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Citations sur Magnus (133)

Il passe la plupart de son temps à contempler ce qui l'entoure. On le dit rêveur, inactif. Mais non, c'est un travail très sérieux auquel il se livre en scrutant longuement le paysage, le ciel, les objets, les bêtes et les gens, il s'applique à tout graver dans sa mémoire. Elle a été aussi poudreuse et volatile que du sable, il s'efforce à présent de lui donner une solidité minérale.
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Chacun porte son poids de temps dans la discrétion ; rien n'est renié ni effacé, mais ils savent qu'il est vain de vouloir tout raconter, qu'on ne peut pas partager avec un autre, aussi intime soit-il, ce que l'on a vécu sans lui, hors de lui, qu'il s'agisse d'un amour ou d'une haine. Ce qu'ils partagent, c'est le présent, et leurs passés respectifs se décantent en silence à l'ombre radieuse de ce présent.
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Il y a des livres écrits de telle sorte que, parfois, ils font sur certains lecteurs un effet semblable à celui de ces gros coquillages que l'on presse contre son oreille, et soudain on entend la rumeur de son sang mugir en sourdine dans la conque. Le bruit de l'océan, le bruit du vent, le bruit de notre propre coeur. Un bruissement de limbes. Adam a lu ce livre, qui à d'autres ne raconte qu'une histoire étrange, confuse, dont ils ne franchissent pas le seuil, et le livre se sera posé contre son oreille ; un livre en creux, en douve, en abîme, où une nuée d'échos se sera mise à chuchoter.
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Terence sort enfin de la chambre, il ne dit pas un mot, son visage n'exprime rien de précis. Il s'approche lentement de Magnus et prend son visage entre ses mains comme il l'a fait avec celui de May. Magnus ferme les yeux, il laisse May lui annoncer sa mort par ce contact, lui dire adieu dans un frolement. Il sent dans les paumes de son messager la chaleur qui s'en est allée d'elle, il reconnait dans ce toucher le grain de peau de May. Les mains de Terence sont impregnées du souffle et du sourire de May. Il porte alors les mains du messager contre ses oreilles, et lá, il percoit le bruit du coeur de son amante tel qu'il l'entendait battre apres l'amour, quand il s'endormait tete appuyée contre sa poitrine ou son ventre.
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Pour tout livre, il emmène celui qui s'est ouvert en lui dans un souffle de hautbois, et qui n'en finit plus de bruire dans son esprit, dans sa poitrine , dans sa bouche. Les pages du livre frémissent entre ses mains, s'effeuillent sous ses pieds.
S'en aller, chante tout bas le livre des merveilles et de l'insoupçonné, s'en aller...
S'en aller.
p274/275
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Voilà donc à quoi se réduit une vie, un corps qui fut si ardemment en marche, bruissant de paroles, de rires et de cris, mû par d’innombrables projets, d’insatiables désirs : une poignée de cendres blêmes solubles dans le vent.
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Avant, éperdumment avant.

Avant, au vif de l'instant présent.


Il entend le mugissement d'un orgue colossal, d'assourdissants coups de cymbales, le vrombissement de millions de tambours. Un orchestre fou joue dans le ciel, il joue avec des instruments d'acier, de feu. Son tumulte s'engouffre jusque dessous la terre, qui tremble et hurle.
C'est un chœur discordant d'hommes et de femmes de tous âges, d'enfants, de nourrissons, de chiens, qui hurlent en répons au fracas de l'orchestre, et ce chœur qui se tenait blotti, compact sous la terre, se disperse subitement dans une bousculade éperdue. Sa clameur se répand au-dehors, elle court au ras de la terre, se déchire. Il est un des lambeaux de cette clameur pulvérisée, il court en criant et pleurant.

Il voit le ciel se déflagrer, se rompre comme une digue et des torrents de lave noire, de météorites rutilants, d’éclairs blanc soufré jaillir d’entre les brèches. L’orchestre fou joue du feu à outrance.
Il voit des humains et des bêtes se transmuer en torches vives, d’autres se fondre à l’asphalte liquéfié qui clapote dans les rues éventrées, d’autres encore être déchiquetés.
Il voit des arbres s’élancer à l’oblique, énormes javelots échevelés de flammes qui se fichent dans les façades des maisons tandis que giclent les vitres, volent les cheminées, les tuiles, les poutres.

Il voit l’eau s’embraser, dans le port, les canaux, les rivières, les bassins, les caniveaux. Partout l’eau prend feu et s’évapore en chuintant ; elle s’enflamme jusque dans les larmes sur les visages des égarés, des mourants.
Il sent l’âcre pestilence des chairs brûlées, la fadeur nauséeuse des chairs bouillies, la puanteur du sang et des viscères. Les pierres, les pavés, les charpentes ne sont plus que sable noir, gravier, bouts de charbon.

Il voit des torsades d’un jaune cru, des coulées vermeilles, des éclaboussures d’un orange aveuglant tomber du ciel, lacérer la nuit. Une orgie de couleurs à la fois visqueuses et limpides. De gigantesques crachats d’or et d’écarlate pour couronner la ville défunte.
Il entend tonner les crachats de couleurs, et soudain, parmi les pantins disloqués qui courent en tous sens, il voit une femme se couvrir de flammèches safran des cheveux jusqu'aux pieds, danser une valse solitaire, frénétique, en poussant des cris suraigus. Il la voit s'écrouler, se tordre encore quelques secondes et...

Et - plus rien.
Il ne sait plus, ne voit ni n'entend plus rien, plus rien que cette femme-flambeau qui se réduit à un tas informe d'un noir rougeoyant qui fume et qui pue. Sa mère ? Une fée, une sorcière, un tronc d'arbre, un ange foudroyé ? Une inconnue ?
Il la regarde, la regarde se consumer, se calciner. Il la regarde, yeux grands ouverts, s'effacer de sa vue, s'effacer de sa vie. Yeux grands ouverts, grands aveugles, il la regarde, la regarde...
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Elle dit, la femme qui se tient raide, mains enfouies dans les poches de son imperméable : « Je m'ennuie avec toi, je m'ennuie à mourir. Je ne t'aime pas. Je ne t'ai jamais aimé et jamais je ne t'aimerai. Je n'aime rien de toi, ni ta voix, ni ton corps, ni ta peau ni ton odeur. Tout en toi me dégoûte et m'insupporte. Je voudrais ne t'avoir jamais connu. Jamais. »
L'homme ne dit rien, il est abruti par ces mots qui ne demandent pas de réponse, qui frappent de nullité toute autre parole. Il recule de quelques pas devant cette lapidation verbale.
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Il voit des torsades d’un jaune cru, des coulées vermeilles, des éclaboussures d’un orange aveuglant tomber du ciel, lacérer la nuit. Une orgie de couleurs à la fois visqueuses et limpides. De gigantesques crachats d’or et d’écarlate pour couronner la ville défunte.

Il entend tonner les crachats de couleurs, et soudain, parmi les pantins disloqués qui courent en tous sens, il voit une femme se couvrir de flammèches safran des cheveux jusqu’aux pieds, danser une valse solitaire, frénétique, en poussant des cris suraigus. Il la voit s’écrouler, se tordre encore quelques secondes et...

Et – plus rien.

Il ne sait plus, ne voit ni n’entend plus rien, plus rien que cette femme-flambeau qui se réduit à un tas informe, d’un noir rougeoyant qui fume et qui pue. Sa mère ? Une fée, une sorcière, un tronc d’arbre, un ange foudroyé ? Une inconnue ?

Il la regarde, la regarde se consumer, se calciner. Il la regarde, yeux grands ouverts, s’effacer de sa vue, s’effacer de sa vie. Yeux grands ouverts, grands aveugles, il la regarde, la regarde...
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Elle est plus séduite encore par ce jeune homme qu'elle voit se débattre avec ses démons dans un lit, les cheveux trempés de sueur, et respirant au bord du râle, comme dans l'amour. Et elle désire prendre la place des démons de la fièvre, se coucher avec lui dans un lit, sentir son odeur sur sa peau et tout le poids de son corps sur le sien, l'entendre perdre souffle dans son cou.
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