Les Bénédictins de Cluny avaient une école gratuite. Prud'hon y fut admis, grâce au curé. Grâce à lui encore, il y reçut quelques leçons de dessin. La voie s'ouvrait; il s'y jeta, poussé par une ardeur impérieuse, couvrant d'esquisses ses cahiers, modelant en terre, en bois, en savon, de petites figures, des groupes taillés au canif, qu'il regardait plus tard encore d'un œil indulgent, lui si sévère d'habitude pour ses essais. L'abbaye avait des tableaux, médiocres sans doute, mais qui révélaient la peinture à l'écolier de quatorze ans. Prud'hon fabrique des couleurs avec le suc des fleurs et des herbes, des pinceaux avec les poils recueillis aux harnais des chevaux. « Tu ne réussiras pas à copier ces tableaux, lui dit un moine ; ils sont peints à l'huile. » Sur ce mot, l'enfant cherche, essaie, tâtonne, recommence, et retrouve la peinture à l'huile, comme Pascal la géométrie.