Pour cette 3ème lecture d'un roman de
Robert Goddard, je me heurte aux mêmes difficultés que lors des deux précédentes : je ressens une légère distorsion entre l'écriture de cet auteur réputé et ma lecture comme lorsque dans un film en VO les sous-titres ont une demie seconde de décalage avec les répliques des personnages dans leur langue originelle ; bien que l'action se situe dans les années 90, j'ai l'impression de lire un roman qui se déroule à l'époque victorienne ; enfin, Robin Timariot m'a exaspérée comme avant lui d'autres personnages masculins de Goddard.
Eurocrate à Bruxelles, il ramène sa fonction à peu de choses : elle présente d'indubitables avantages, parmi lesquels une sécurité absolue et une relative prospérité, suivis d'une retraite anticipée et d'une pension indexée sur le coût de la vie. Il ne parle pas de ses missions, se contentant d'espérer que le traité de Maastricht créera des postes juteux. Robin prend une dispo pour aller redresser l'entreprise familiale après la mort prématurée de son frère Hugh qui la dirigeait.
Il vit seul, ours dans sa tanière, d'où il rejette toute intrusion féminine parce que la solitude le dispense de toute responsabilité, de tout tracas. Il évite toute intimité amicale et surtout sexuelle avec un autre humain. Malgré cette profession de foi dédiée à la solitude librement consentie et recherchée, inexplicablement, lors d'une randonnée, il déclenche une fixette instantanée sur une femme, lady Praxton aperçue durant quelques minutes. Malheureusement pour elle, quelques heures plus tard, elle finit violée et assassinée, en compagnie d'un peintre médiocre. Comme par hasard, la seule femme qui le fait vibrer, meurt, c'est pas cool.
Je déplore qu'entre
Robert Goddard et moi, rien ne se passe, sans doute pour des motifs qui me sont imputables puisqu'il est unanimement acclamé pour son talent. Je n'ai pas réussi à me passionner pour les errances cérébrales de cet homme égocentrique, toujours en retrait des événements, qui ne fait que les subir ou les observer. Rien de ce qui lui arrive n'est de sa faute. Je n'ai pas réussi à me sentir proche de Lady Praxton qui se passionnait avant de périr, pour la peinture expressionniste, ni davantage pour sa famille. Je n'ai sans doute pas compris pourquoi Robin, des années durant, est animé du désir de posséder le secret que Louise Praxton a emporté dans sa tombe. Alors qu'il n'a jamais daigné se rapprocher d'un vivant, il se passionne pour une morte entrevue quelques instants. Ce comportement étrange est obscur et même incompréhensible pour moi. Sinon, il y a de belles descriptions de la campagne anglaise.