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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Monsieur Même est un personnage bien étrange. Pas seulement à cause du chapeau melon et de sa redingote élimée. Peut-être parce qu'il marche sur les murs avec sa casserole au bout d'un manche à balai. Il passe ainsi ses journées à ouvrir des portails sans descendre à terre. Ladite casserole servant à la pièce de monnaie rétribuant son étrange service.
Un ermite sur les murs.
L'impudique Julie va le sortir de sa torpeur en le faisant souffrir d'amour. Mais ça c'est compréhensible.

Mais que viennent faire un marinier-épicier et un président de la 3ème république avec son gouvernement et son armée dans cette histoire?

Pour cela il faudra lire ou relire ce que Tardi et Forest ont concocté il y a bien longtemps. Ce roman graphique, devenu un classique, où un homme se retrouve esclave d'une situation kafkaïenne.
Un chef d'oeuvre ici même.







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Que le roman graphique soit! Et le roman graphique fut. C'était en 1979. Forest avait écrit, Tardi avait dessiné. Ici Même était né. Une déflagration dans l'univers de la BD, une explosion qui lissait la houppette tintinesque, déculottait Sylvain, déplumait la mouette rieuse, passait au bulldozer toutes les cours de récré.
Soudain, la bande dessinée faisait les yeux doux du côté de Kafka. Sans cafards, sans château, sans procès (ou presque). Avec des murs, des grilles, des clés, des bouts de propriété, des politiciens véreux. La bande dessinée glissait vers un absurde en noir et blanc , piétinait les plates-bandes d'Ubu, dynamitait les clichés de la vieille école à lorgnon et blouse grise. La bande dessinée se hissait vers les sommets.

Oui, des sommets! D'ailleurs, Arthur Même vit sur des murs. Exclusivement sur des murailles élevées et dans un mirador. Arthur Même surveille le domaine de Mornemont, véritable camp retranché, composé de parcelles labyrinthiques aussi closes que des oubliettes royales. Nul habitant ne peut franchir les grilles sans l'assentiment d'un Arthur, dépositaire des clés. Aristocrate de naissance, Arthur fut dépossédé des terres familiales mais conserva la jouissance des murs. Amer, revanchard, Arthur taxe les propriétaires d'un morceau du domaine à chaque ouverture de grille… Aux fins de financer un nouveau procès qui lui restituerait son dû. C'est dire que l'on se déteste à Mornemont. Fort heureusement, la propriété a les pieds dans l'eau d'un lac, ce qui permet l'approvisionnement du roi Arthur (sans couronne) par bateau épicier, sans danger. le mur touche le lac.
S'obstiner c'est se condamner au funambulisme mural. A aimer Julie, l'unique amie qui l'aime bien comme elle aime les hommes. A échanger deux mots avec maman au téléphone. A rompre la solitude avec un épicier poursuivant le destin familial "de lac en lac, toujours plus à l'ouest" avant naufrage. A se faire chahuter par le président de la république dans un épisode surréaliste.

Lire Ici-même, c'est se frotter à des dialogues improbables et savoureux:

"- Vous voulez boire quelque chose ?
- Bah , si vous insistez …
- Je ne me souviens pas avoir insisté et je ne me souviens pas non plus avoir jamais compris pourquoi les gens boivent tant … je me demande si un jour quelqu'un m'expliquera ce qu'il y a dans le vin … Pour moi le vin et l'huile c'est pareil … avec le vin sur la langue les gens dérapent de la tête comme avec l'huile sur le pavé on dérape de la semelle ! Comment discuter avec des gens qui dérapent et qui, à tort, m'attribuent de l'insistance … Pourquoi pas de l'entêtement ?  »

La littérature a ses classiques. La bande dessinée également. Cette BD parue initialement dans "A suivre" me suit encore.
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De toutes les BD de Tardi, Adèle Blanc sec ou Nestor Burma, adaptations de Léo Mallet ou mises en perspectives d'une période de l'histoire -14-18 , 39-45, la commune...- Ici-Même reste celle que je préfère.

Poétique, inventive, à la fois décapante d'ironie et pleine d'imagination, cette saga du haut des murs, cet enfermement perché (à tous les sens du mot) est un ...monument de fantaisie et de profondeur! Le scénario, absurde et décalé, est de J. Forest et la mise en images, lunaire et mélancolique, est de Tardi.

"Même"- c'est le nom du héros- arpente son territoire de faîtes-de-murs labyrinthique: il s'est fait gentiment spolier, depuis des générations, de tous ses terrains, il ne lui reste en (nue) propriété que les murs.

Le haut des murs, exactement. Il relève inlassablement les taxes, les péages de ses murs, c'est son seul revenu, son gagne-pain, toute sa journée y passe mais au péril de sa vie, toujours: en bas l'attendent chausses-trappes et chiens féroces... Donc jamais un pied à terre, il y a danger!!

Il est le funambule maniaque des créneaux, l'acrobate tâtillon d'un domaine en pointillé...

C'est aussi l'histoire d'une névrose qui guérit, d'un repliement qui s'ouvre, d'un solitaire quasi-autiste qui découvre l'autre, le sexe, l'amour, la vie..et redescend sur terre...

Une petite merveille en noir et blanc. A déguster avec immodération!
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Mon premier Tardi. J'avais 15 ans. Et j'avoue que je ne comprenais rien.
Je l'ai relu depuis et je ne sais si c'est parce que c'était le premier, parce qu'il m'avait paru étrange, mais c'est un de mes préféré.
Le monde d'Ici-même est ubuesque, inventif, érotique, poétique. Il n'a pas de sens, mais est-ce toujours utile ?
Pour Tardi, sans doute pas.
C'était aussi une de mes premières BD en noir et blanc et surtout une sortie violente mais extraordinaire du monde de la BD franco-belge classique (Spirou et compagnie).
Les chocs sont toujours salutaires en matière de lecture. Ils font grandir.
Développez votre imagination, c'est ici-même que ça se passe.
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L' alliance du regretté Forest et de l'immense Tardi, donne un récit poétique et onirique très original.
C'était la grande période du mensuel A SUIVRE.
Mention pour la maison d' Arthur Même!
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Le roman graphique du jour est un one-shot de 170 planches en noir et blanc. Sa première édition remonte à 1979 dans la collection « Les romans (A suivre) » de Casterman. Elle a été prépubliée dans les numéros 1 à 12 de la revue (A suivre) entre février 1978 et janvier 1979. le dessin et l'encrage sont le fait de Jacques Tardi tandis que le scénario est de Jean-Claude Forest.

Notre promenade aura parfois le goût de la chasse au trésor (ou du geocaching), certaines parties de l'intrigue seront donc forcément dévoilées.

La France, terre de contrastes, terre de fantasmes, propose un tel choix de destinations pittoresques que vous vous retrouvez un peu par hasard dans le Pays Clos, un endroit dont vous n'aviez jamais entendu parler jusqu'à présent, une bourgade coupée du monde sur le sol français. Après quelques minutes de navigation sur un vaporetto rappelant Venise, vous voici accueilli par un guide tout aussi pittoresque. le type, grand, mince, portant un chapeau melon et un costume froissé, un long bâton de bois terminé par un panier posé négligemment sur l'épaule, ne descend pas de son mur duquel il vous contemple.

- Bonjour à toutes et à tous, je me présente, Arthur Même, propriétaire et guide de ces lieux ! Je suis ici pour vous faire le tour du Pays Clos, vous relater son historique, ses habitants, sa situation unique ! Si vous voulez bien vous donner la peine de monter …

Avec vos camarades de bateau, vous vous exécutez, et à votre grande surprise, vous marchez sur cet étroit mur en toute assurance. La visite commence et votre guide se retourne vers le groupe qui marche en file derrière lui.

- Vous vous trouvez actuellement sur ma propriété, celle des Même, et tout ce que vous pouvez voir autour et dans ces murs également. Malheureusement, par une suite de circonstances que seule l'administration française peut générer, toutes les habitations ainsi que les terrains compris entre ces murs ne sont plus miens… Pour tout vous dire, je suis en procès avec la totalité de la population pour les récupérer ! En attendant, ils ne peuvent aller et venir sans mon consentement, c'est pourquoi je fais payer un droit d'ouverture à chaque entrée et sortie. C'est la raison d'être de mon escarcelle, dit-il en désignant son panier.

Autour de vous, vous voyez de belles propriétés, plutôt bourgeoises, totalement entourées de murs, formant un labyrinthe de plusieurs kilomètres carrés. Des chiens jappent et aboient au loin, tandis que vous vous rapprochez d'une sorte de cagibi construit sur le mur lui-même.

- Voici ma demeure, que nous allons traverser. Merci de ne pas faire attention au désordre.

Ridiculement petite, la demeure d'Arthur Même semble pourtant très confortable et effectivement très encombrée. Une pile de tracts, présentée par un panneau SERVEZ-VOUS, trône juste à la sortie. Vous en prenez un et commencez à lire.

"Dans la préface de ICI MÊME, nous apprenons que la collaboration entre les deux auteurs fut plus floue qu'un simple partage des tâches : les personnages et leurs caractéristiques viennent de Tardi, tout comme la mise en page, et très peu d'échanges furent tenus pendant la livraison de ces planches : une symbiose presque parfaite a donc mené cette oeuvre déroutante.

N'étant pas un grand spécialiste de Tardi, ni même un bon client de cet auteur, cette bande dessinée a pourtant toujours été présente dans mon inconscient et je regrette de ne pas avoir pu la posséder dans la collection originale, un grand format souple identique aux Corto Maltese de Hugo Pratt. Avec une patine et un nombre de pages identiques, elle fait partie des livres uniques en leur genre, générés par la créativité des années 70, tenant autant des fumetti que des films de Bertrand Blier ou de Claude Chabrol.

Nous faisons ainsi connaissance avec un panel de personnages hauts en couleurs : il y a Julie, jeune fille nymphomane extravertie et libérée, le gamin du Bout très attaché à ses numéros de Mickey, l'épicier qui vient régulièrement par bateau approvisionner Arthur, le Président du Conseil (l'histoire semble se passer dans les années folles), et tout un tas de familles dysfonctionnelles, méchantes comme les Monstres de Dino Risi.

Arthur chasse les papiers monnaie et ceux qui lui rendront sa propriété, avec l'aide d'avocats proches du pouvoir en place. Forest en profite pour introduire une faune politique dépravée, nous transportant soudainement à Paris, et laisse libre cours à sa plume pour produire des discours pompeux, trop protocolaires, sournois comme une législation obscure et annotée de toute part.

En discutant avec l'épicier, il développe un humour absurde, et laisse de larges parts de non-sens dans les images fantasmées par Même du haut de ses murs. Il faut dire que les onze chapitres de ICI MÊME ont été prépubliés sans filet. Les auteurs n'avaient pas de deuxième chance, ce qui existait ne pouvait être défait.

Il arrive donc que quelques longueurs et digressions rendent le tout un peu indigeste, l'histoire n'avançant pas énormément, les personnages paraissant par moments un peu coincés dans leur décor irréel. J'y vois les prémices de Marc-Antoine Mathieu et de son Julius Corentin Acquefacques, la cité étant remplacée par un très petit état souverain moyen-âgeux.
Il est sans doute préférable de lire ICI MÊME chapitre par chapitre, afin de retrouver l'univers à petites doses. le noir et blanc de Tardi n'a rien de flou ou de stylisé, il est dans la tradition de la ligne claire, mais dose parfaitement les ombres et inverse parfois les tons, les constructions ou la végétation formées en noir écrasant. Il a son trait caractéristique, plus gras déjà mais pas très éloigné de celui Adèle Blanc-Sec, et sa caractérisation des visages fait des merveilles visuelles : par moments, on y décèle des images qui pourraient directement provenir d'un épisode du Monty Python's Flying Circus."

Vous entendez une cloche tinter. C'est Arthur Même qui a terminé la visite, pendant que vous étiez perdu dans son tract.

- N'oubliez pas le guide messieurs dames ! Et n'hésitez pas à revenir ! Qui sait, la prochaine fois, je pourrai peut-être vous faire visiter toutes ces demeures…
Lien : http://www.brucetringale.com
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Un chef d'oeuvre, tant sur le dessin que sur le scénario, sur les dialogues, sur l'histoire, sur les personnages et sur leurs expressions et leurs réflexions...Entre absurdité, ironie, amour et méchanceté...À lire de toute urgence !
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Critique inutile : lu le livre il y a quelques temps, en le voyant apparaître sur babelio, je me dis que je dois le relire. Mon syndrome Jean-Claude Forest est en marche. On a ici la collaboration de deux immenses figures de la bande dessinée française. Certainement une de mes trois bandes dessinées préférées lues ces dernières années (avec Il Faut y croire pour le voir du même Forest), je ne peux que la conseiller. Je n'irai pas dans l'analyse de l'histoire tellement elle me semble un peu loin dans mon esprit ; je suis juste passé ici pour dire à l'internaute qui ne l'a pas encore lue de le faire !
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