Sabyl Ghoussoub est né à Paris à la fin des années 1980 de parents libanais venus s'installer en France en 1975 peu de temps après leur mariage. Ils avaient prévu de rester à Paris deux ans, le temps pour son père de passer un doctorat de théâtre et de langue arabe à la Sorbonne, puis de rentrer à Beyrouth.
La guerre qui allait démarrer quelques semaines plus tard a changé à tout jamais leurs projets.
L'auteur a toujours eu le sentiment que leur vie familiale, leur vie quotidienne, la vie professionnelle de son père (traducteur, journaliste et poète) tournaient autour du Liban.
Ses parents étant maintenant âgés, il a décidé de les enregistrer afin de recueillir leur témoignage : » Mon père n'arrête pas de jouer avec son micro. L'idée d'être enregistré lui déplaît, mais pour son fils, il est prêt à faire un effort. Ma mère est dans la cuisine et me prépare un petit-déjeuner. A chaque fois que je lui rends visite, elle me sert à manger, elle pense ainsi me retenir plus longtemps dans son appartement. »
On découvre avec lui le destin des membres de sa famille chrétienne pendant la guerre, les difficultés de la vie quotidienne des Libanais, les valeurs familiales qui se retrouvent même au sein de la Diaspora installée en France.
Chaque chapitre a un titre particulier et est daté dans le temps mais il n'y a pas de réelle chronologie. Ce qui donne un peu parfois un sentiment de bazar. C'est un peu déroutant mais, en y réfléchissant bien, c'est quelque part le reflet de ce qui se passe encore aujourd'hui dans ce pays.
Il m'a fallu une centaine de pages pour réellement m'intéresser à ce que
Sabyl Ghoussoub nous raconte. Ce qui m'a finalement accrochée, ce n'est pas de comprendre ce pays complexe et son histoire, mais le témoignage d'un exil forcé avec ses douleurs, ses adaptations au pays d'accueil, l'espoir de retourner un jour vivre dans son pays, puis, la vieillesse venant l'acceptation du renoncement à cette idée.
» Je n'arrivais pas à croire que mon père qui a grandi au Liban se retrouvait soixante ans plus tard dans cette cave parisienne, située au troisième sous-sol d'une tour, à chercher dans ses cartons, entre ses poèmes et ses articles de jeunesse, ses fiches de paye pour finir son existence dans ce pays qui n'était pas le sien. Je trouvais cette vie injuste. Injuste qu'elle l'ait arraché à son pays, mais aussi qu'il ne soit pas dans toutes les bibliothèques, qu'il ne soit pas devenu un metteur en scène et un poète incontournable. Que la guerre lui ait volé ses rêves d'enfance. Mais aurait-il été le père qu'il a été avec moi s'il avait fait « carrière ». «
Je remercie les Editions Stock et Cultura de m'avoir permis de découvrir ce roman de la Rentrée Littéraire 2022.