent de force (des européens en étaient aussi), auquel s'ajoute un enfermement plus ou moins volontaire, plus ou moins obligé dans les prisons intérieures de l'esprit, comme une succession carcérale de poupées russes à l'intérieur de cette prison ayant l'échelle d'un pays. Il aborde l'acharnement, l'acharnement à survivre - on songe avant tout à cette jeune fille de treize, probable "erreur de casting", les kidnappeurs visant des adolescents plus âgés, qui va survivre malgré toutes les souffrances vécues par elle, eut égard à sa jeunesse, à son inexpérience, à sa perte brutale de tout repère, à sa totale incompréhension face à l'événement, trop énorme -, l'acharnement à vouloir découvrir la vérité sur ces quelques disparitions étranges et irrésolues (ce journaliste en fin de carrière, au départ de la médiatisation de ces drames), l'acharnement à faire revenir ses gens chez eux...

On referme ce livre avec cet espèce de mauvais goût au fond de la bouche, celui de qui sait désormais ce qui n'aurait jamais dû être connu, sans l'entêtement de quelques-uns, et qui fait de vous le témoin involontaire de ces moments sombres de l'humanité face à elle-même ; on referme l'ouvrage avec un noeud à la gorge de ne savoir avec certitude ce qu'il est advenu vraiment de cette jeune japonaise de treize ans - qui en a plus de cinquante aujourd'hui, si les autorités nord-coréennes ont menti, ainsi que plusieurs de ses proches n'ont cessé de le penser -. Mais pour sa mère, aujourd'hui décédée, la représentation de sa fille restera à jamais celle d'une adolescente de treize ans, même avec la certitude qu'elle a vécu bien au-delà. «Cachée par les Dieux» : c'est ainsi qu'elle et ses compagnons d'infortune ont vécu sans le regard, l'amour, l'amitié, ou tout autre sentiment bon ou moins bon de leur entourage. Des années de vies oblitérées, annihilées plus ou moins, insensées : Éric Faye nous les fait toucher du doigt avec talent, avec profondeur, avec humanité.
Avec poésie et vérité.
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J'avais beaucoup aimé " Nagasaki", j'étais curieuse de découvrir cet autre livre qu'une amie m'a prêté.

Glaçants, ces enlèvements de jeunes filles japonaises, emmenées en Corée du Nord.Terrifiant parcours, vies brisées, reconditionnées, identités niées ... Et quand on sait qu'Eric Faye s'appuie sur des faits réels, on ne peut qu'être révolté et plein de compassion envers ces êtres fantômes.

La construction du livre est brillante et se présente comme un puzzle dont on assemble les pièces peu à peu. Les différents personnages apparaissent les uns après les autres et vont nous dévoiler les subtils aspects de cette histoire, où espionnage, dictature, fuite en avant, perte vont créer un réseau de sens , de vérité implacable, accablante en ce qui concerne le régime de Corée du Nord, pourtant déjà tristement célébre.

Édifiant et angoissant. " Parfois je regarde les photos noir et blanc, peu nettes, de tous ces enlèvements. Ce roman est dédié à toutes ces personnes".
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Éclipses japonaises est un ouvrage dont je ressors déstabilisée. Cette histoire de Japonais enlevés par des Nord-Coréens pour les instruire de la nipponité et parfaire leur future couverture en tant qu'espions est à peine croyable. Et pourtant...

Le livre d'Éric Faye oscille entre le roman et le documentaire. Il cite dans sa postface les différentes sources qui ont nourri sa plume, alors qu'il était invité à la pépinière franco-japonaise de Kyôto, la Villa Kujoyama.
Le résultat est impressionnant, encore que cet attribut me paraisse bien léger pour exprimer l'impact de ces Éclipses japonaises sur mon esprit. Non que l'auteur en rajoute côté style. Nul pathos ou renchérissement pleurard dans son établissement des faits. Chaque phrase est ciselée avec naturel, sans surcharge émotionnelle. Ce qui offre toute sa force au texte.

Je connaissais par d'autres lectures les évaporés au Japon. En revanche, j'ignorais tout de cet aspect très particulier des menées nord-coréennes. Cela semble tout droit sorti d'un cerveau malade (d'une certaine façon...). La réalité de la Corée des Kim et la propagande véhiculée à l'intérieur même de ce pays font un grand écart et la population, pour reprendre les termes d'Éric Faye, forme des millions de figurants, dans une tragédie où la moindre erreur de réplique aboutit à une exécution dans les coulisses.

J'ai apprécié l'approche narrative de l'auteur; il opte pour un récit où chaque chapitre présente le point de vue d'un protagoniste différent : une jeune agente des services secrets de la Corée du Nord, des Japonaises enlevées, un soldat américain déserteur, journaliste nippon enquêtant sur ces mystérieuses disparitions, etc. Chaque voix rend le déroulement de l'histoire vivant. Comme une fenêtre ouverte sur le quotidien et les réalités de ces personnes.

Un livre à découvrir absolument pour ses qualités rédactionnelles et de fond. Il permet d'en apprendre plus sur cet État mal connu et qui fait beaucoup parler de lui depuis quelques mois. Lorsque l'auteur évoque que la mer du Japon ne sépare pas deux pays mais deux planètes résolument différentes, je comprends mieux après lecture toute la véracité de ses propos.
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Un roman qui m'a donné froid dans le dos… à la découverte de tranches de vies en Corée du Nord dans les années 1960-70 jusqu'au début des années 2000.

Je connaissais les « évaporés » du Japon, ces personnes qui disparaissent irrémédiablement, souvent volontairement, pour refaire une vie ailleurs. Je ne savais rien des « éclipsés » à qui la situation est totalement imposée sans autre choix que d'y consentir bon gré mal gré sinon de mourir. Un sort terrible, une vie de plusieurs décennies volée. Et quand ils peuvent revenir dans leur pays d'origine, c'est au prix d'une immense culpabilité : comment ont-ils pu malgré tout se laisser aller à avoir des moments heureux ? comment vont-ils expliquer cela à leurs proches à qui ils ont tant manqué sans aucune explication de leur départ ?
Mais surtout je suis révoltée (hélas pas surprise !) qu'un état quel qu'il soit se permette d'utiliser ainsi des personnes prélevées ici et là contre leur volonté, de les enfermer dans une vie de servitude avec un bourrage de crâne hors du commun ! Et lorsque les autres pays suspectent quelque chose, les relations diplomatiques empêchent bien des sauvetages.
Ce roman est superbement écrit et permet de comprendre les tenants et aboutissants de toutes ces histoires qui se rejoignent. Roman traitant d'enjeux politiques mais aussi tout simplement d'humanité et de survie.
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Dans « Éclipses japonaises » Éric Faye nous fait le récit de femmes et d'hommes japonais kidnappés par la Corée du Nord. Sous ce régime totalitaire, autoritaire et complètement paranoïaque, ces japonais vont former des agents secrets nord-coréens à devenir totalement japonais. En leur enseignant la langue, les coutumes et les traditions du pays, ils devront leur procurer une véritable identité japonaise afin qu'ils puissent ensuite infiltrer au mieux le Japon. Ces personnes se sont évaporées pendant plus de trente ans sans que personne ne sache jamais ce qu'elles sont devenues. Elles sont d'ailleurs surnommées par les japonais les « cachés par les dieux ».

Nous voilà face à un grand roman d'espionnage ! Oui sauf qu'ici Eric FAYE écrit son livre à partir de faits réels ! En effet, durant les années 70-80, au Japon et aux Etats-Unis un certain nombre de personnes ont en effet disparu soudainement.

Par le biais de la fiction et à travers un roman passionnant et captivant, l'auteur nous fait découvrir le destin incroyable et sidérant de ces disparus. Extrêmement bien documenté, avec une écriture simple, le roman nous plonge au coeur du régime nord-coréen ! Nous souffrons avec ces disparus qui ne comprennent rien à ce qu'il leur arrive (certains d'entre eux sont de très jeunes adolescentes) et très vite la triste réalité historique se confond avec la fiction.

J'avoue être restée totalement abasourdie par ces histoires individuelles dont, en ce qui me concerne, je n'avais jamais entendu parler (aucune mention de tout cela dans les livres d'histoire).

Le livre terminé, la seule pensée qui nous vient : qu'il est bon de vivre dans un pays démocratique !
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Éclipses japonaises ou comment un roman nous ramène à la réalité géopolitique entre le Nord ( la Corée du Nord) et le Japon dans les années 1970.
S'appuyant sur la réalité des faits Éric Faye nous propose une incroyable lecture d'un fait unique réalisé par un état.
Dans les années 1960 / 1970, l'appareil d'état Nord Coréen à procédé au rapt de dizaine de Japonais sur le sol nippon. Un bateau au large des côtes, des scooters de mer dans la cale qu'on envoie en bord de côte pour rapter des Japonais ou Japonaises, de tous âges.
Ensuite retour en Corée du Nord afin de suivre un bon lavage de cerveau et apprendre par coeur le Juche, l'idéal autocratique au service du pouvoir.
Le but de l'état coréen : faire que ces Japonais apprennent leur langue aux espions coréens ainsi que les traditions japonaises.
Ces Japonais vont rester " enfermés " trente ans en Corée. Ils fondèrent des familles en ayant des enfants pour qui la Corée du Nord est un paradis et le reste du monde un enfer.
Un attentat contre un Boeing Sud Coréen mettra la puce à l'oreille des autorités japonaises. L'une des terroristes arrêtée se disant coréenne avait dans son langage quelques locutions japonaises.
Tout le talent d'Éric Faye est de destructurer le roman passant de 1960
aux années 2000 tout en nous rappelant les grandes lignes historiques : La Corée en totalité a appartenu au Japon, la guerre du Vietnam et la présence des américains sur la ligne de démarcation entre les deux Corée.
Jusqu'à 2001 avec Georges Bush qui intègre la Corée du Nord dans l'Axe du mal.
A ce jour quelques Japonais sont rentrés chez eux.
Les éclipses sont longues et la géopolitique n'a que faire de la route du soleil.
Lien : https://auventdesmots.wordpr..
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J'avais lu il y a quelques années une enquête de L. Mauger et S. Remael intitulée Les Évaporés du Japon ainsi qu'un roman de T B. Reverdy Les Evaporés qui parlaient de ces hommes (90 000 par an, ce n'est pas rien !) qui disparaissaient volontairement pour fuir une société trop stressante, un endettement, une perte d'emploi, un échec à un examen ou une famille dans laquelle ils ne trouvaient plus leur place. Ils se fondaient dans la multitude des mégalopoles. Certains se suicidaient, d'autres refaisaient leur vie. On les retrouvait parfois. Souvent, on ne les revoyait jamais.
Cependant, pour certaines familles s'ajoutait la crainte d'un enlèvement par la Corée du Nord, fait assez fréquent dans les années 1970-1980.
J'en étais restée là. Je me souviens que ce phénomène de société, ces gens qui décidaient de plier bagage et de tout quitter volontairement, en une nuit, m'avait fascinée.
Ce que j'ai découvert dans le livre d'Éric Faye m'a tout autant passionnée : en effet, l'auteur raconte précisément la vie d'hommes et de femmes enlevés par la Corée du Nord pour former des espions nord-coréens en leur apprenant la langue japonaise et les coutumes du pays.
On les appelle en japonais les « cachés par les dieux ou kamikakushi ».
Le roman d'Eric Faye, extrêmement bien documenté et très proche de la réalité historique, modifie les noms, bien sûr, mais finalement et sans doute grâce à la fiction, permet d'approcher au plus près des sentiments de celles et ceux qui ont été arrachés à leur famille, à leur pays, à leurs racines pendant plusieurs dizaines d'années et transplantés ailleurs, devenant par là-même étrangers aux leurs et à leur propre culture.
Naoko Tabane, collégienne de treize ans, rentre de son cours de badminton. Nous sommes en décembre 1977 à Niigata. Elle sera enlevée. En Corée du Nord, elle s'appellera Hyo-sonn et apprendra d'abord la langue de ce pays étranger. A son tour, elle devra enseigner le coréen à une japonaise, elle aussi enlevée. Les échanges des deux jeunes femmes sont étroitement surveillés. Elles doivent apprendre ensuite « la philosophie » du pays, le « Djoutché » (Juche), doctrine officielle développée par Kim Il-sung. Puis, une mission sera confiée à Naoko : face à des Coréens connaissant parfaitement le japonais, elle devra « parler de sa petite enfance », leur apprendre des berceuses, leur raconter les émissions de télévision qu'elle regardait enfant.
La jeune fille ne comprend pas tout de suite le but de sa mission. « Ils buvaient son enfance » pense-t-elle en voyant ces jeunes adultes pendus à ses lèvres. Mais soudain, elle prend conscience d'une chose terrible, à savoir « qu'elle était peut-être en train d'apprendre des comptines à des tueurs ».
Le but de tout cela ? Faire de ses auditeurs coréens de parfaits Japonais, dans leurs moindres gestes, leurs moindres mimiques afin qu'ils deviennent des espions modèles et qu'un oeil averti soit incapable de soupçonner leur origine.
« À force de parler, Naoko Tanabe avait la sensation de se vider de sa langue maternelle comme de son enfance », elle « s'écoulait en eux… », « quand ses élèves seraient devenus des Naoko Tanabe, elle-même aurait tari. C'en serait fini d'elle. »
La prose magnifique d'Eric Faye peint avec finesse et justesse une jeune femme qui se meurt, que l'on tue à petit feu. Sa souffrance paraît insondable.
Il y aura aussi Setsuko Okada, future infirmière, qui sera enlevée le quinze août 1978 sur l'île de Sado, avec sa mère. Plus tôt, c'est Jim Selkirk, le GI américain, qui disparaîtra le 17 février 1966 pour ne réapparaître que trente-huit ans plus tard…
Et ces destins vont se mêler, se fondre, se croiser sans que les protagonistes ne puissent se parler vraiment, échanger, dire ce qu'ils ont sur le coeur. Ces gens vont vivre une vie qui n'est pas vraiment la leur, auront des enfants, nés en Corée du Nord, parlant le coréen du Nord, des enfants qui seront un peu étrangers à leurs parents, des enfants à qui on ne pourra pas dire la vérité, qui auront peur du Japon, présenté à l'école comme le pays du diable…
Quand on dit que la réalité dépasse parfois la fiction…
Fascinant dans son propos mais aussi dans sa forme, ce roman est construit comme un puzzle, restituant par là même une réalité géopolitique complexe. Petit à petit, le lecteur reconstitue, à travers les différents points de vue sur les événements, une Histoire, des histoires à peines croyables et hélas, encore d'actualité !
Une oeuvre centrée sur un double mouvement vertigineux d'hommes et de femmes qui perdent leur identité : des Japonais devenant bien malgré eux insensiblement Coréens, et d' autres faisant le trajet inverse, tout aussi peu volontaires, contrairement à ce qu'on pourrait penser. (On ne choisit pas nécessairement d'être espion !)
Un roman extraordinaire, extrêmement bien documenté, au suspense digne des plus grands romans d'espionnage, qui met en scène des personnages dont la tragédie nous émeut, des êtres exilés sur la planète rouge et qui ont trouvé malgré tout en eux la force incroyable de vivre et d'aimer…
Un grand cru de la rentrée littéraire 2016…

Lien : http://lireaulit.blogspot.fr/
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