Le talent de conteur de
Laurent Gaudé n'est plus à prouver et quand il choisit un thème comme l'agonie d'Alexandre le Grand, le roman ne peut être que grandiose.
Le récit commence par le mélange de trois voix, celle d'Alexandre terrassé par une fièvre subite, celle d'Ericléops envoyé comme messager en Inde et celle de Dryptéis, la vaincue perse retirée du monde avec son fils.
On envoie chercher Dryptéis et la vieille Sisygambis pour connaître les chances de survie de l'agonisant puis très vite les rivalités des compagnons se déchaînent pour la succession.
"Tout se fissure dans l'Empire. Les reines meurent dans la fange, les nouveau-nés sont étouffés. On déchire les alliances et aiguise les fers."
Olympias, la mère d'Auguste lui avait demandé "À qui appartiens-tu Alexandre?" et cette question le hantait. Lors de son cortège funéraire, nombreux sont ceux qui voudront son corps : sa mère en Macédoine, Ptolémée comme enjeu politique en Basse Égypte, Dryptéis fidèle au désir d'Alexandre veut l'emmener vers l'Est ou encore sur les champs de bataille de l'Inde où plane toujours une odeur de défaite.
En mêlant systématiquement les voix, celles des vivants et des âmes, l'auteur évoque la passion de la conquête, le courage et la dévotion de certains de ses compagnons, la fidélité des vaincus comme celle de Dryptéis, le risque du pouvoir.
Toutes les scènes sont spectaculaires comme celles du défilé devant l'agonisant, le trajet du cortège funéraire avec les trente pleureuses des sept empires d'Alexandre ou la dernière chevauchée vers les armées de l'Inde.
"Le Gange...On dit que les hommes ici le vénèrent au point de vouloir mourir dans ses eaux pour flotter lentement dans l'éternité."
Les personnages sont fascinants avec la noblesse de Dryptéis, le courage d'Ericléops ou la sagesse finale d'Alexandre ou de Tarkilias.
Pendant toute la lecture, je fus emportée dans un autre siècle, un autre monde grâce à la richesse de cette histoire contée dans un style magique si particulier à l'auteur.
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