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252 pages
Albin Michel (10/09/1921)
4/5   1 notes
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
José Germain fait partie de ces nombreux écrivains dont l'oeuvre de jeunesse a été éclipsée par les choix idéologiques malheureux effectués durant l'Occupation - et d'autant plus malheureux que jusqu'à sa mort en 1964, José Germain ne démordit pas de ce choix et d'une adulation réelle pour le Maréchal Pétain. Pourtant, sur bien des points, cet homme déconcertant, au visage poupin et assez souvent souriant, se tenait bien loin des positions nationalistes ou patriotes. Officier d'infanterie durant la Première Guerre Mondiale, il mena une carrière militaire brillante durant ces quatre années, tout en trouvant le temps d'écrire et de faire publier des petites pièces et scénettes à destination des familles. L'après-guerre l'amène à signer des ouvrages assez critiques, toute victoire mise à part, sur la manière dont la guerre s'est déroulée.
Enfin en 1921, José Germain se lance dans le roman avec « Rosa Berghem », co-écrit avec un autre auteur, Émile Guérinon, qui co-signera pendant dix ans pratiquement tous les romans de José Germain, sans jamais pour autant que son rôle soit clairement établi. On ne connait même pas ses dates de naissance et de mort, et il ne publia quasiment rien en dehors de ses collaborations avec José Germain. Il fut probablement davantage un correcteur et un relecteur qu'un co-auteur.
« Rosa Berghem » est un très inattendu roman d'amour dans le contexte difficile de la Première Guerre Mondiale. Présentée comme l'histoire vraie d'un soldat, rebaptisé ici Charles Doullens, ce dernier est présenté dans une préface épistolaire comme un ami commun que les deux auteurs ont réellement connus, et dont ils sont sans nouvelles depuis la fin de la guerre. Celui-ci leur aurait laissé son carnet de notes, et c'est à partir de ce carnet et des confessions de cet ami, lors de la dernière fois qu'ils l'ont vu, qu'un roman a été tiré de ses souvenirs. Il ne faut sans doute pas prendre au sérieux toute cette mise en scène, car « Rosa Berghem » est un roman plutôt fleur bleue, ce qui justement ne rend guère très réaliste.
Charles Doullens est donc un soldat français, un conscrit qui fait son devoir, mais qui songe surtout à sauver sa vie, et à témoigner de ce qu'il a vu. Ainsi, partout avec lui, il emmène un carnet et un crayon, et tient une sorte de journal qui constitue la majeure partie du récit.
Le hasard le met un jour en présence du cadavre détroussé d'un soldat allemand. Son portefeuille a été vidé, mais il reste à l'intérieur la photographie d'une jeune femme, plutôt jolie, qu'il glisse instinctivement dans son propre portefeuille.
Quelques mois plus tard, il est fait prisonnier avec son escouade par des soldats allemands, qui les envoient dans un camp de travail en Allemagne, un camp relativement paisible où les prisonniers ne sont pas maltraités. On y travaille sans s'épuiser, mais les soldats français s'y ennuient tout de même. Charles a alors l'idée de rédiger un petit journal hebdomadaire humoristique pour détendre les prisonniers. Il demande et obtient l'autorisation du directeur du camp de travail pour faire imprimer sa feuille de chou chez un imprimeur situé à quelques centaines de mètres, et qui s'occupe déjà d'imprimer les papiers administratifs du camp.
Charles Doullens sympathise avec l'imprimeur, Berghem, et avec sa fille Rosa, tous deux parfaitement bilingues, ayant un temps vécu à Strasbourg (ville appartenant à l'Allemagne depuis 1870 mais où la langue française était encore majoritairement parlée). le visage de Rosa semble familier à Charles, mais il ne saurait dire où il a bien pu la rencontrer. Elle, en tout cas, ne semble pas le connaître.
Un jour, le portefeuille de Charles glisse de sa poche et tombe au sol. Après son départ, Rosa le trouve, le ramasse, l'inspecte, et tombe sur la photo ramassée sur la dépouille du soldat allemand. Or, cette photo, c'est en fait la sienne. Elle l'avait donnée à son fiancé avant qu'il ne parte au front. le fait que Charles l'ait en sa possession prouve, aux yeux de Rosa, que son fiancé est mort, tué par Charles.
Avec l'aide du directeur du camp, elle convoque Charles, qui explique avoir trouvé cette photo sur un cadavre et ne pas avoir l'assassiné l'homme lui-même. Il donne son carnet à Rosa, car il y a consigné l'évènement, mais celle-ci, sous l'impulsion de la colère et du chagrin, livre au directeur du camp de travail un rapport conseillant d'envoyer Charles dans un autre camp plus dur, réservé aux prisonniers dangereux, et où on se livre aux travaux forcés du matin au soir. Puis, prise de remords, le soir même, elle se met à lire le carnet de Charles, et elle y découvre non seulement qu'il a dit la vérité, et que son fiancé était bien mort quand Charles a trouvé la photo, mais que Charles lui-même est un conteur agréable, qui lui présente l'autre point de vue, insoupçonné, de la guerre, celui d'un ennemi stoïque, pacifiste, chagriné de la violence des hommes, et qui n'a jamais une seule pensée haineuse pour les Allemands. Rosa réalise alors qu'elle a commis une terrible erreur, mais hélas, il n'est plus possible de revenir en arrière, Doullens est déjà en transit pour le camp de travaux forcés.
Alors Rosa décide de s'installer dans les parages de ce camp et, au prix d'une longue et dangereuse stratégie, d'en faire évader Charles Doullens. Au cours de cette spectaculaire évasion, et de la longue planque que les deux jeunes gens doivent partager, une romance, puis une intense passion amoureuse va naître et se consumer entre eux. Mais quel avenir envisager, alors que leurs deux pays sont en guerre, et que chacun sera jugé comme traître ou renégat(e), tant dans son pays que dans le pays de l'autre ?...
Romance désespérée et lumineuse, « Rosa Berghem » est un touchant roman sentimental, qui se veut aussi une condamnation sans appel de la guerre et de la haine patriote. Une posture surprenante, au lendemain d'une guerre fratricide mais victorieuse, qui permit à la France de récupérer l'Alsace et la Lorraine, confisquées depuis plus de 40 ans. Malgré les innombrables pertes et l'horreur des tranchées, on avait encore en 1921 une image relativement positive de cette guerre qui s'était achevée en victroire. le message très pacifiste et même ouvertement germanophile de ce roman est donc très inattendu. Néanmoins, José Germain s'y montre pessimiste : loin de régler les comptes, ce conflit accentue durablement la rancoeur et la haine entre Français et Allemands, au point de gâcher la romance pure et passionnée de Charles et Rosa, qui ne peuvent s'aimer nulle part sans se terrer loin des regards, avec la certitude d'être tôt ou tard capturés.
L'Histoire a par ailleurs donné raison à ce petit roman, pourtant sans prétention, et qui en acquiert rétrospectivement un certain côté visionnaire. Sur le même sujet, néanmoins, Pierre Benoît fera plus tard, avec « Axelle » (1928), un roman plus réaliste, plus subtil, mais qui défendra pareillement le sacrifice nécessaire et néanmoins inacceptable d'une passion amoureuse qui prétendait s'affranchir de la folie des hommes. Bien des romans, tant de ce côté du Rhin que de l'autre, en ont appelé au pardon et à l'oubli, mais malgré leurs succès de librairie, ont été impuissants à contrecarrer les discours délétères d'un petit moustachu bien décidé à réclamer et à obtenir une revanche éclatante.
Hélas, tout comme Pierre Benoît et Victor Margueritte, tous deux également pacifistes et militants pour l'harmonie entre les peuples, José Germain se compromettra avec le régime de Vichy, qu'il aura le tort de regarder lui aussi comme une bienfaisante alternative à la guerre, sans regarder de trop près à l'émulation idéologique sinistre qui animait le Maréchal.
Pourtant, ce « Rosa Berghem », qui fait l'élégie des amours internationales et du refus de la haine, n'était assurément pas l'oeuvre d'un futur sympathisant nazi, et si l'on peut déplorer que la mauvaise foi ou un orgueil trop prononcé ait poussé José Germain à une fermeté opiniâtre et stupide dans un engagement politique qui l'était tout autant, sa bibliographie, abondante et variée, et majoritairement antérieure à l'Occupation, mériterait d'être redécouverte et reconsidérée, comme un témoignage fort instructif d'une pensée assez ouvertement progressiste au sein des Années Folles.
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