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4,19

sur 1291 notes
Plus parabole qu'enquête sociologique, ce roman sur le rôle des livres est assez subtil pour poser plus de questions qu'il n'apporte de réponses.
Je ne suis d'ailleurs pas sûre que le livre en soit le sujet principal. L'objet n'a pas une grande puissance évocatrice. Volé pour de rire par les enfants, manié avec plus ou moins de distance par les adultes, il ne s'impose pas comme puissance symbolique. Lire est une nécessité pour s'insérer dans le monde, l'école une discipline laborieuse et humiliante: non, la chose imprimée ne fait guère rêver.
Mais la lecture, la parole lue, les mots oralisés, le dit du conteur qui captive, voilà sans doute tout le bonheur des histoires : celles qu'on écoute, qu'on interrompt, qu'on questionne -n'est-ce pas Bettelheim qui disait qu'une histoire ne vaut que si l'enfant l'a entendue sur les genoux de ses parents, que si elle s'est faite sensuelle avant que d'être sensible.
L'écriture permet de se défendre et de comprendre, elle a à voir avec la froide rationalité. La voix porte les contes et les mythes, elle unifie, rassemble et donne du sens. Elle magnifie les gitans et fait grandir les enfants.
Pourquoi Esther vient-elle tous les mercredis au milieu des caravanes? Par désir de justice sociale? Parce que ses propres enfants sont grands ou trop occupés par les écrans, qu'elle n'aime rien tant qu'être celle qui la première ensemence un cerveau vierge et sans références? Sans doute d'abord parce qu'elle est juive et qu'elle partage avec les gitans le discutable avantage d'être de la race des proscrits et des survivants.
Esther l'étoile croit en son rôle de guide. Mais guide vers quoi? Vers le conformisme ? Vers l'acceptation ? Au moment où la famille est expulsée, elle leur apprend la fable du savetier et du financier. Moralité: être riche, quel sacerdoce. Restez pauvre, vous y gagnez la liberté. Quand la littérature fait bon ménage avec l'idéologie la plus rance. Parce que le livre, ça peut être ça aussi.
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Ils n'ont aucun papier, ils occupent un terrain sans autorisation, les parents sont illettrés, leur dernier enfant n'a pas été déclaré à la mairie. Ils sont des gitans de France, des cinq fils aucun n'aurait songé à quitter leur mère Angéline, cela aurait été un déshonneur. Ils vivent donc avec leur femme et leurs enfants sur un terrain privé appartenant à une vieille institutrice. le ravitaillement sans argent, l'eau que l'on puise à la pompe, les sources occasionnelles de revenu, voilà leur quotidien. Et puis, un jour apparaît Esther, elle compte sur les livres pour les apprivoiser.

« C'était la responsable d'une bibliothèque. Elle pensait que les livres sont nécessaires comme le gîte et le couvert. »
Et peu à peu les femmes se confient, les enfants s'attachent et les hommes observent dont Angelo le seul célibataire qui se retrouve amoureux avant même de comprendre ce qui lui arrive. Cette femme là, marié, mère de trois garçons, n'est pas pour lui, il faut s'empêcher de tomber dans des amours impossibles.
Grand merci à notre amie Colette de nous avoir offert ce petit bijou. Publié en 1997, je n'avais jamais eu l'occasion de lire. J'ai tout de suite été emporté par la qualité littéraire de ce roman. Alice Ferney nous introduit au coeur d'un camp de gitans sédentarisés en banlieue parisienne. Elle évoque avec beaucoup de pudeur l'exclusion, l'illettrisme, l'intolérance, les rapports hommes-femmes, l'importance de l'éducation, la place de l'école et des livres.
« Le mariage tzigane c'est sur l'honneur, une femme tzigane elle supporte le mari comme il est, elle a de la chance quand il ne la bat pas et que sa belle-mère est gentille. »
Chaque groupe de personnages a son importance, les femmes bien sûr, dont Angéline la matriarche, mères avant tout, « Si les promesses sont sacrées, celles faites aux enfants le sont plus que les autres. » Les hommes et leur fierté « Rares sont les gitans qui acceptent d'être tenus pour pauvre, et nombreux pourtant ceux qui le sont », et les enfants naïfs et sensibles « Ils n'avaient pas les jouets que reçoivent d'ordinaire les enfants, mais ils avaient la liberté. Ils faisaient un butin de tout ce qu'ils ramassaient. Ils allaient et venaient comme bon leur semblait. » Et au milieu Esther, la bibliothécaire qui va leur faire découvrir Jean de la Fontaine, Babar, Perrault, Andersen et Saint-Exupéry.
C'est donc bien le quotidien de cette tribu que l'auteur nous invite à partager, les naissances, les décès, les fêtes, les violences et l'amour.
Les dernières pages où Angéline a décidé d'arrêter la route de sa vie et convoque une à une ses belles-filles pour leur transmettre le sens de leur vie sont absolument magnifiques. Un roman rempli d'humanité où l'auteur sait à merveille nous faire entendre les sentiments inavoués, les désirs brimés et surtout que la grâce peut se trouver dans le dénuement absolu.





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C'est un grand message de tolérance.

Bien sûr, les hommes de ce campement de gitans vont se quereller sous vos yeux, commettre des larcins, crier et battre leurs femmes, car ils n'ont pas de mots, pour s'exprimer, seulement de la violence, en eux.

Les enfants traînent dans la boue, ne mangent pas à leur faim et ne savent comment s'occuper... jusqu'à l'arrivée d'Esther, une bibliothécaire qui veut lire pour ces petits démunis, pour l'amour des livres.

Les yeux des gamins vont s'illuminer, au fil des mots, des pages et des histoires. Alors, ils vont comprendre qu'il existe d'autres mondes que le leur et qu'il y a d'autres rêves, à leur portée. Et apprendre, aussi, le respect de soi et des autres, afin de préférer les mots et l'échange à la violence et aux coups....

" Ils (les enfants) deviennent sensibles, comme elle, à la beauté enfermée dans les pages"
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Très beau roman sur la différence, la grande pauvreté et le pouvoir de la lecture.
Le contexte est un campement de gitans, le personnage principal une liseuse bénévole les visitant régulièrement.
En effet, comme il est dit dans ce magnifique texte "la vie a besoin de livres, car la vie ne suffit pas."
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A la tête de cette famille gitane, Angéline, la grand-mère veille sur sa tribu composée de ses 4 fils, 3 belles-filles et nombreux petits-enfants. Ils vivent illégalement sur un terrain où ils ont installé leurs caravanes. Esther, une bibliothécaire, vient faire la lecture aux enfants tous les mercredis et contre toute attente, ils apprécient grandement ce moment, eux qui n'ont jamais pu aller à l'école. Esther se prend d'affection pour eux et arrive à faire scolariser une enfant de la famille. La vie est rythmée par la pauvreté, la saleté, la violence, les larcins pour subvenir aux besoins, la maladie mais aussi la chaleur et la solidarité qui règne entre tous les membres. Qu'adviendra t'il à la famille si un ou plusieurs membres la quittent ?
J'avais vu ce livre dans le rayon librairie d'un grand magasin et la quatrième de couverture m'avait donné envie de le découvrir. Je l'ai emprunté à la médiathèque de ma ville mais édité par Actes Sud dans un format haut et étroit, je trouve personnellement ce format pas très flatteur. Néanmoins ce texte est remarquable par sa qualité, l'auteur a su rendre la dure vie des Gitans avec respect et authenticité. Elle a reproduit le langage de cette famille au plus près, avec simplicité. le texte n'exclut pas parfois la violence et les détails crus. J'ai particulièrement apprécié le personnage d'Angéline qui est touchant par ce qu'on devine chez elle, et celui d'Esther, synonyme de bonté et d'humanité car elle n'hésite jamais à rendre visite à cette famille de Gitans, aussi différents d'elle soient-ils. Ce livre est un beau message de tolérance, il nous invite à ouvrir notre coeur aux plus pauvres et aux rejetés de la société.
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C'est bien ce que tu lis ?
Heu, moyen, ça parle d'une bibliothécaire qui vient lire des livres aux enfants d'une famille de Gitans.
Ben, ça devrait te plaire !
Mouais... Mais je ne trouve pas agréable d'être dans le froid, sur un terrain plein de déchets, de bouts de verres avec un feu qui pue.
Tu rigoles, t'es dans ton lit !
Non je suis dans le livre, je suis la bibliothécaire, je suis la vieille Angelina, je vis ce qu'ils vivent. Mais je n'arrive pas vraiment à m'identifier. Ces gens fatalistes, qui ne se battent pas, restent dans leur crasse, ne cherchent pas à améliorer le sort de leurs enfants m'agacent.
Ah oui, je comprends. Mais c'est bien écrit ?
Ah oui, tout à fait.
Alors tu vas le finir ?
Oui d'autant qu'il est court, ce roman.

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Ce roman est l'histoire d'une rencontre.
Celle d'une bibliothécaire et d'une famille gitane installée sur un terrain de la commune.
J'ai lu ce livre parce que Magda et Amanda en ont parlé sur leur blog et m'en ont donné très envie.
C'est un magnifique sujet que celui d'une bibliothécaire qui va porter des livres là où il n'y en a pas, mue par un désir un peu mystérieux qui la fait entrer dans une communauté rétive et fermée sur elle même.
Par le biais des enfants, et des histoires qu'elle leur raconte, elle se fait accepter petit à petit et apprends à connaitre les hommes et les femmes qui vivent là, dans le dénuement, sans papiers, sans travail, sans argent, seulement avec l'espoir, l'amour, et les enfants.
Il n'y a pas de mièvrerie, ni de doux angélisme dans le quotidien rude et violent qui nous est raconté. Il y a le froid, la faim, la saleté, le désoeuvrement, l'alcool et la violence, la pauvreté et l'analphabétisme. Il y a le rejet, l'exclusion, l'impossibilité de mettre les enfants à l'école, l'expulsion qui viendra, inexorablement, comme toujours, comme une condition, une fatalité.
Il y a aussi ce paradoxe brûlant de vies libres de toutes les chaînes et qui s'avèrent pourtant être des prisons claniques dont jamais personne semble ne pouvoir sortir.
Mais la rencontre fait son oeuvre tout doucement...
Pas de miracle, pas de magie, juste un début de changement qui ouvre quelques brèches dans les têtes et les coeurs et permet l'espoir d'un mieux...
On est touchés par la fierté de parents qui auront un enfant qui saura lire et nager, même si c'est au prix de grandes souffrances à traverser. On admire le courage et la détermination d'un mère qui quitte son mari violent pour vivre ailleurs avec ses filles, loin du joug de la belle mère. On tente de cerner la mystérieuse figure centrale du groupe : cette \"matriarche\" qui tente coûte que coûte de sauver son monde voué à disparaître.
Il y a quelques beaux passages sur ce qu'il y a d'essentiel dans une vie, sur la liberté, la pauvreté, la fierté et ce qui nous fait homme.
Cette lecture ne laisse pas indifférent, on y entrevoit ce que peut être le dénuement et la grâce qu'il fait jaillir dans les moments d'émotions intenses qui remplissent une vie. On égrène avec plaisir autour du feu les seules richesses inaliénables qui peuvent nous être données au cours d'une existence.
Les moments de lecture collective sont des temps hors du temps, gobés par les enfants avec une avidité et un bonheur rare et captés avec finesse et sensibilité par l'écriture d'Alice Ferney.
Cette histoire raconte sans doute un peu de toutes les expériences \"hors les murs\" menées en France par des associations et des bibliothèques. Sans être un témoignage, ni un documentaire, c'est peut-être tout simplement un bel hommage rendu à ce travail souterrain qu'on ne voit pas mais qui fait beaucoup.
http://sylvie-lectures.blogspot.com/2008/05/grce-et-dnuement-alice-ferney.html
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Ma première rencontre, à travers ce roman, avec Alice Ferney, a tout simplement été magnifique. J'ai été totalement séduite par l'histoire d'Esther, bibliothécaire de son métier, qui, à force de persévérance, va réussir à se faire accepter par une famille de gitans vivant à la périphérie de la ville dans la plus grande pauvreté, et cela dans l'unique but de venir raconter des histoires aux enfants.

Au départ, simplement tolérée par la matriarche, Angéline qui veille sur le camp et principalement sur ses 5 grands fils, elle va très vite devenir indispensable aux petits qui vont attendre le rendez-vous hebdomadaire avec impatience. Grâce à sa discrétion, Esther va peu à peu apprivoiser aussi les femmes de la tribu, Angéline bien sûr mais aussi ses 4 belles-filles. Contrairement à leurs hommes qui se détruisent dans l'inactivité et les quelques vols qui leur permettent de survivre, elles vont parler de leurs conditions de vie et du bonheur de s'épanouir à travers la maternité. Un échange va se produire mais toujours dans le respect de leurs différences. Esther va réussir sa mission en apportant un peu de "grâce" dans tout ce "dénuement" à travers les livres.

Il est très facile de s'attacher à tous les protagonistes de l'histoire et en particulier à Angeline qui va adopter cette"gadjé" et la considérer comme sa fille. Le moment le plus émouvant reste celui où sentant que sa mort est proche, elle convie chacune de ses brus, l'une après l'autre, elle qui ne jurait que par ses fils. Cette première véritable discussion va donner lieu à de belles réflexions sur la vie et en particulier celle de ces femmes, dont tous les sentiments, joies ou peines, sont centrés sur les enfants.
Le style est assez original puisque les dialogues, fondus dans le récit (sans tiret, ni guillemet) font que l'on ne ressent pas de coupure et que l'histoire s'écoule ainsi, irrémédiablement, comme la vie. 20/20
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Nous voilà plongés dans le quotidien d'une famille hors du commun: une famille très soudée, dans laquelle vivent la grand-mère, ses cinq fils, ses quatre brus, et tous les petits enfants. Nous plongeons dans le dénuement de cette communauté de gitans qui vit dans des conditions d'extrême pauvreté. Nous suivons leur quotidien et leur découverte des livres grâce à Esther.

L'auteur nous familiarise avec cet univers d'une manière délicate et le temps de quelques mois nous suivons les événements douloureux et joyeux de cette famille. C'est un monde qui m'est complètement étranger, et j'ai assisté à ce quotidien en ayant le coeur très souvent serré malgré les moments heureux. Une sorte de résignation voulue assez glaçante.

Un beau roman pourtant, dans lequel la lecture partagée est une sorte d'île au milieu de l'océan.
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La lecture, c'est pour moi l'ouverture sur d'autres façons de penser, sur d'autres cultures, d'autres mode de vie. Et ce livre en est un exemple, une invitation à partager un peu le monde des gitans, en l'espèce de ceux qui vivent en marge de notre société, qui les ignore. Bien sur, ce n'est qu'un roman et l'histoire racontée n'a pas la prétention de décrire l'ensemble de la communeauté, mais si l'auteur a bien fait son travail, les situations décrites s'inspirent de situations réelles que l'ont ne peut pas simplement ignorer. Une invitation à aller aussi voir l'exposition du photographe Matthieu PERNOT au musée national de l'histoire de l'immigration ( jusqu'au 26 août) et son travail avec des gitans.
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