Une très belle découverte, percutante !
Le ton est ironique, incisif, caustique, efficace.
Sans concession aucune, Gauz (nom d'auteur de Armand Patrick Gbaka-Brédé) dresse une satire de notre société de consommation à outrance, asservie par le capitalisme, observée par un homme Noir invisible, le vigile, Ossiri.
"Si elle se répétait aujourd'hui, la prise de la Bastille libérerait des milliers de prisonniers de la consommation."
Par ce procédé, il rend aussi un bel hommage à ces hommes invisibles.
"Ceux qui déjà ont une expérience du métier savent ce qui les attend les prochains jours : rester debout toute la journée dans un magasin, répéter cet ennuyeux exploit de l'ennui, tous les jours, jusqu'à être payé à la fin du mois. debout-payé."
"Une théorie lie l'altitude relative du coccyx par rapport à l'assise d'un siège et la qualité de la paie. Elle peut être énoncée comme suit : Dans un travail, plus le coccyx est éloignée de l'assise d'une chaise, moins le salaire est important.
Autrement dit, le salaire est inversement proportionnel au temps de station debout. Les fiches de salaire du vigile illustrent cette théorie."
"Ennui, sentiment d'inutilité et de gâchis, impossible créativité, agressivité surjouée, manque d'imagination, infantilisation, etc., sont les corollaires du métier de vigile. Or, militaire est une forme très exagérée de vigile."
L'auteur évoque aussi, principalement d'ailleurs, les pages sombres de l'histoire Franco-Africaine de l'immigration. André, Ferdinand, Angela, Kassoum, Ossiri racontent l'immigration, leur immigration des Trente Glorieuses à nos jours, l'installation et la vie au MECI, Maison des Étudiants de Côte d'Ivoire qui se dégrade très vite et devient insalubre. un "cloaque vétuste, insalubre, miteux et surpeuplé en plein coeur de la capitale de la Gaule", et puis, le sort des immigrés face à la décision du gouvernement Giscard d'instaurer une "carte de séjour" "contre" les étrangers.
"Les élections qui suivirent la mort de Pompidou exhalèrent des relents aussi piquants et rances. A la course à la présidentielle se présentèrent dix hommes chauves, un borgne et une femme qui n'aurait pas été plus laide si elle avait été chauve et borgne. Ils avaient tous, bien évidemment, la solution pour sortir de "La Crise". le grand slogan du moment : "On n'a pas de pétrole, mais on a des idées."
Une de ces idées-là était que les étrangers étaient de venues trop nombreux en France. Dans "La Crise", ils arrachaient désormais leur travail aux vrais français et leur piquaient le bain de la douche ou le pain de la bouche. C'en était devenu intolérable, surtout de la part de gens qu'n avait gentiment invités pour partager le gros gâteau des Trente Glorieuses et du plein emploi. Intolérable."
Concision, maîtrise de la langue, instruction, lucidité et humour ! Un cocktail détonant !
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