Citations sur Les services compétents (38)
Où est l'autre ? Où est « STALINE » ?... On s'est habitué depuis 1953, à les savoir tous les deux au mausolée, couchés ensemble pour l'éternité. Lénine, Staline. Staline, Lénine. L'un ne va pas sans l'autre.
On fait descendre Grichkine dans le tombeau. Un escalier latéral mène au laboratoire de chimie. Là, sur une table de travail, sous un éclairage puissant, il voit un sarcophage ouvert. C'est Staline. Il y dort paisiblement, nullement incommodé par toute cette lumière, embaumé par les meilleurs spécialistes au monde, ceux qui ont fait Lénine. Un procédé unique. Une alchimie ! Le teint respire. La moustache est en pleine forme. Il y a comme une tension dans le visage.
Dites, et s'il ne dort pas ?... Et s'il nous observe en douce ?
C'est absurde, mais on dirait que ses paupières ne se joignent pas entièrement. Il ferait semblant d'avoir les yeux fermés, comme quand on triche à colin-maillard, tout en épiant son monde... Mieux vaut ne pas regarder... Pas vu, pas pris...
La guerre psychologique se gagneen mettant plein cap sur la modestie dans les vêtements, l'abstinence dans les gadgets, et, dans le même temps, en dérouillant les contestataires.
Les opérationnels chevronnés le savent bien, mercredi est le meilleur jour pour cueillir un suspect important. Les vendredis, les jeudis sont à proscrire - le week-end est trop proche. Avec son lot de bureaux fermés, de congés posés, d'esprit vagabond, qu'on le veuille ou non, le rythme de l'interrogatoire baisse. Il n'y a plus la même pression. On donne l'occasion au suspect de reprendre son souffle, alors même que le choc de son arrestation l'a rendu vulnérable. Le bonhomme risque alors de s'entêter, et la garde à vue peut s'enliser, faisant perdre du temps à tout le monde.
Le touriste occidental est un grand magasin à lui tout seul. S’il le voulait, en quelques minutes, il pourrait vendre tout ce qu’il a sur le dos, littéralement, et rentrer à poil dans son pays.
Je compte sur toi. Excuse-moi d’être vulgaire, mais ne laisse pas ta bite te calibrer, toi, un combattant pour la cause du prolétariat. De mon côté, je vais demander à un étudiant dévoué de calmer la petite stagiaire, au niveau
du feu aux fesses. Comment tu dis qu’elle s’appelle ?
Parfois, en regardant un schéma où les noms des citoyens potentiellement coupables sont entourés de rouge, le lieutenant Ivanov se sent l'âme d'un éleveur de chèvres. Il sélectionne les bonnes bêtes, élimine les gâtées, veille à la sécurité de son cheptel. C'est un devoir, une responsabilité.
Liouba vient de fêter ses vingt ans, elle est née à Oufa en 1942, autant dire sur une autre planète, en pleine misère des arrière où s’entassent les évacués, à mille cinq cents bornes de Moscou. Là-bas, sa maman a servi de traductrice d’appoint à un éminent français, qu’elle devait surveiller par la même occasion ‑Monsieur Maurice, on l’appelait. Maurice Thorez. Déserteur de l’armée française, déchu de sa nationalité, le dirigeant du PCF n’en restait pas moins homme. Dans ce trou à rat qu’était Oufa, où l’on mangeait des corneilles et sucer les racines, il bénéficia de rations augmentées réservées à l’élite du NKVD, ce qui le rendait encore plus charmant.
D’où l’inclination de la sergente Liouba pour la langue de Balzac, qu’elle a apprise par contumace, son géniteur devant retourner au pays libéré sitôt les Allemands expulsés et le danger passé.
Si l’enseignement soviétique peut être fier d’une chose, c’est bien des techniques de filature, transmises avec passion par des as de la pédagogie.
Au lieu de changer ses devises, il prend avec lui quelques disques de Gilbert Bécaud qui livrent discrètement à des inconnu sur le quai Sainte-Sophie.
Pas besoin de rendez-vous. Il met sa main en conque autour de l’oreille, se cambre un peu, sursaute… Il est aussitôt abordé. Les affamés de Bécaud sentent l’odeur de leur plat préféré.
-Je ne comprends pas, se lamente Svetlana. d’habitude les français sont parmi les plus obéissants. Les anglais eux , se croient tout permis. Ceux-là, il faut les avoir à l’œil ! Mais les français ! …Aragon ! Éluard !
Faut croire que l’influence d’Aragon et d’Éluard ne fait pas le poids face aux perversions du système capitaliste. Et encore, Bécaud ce n’est pas ce qu’il y a de pire. Il y a le jazz, qui n’est que bruit. Et il y a cette perversion nouvelles, directement sortie de cerveau de babouin et qu’on aurait branché sur une prise électrique à 127 volts, ce qu’on appelle le rock’n roll.
On peut même pas danser correctement.
Comment être sûrs qu’un texte et anti-soviétique, à moins de le lire ?
On ne peut pas être partout, tout écouter, tout déchiffrer. d’autant que certains écrivent littéraire, avec des phrases interminables. C’est inhumain.