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Critiques filtrées sur 2 étoiles  
Sylvie Germain et moi aurions dû nous entendre. La trame de ses histoires m'interpelle toujours. le problème ne se situe donc pas dans le fond mais dans la forme. L'écriture de Sylvie Germain évolue au gré d'un rythme qui n'est pas le mien : lorsque je me serais élancée, elle se réduit dans une écriture saccadée, alors qu'elle s'étale au contraire dans les descriptions ou les énumérations de détails parasites lorsque l'instant se présente à moi de manière plus ponctuelle et anecdotique.


Autre chose : Sylvie Germain traite les sentiments d'une manière qui me dérange. Si le talent d'un écrivain se mesure en rapport avec l'extrémité des hérissements –de plaisir, de dégoût ou de colère- qu'il suscite chez son lecteur, alors Sylvie Germain est talentueuse. Dans L'enfant méduse, Sylvie Germain ressasse la misère et ne la dépasse jamais, moins par faiblesse que par fascination morbide. Elle n'est sans doute pas d'accord avec Saint Augustin (« On peut comprendre une douleur mais on ne doit en aimer aucune »). J'accorde qu'on ne pourrait pas traiter la thématique de son livre avec légèreté sans risque de passer soi-même pour quelqu'un de sordide. Mais le problème, c'est qu'il n'y a que cela : la misère, la crasse, sans espoir, comme si la situation ne pouvait jamais n'être qu'inexorable. Michel Houellebecq ne fait pas mieux dans ses Particules élémentaires mais là encore, ce n'est pas comparable car Houellebecq fait preuve d'un cynisme et d'un humour noir qui soulagent alors que Sylvie Germain ne sourit pas une fois et ne semble même pas le vouloir.

C'est normal ? C'est la définition même de la vie ? le renier serait faire preuve de naïveté ? Pas forcément : c'est le point de vue de Sylvie Germain sur la vie, et il me semble réducteur et finalement agaçant. Est-ce une manière d'attirer caresses et réconforts ? Prenons un exemple :


« Aloïse fut opérée. On l'amputa d'un sein. le cancer récidiva. On pratiqua l'ablation du second sein. Cette mutilation réitérée du corps de sa mère se répercuta en Lucie ; celle-ci fut, à mesure du déclin d'Aloïse, amputée de tous ses ressentiments restés coriaces à l'égard de sa mère. La pitié creusait, creusait toujours plus profond en Lucie […]. »


Je ne peux plus lire des textes comme ceux-ci où le pathétique renvoie l'être humain à ce qu'il a de plus désespéré en lui. Pas que je ne le supporte pas, mais je ne le comprends pas. C'est comme ces gâteaux de semoule au lait mous, gluant et flageolants, qui semblent n'attendre qu'une chose : qu'on abatte le poing sur eux pour mettre fin à leur agonie (cette image renverra en revanche à un très bon passage de L'enfant méduse car il y a aussi des morceaux fantasques qui ne prennent pas le pose dans ce livre).


Enfin, je veux signaler que mon avis sur ce livre n'engage évidement que moi : Sylvie Germain est une auteure à l'écriture très poétique, imagée et originale. Je regrette de ne pas réussir à communiquer avec elle mais pour ceux que son écriture ne rebute pas, elle est sans doute une auteure de grand talent.
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L'ENFANT-MEDUSESylvie Germain – Éditions Gallimard.

Lucie D'aubigné est une enfant au sens plein du terme. Elle peuple sa vie d'images et de sons qu'elle est seule à comprendre et les mots des adultes résonnent dans sa vie comme autant de mystères qu'elle repeint aux couleurs de son imagination. C'est son univers à elle et elle s'y sent bien. Elle ressemble à son ami les yeux toujours perdus dans les étoiles.

Pourtant l'horreur lui a donné rendez-vous sous les traits trompeurs de la beauté et de la tranquillité apaisante de la famille. Depuis ce jour elle connaît la peur, perd ses contrepoids et les délices de ce monde coutumier pour entrer de plain pied dans la flétrissure et le silence forcé, dans ce monde des adultes qu'elle ne connaissait pas et pour lequel elle n'était pas préparée. Elle devient la proie de son frère qui du même coup la précipite hors du microcosme merveilleux de l'enfance, lui confisque la joie en même temps que innocence. Son fardeau est lourd à porter d'autant plus que d'autres petites filles ont subi les outrages de ce frère ... et en sont mortes ! L'incompréhension des adultes qui l'entourent lui interdit toute dénonciation et, de fait, le criminel ne sera jamais démasqué. Dès lors sa vie devint un cauchemar qui bascule petit à petit dans la folie et la solitude, à rebrousse-enfance, sans qu'on sache vraiment où s'arrête la peur et où commence la complicité.

L'univers des adultes lui est ainsi révélé, le silence et l'attitude de son père, l'amour de sa mère pour son premier mari tué au combat et qu'elle reporte sur son fils, cette mère abusive qui ne vit que par et pour lui... Alors elle réagit en s'enlaidissant, en faisant d'elle un squelette vivant à force de jeûnes. de sa maigreur il ne reste que ses yeux et de ce regard chargé d'étranges pouvoirs qu'elle puise dans les eaux glauques des marais berrichons et dont elle va se servir. Car c'est elle qui a tué un matin, par le seul pouvoir de ses yeux de gorgone, c'est du moins ce qu'elle croit. Depuis qu'on l'a trouvé allongé dans le jardin, son frère-bourreau mène une vie végétative, comme frappé par une malédiction, un peu comme si son père mort sans sépulture venait reprendre la vie qu'il avait donnée.

Après sa mort, Lucie fuit cette maison, court le monde et après bien des amours sans suite revient dans son bourg natal, habite à nouveau cette maison, seule ! Elle finira par pardonner à sa mère et à lui fermer les yeux mais chassera pour toujours de sa mémoire l'image de son frère. Pour cela peut-être elle traînera avec elle ce mal de vivre que des amours tumultueuses et que son retour dans cette contrée n'ont pas permis d'exorciser. C'est donc un roman sur la solitude que chacun combat comme il peut.

Avec une évocation de la lumière, comme un témoin muet et impuissant, presque indifférent, l'auteur a les mots du poète pour évoquer le drame de l'enfance. La connotation entre l'art pictural et l'écriture est constante. Pour l'enfance merveilleuse l'enluminure, puis le tableau s'obscurcit avec la sanguine, le sépia et le fusain pour se terminer par une fresque apaisante mais la solitude et le mal de vivre restent le leitmotiv de ce roman.

© Hervé GAUTIER.
Lien : http://hervegautier.e-monsit..
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Née à Châteauroux en ?

1934
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