Pour sa première exposition individuelle, à la Hart House de l’Université de Toronto, le 16 octobre 1954, l’artiste présente surtout des oeuvres abstraites, mais il apprécie toujours le figuratif. Ainsi, en 1956, il intègre un motif solaire dans une peinture murale commandée par la Compagnie Pétrolière Impériale, et il achève une grande toile intitulée Le guerrier, en 1956. Des contrastes frappants confèrent une grande puissance à Sans titre, une peinture abstraite à la fois joyeusement exubérante et sinistrement menaçante. Hélas, ces oeuvres seront parmi les dernières. En 1956, un jour de fin d’automne, alors qu’il est au volant de sa nouvelle Studebaker Hawk, il fait une collision fatale avec un camion-benne. Il avait 40 ans.
En novembre 1943, Gravenor met ses relations à profit pour que Cahén participe à une prestigieuse exposition de l’Art Association of Montréal (aujourd’hui le Musée des beaux-arts de Montréal). Pour un artiste de la métropole, c’est le meilleur moyen de se faire connaître. Un critique écrit que Cahén « touche à de nombreux sujets, de nombreux styles et de nombreuses méthodes […]. Il y a de bons dessins […], d’habiles caricatures et des croquis suggestifs et bien faits de têtes et de personnages. Plus tôt cette même année, le jeune homme est entré à la succursale montréalaise de Rapid, Grip and Batten, où un salaire hebdomadaire de 90 $ en fait l’artiste le mieux payé de la firme».
Oscar Cahén (1916-1956) fuit l’Allemagne nazie à l’âge de 24 ans pour se rendre avec sa famille en Angleterre, où il sera soupçonné d’être un espion allemand et placé dans un camp de détention. Par la suite, il émigrera au Canada dans un bateau prison en compagnie de plus de 2000 hommes, juifs allemands pour la plupart, officiellement considérés comme prisonniers de guerre et étrangers ennemis. Surmontant l’adversité, il deviendra très populaire dans son pays d’adoption, s’établissant comme un des plus importants dessinateurs publicitaires et peintres abstraits du Canada.
Oscar Cahén passe lestement d’une technique, d’un style et d’un sujet à un autre comme s’il y avait en lui vingt artistes différents. Par conséquent, choisir quelques pièces phares, c’est forcément omettre beaucoup d’autres facettes pertinentes de son oeuvre. Il est tout de même possible de raconter son parcours créatif à l’aide de toiles et de dessins représentatifs des grands thèmes et des problèmes esthétiques formels qui lui tiennent à coeur et qui sont d’importants jalons de son cheminement vers la notoriété.