Richard, un prisonnier de guerre déclaré mort au champ d'honneur depuis le 4 septembre 1914 par l'état-major allemand, revient chez lui, à l'improviste.
Plusieurs années ont passé.
Il trouve, Anna, sa femme, mariée à un autre.
L'autre s'appelle Karl.
Il était, avant de s'évader, un compagnon de captivité de Richard.
Par les confidences quotidiennes et indiscrètes de ce mari, Karl a connu l'existence d'Anna et s'est, d'une manière très romanesque, épris d'elle.
Lors de leur première rencontre, il n'a pas prétendu être Richard, devenu méconnaissable par ces années d'épreuve, mais il a attiré et épouvanté Anna par le détail minutieux de souvenirs qu'elle avait parfois elle-même presque oubliés.
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Karl et Anna" est une pièce de théâtre, en quatre actes, écrite par
Leonhard Frank et adaptée à la scène française par
Jean-Richard Bloch.
Elle a été représentée, pour la première fois, à Paris, le 10 avril 1929, sur la scène du théâtre de l'Avenue, par la compagnie de Gason Baty.
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Karl et Anna" est une pièce adaptée de la nouvelle qui a d'abord été tournée en film, sous le titre, "le chant du prisonnier".
Le sujet est étrange même s'il n'est pas nouveau.
Aux reproches faits, à l'époque, par certains critiques à
Gaston Baty d'avoir adapté un auteur allemand, d'avoir fait un lever de rideau sur des uniformes "feldgrau", la réponse, intelligente et sans appel, est venue de
Joseph Kessel :
"Va-t-on maintenir, à Paris, dans le domaine de l'esprit, un état de guerre que l'on semble avoir oublié à Berlin ?"
La pièce ne représente aucune idée qui puisse blesser.
Elle sait nous montrer, par une suite d'allusions brèves, les misères et les souffrances que la guerre apporte aux humbles, quels qu'ils soient, sans distinction de nationalité.
La pièce, remporta, à Paris, un grand succès.
Elle était représentée, dans le même temps, outre-Rhin, par quatre-vingt théâtres à la fois.
Ce morceau de scène est remarquable par l'atmosphère qu'il reconstitue.
Il est entaché d'un fond d'invraisemblance que font pourtant oublier la complicité inavouée et la trouble confusion de personnalité qui se nouent entre la femme et cet "inconnu" qui se présente devant elle.
Cette pièce, teintée de naturalisme, est aussi un morceau puissant de littérature qui se redécouvre, aujourd'hui, avec beaucoup de plaisir et un certain étonnement.