La tradition veut que Van Dyck ait quelquefois pris plaisir à collaborer avec ses amis. La galerie de Brignole Sala, aujourd'hui propriété de la ville de Gênes, grâce a la libéralité de la duchesse de Galliera, possède un petit tableau de bataille dont les figures sont attribuées à Van Dyck et le paysage à Corneille de Wael. Tous les guides répètent l’anecdote. Il ne faut pas oublier toutefois que Jean de Wael peignit souvent des batailles. « Conflictuum representator », ainsi le désigne la légende placée sous son portrait gravé. Plus d'une fois il travailla aux mêmes toiles que son frère. Il est donc fort probable que le combat attribué il Van Dyck lui appartient.
Ces goûts, si rares chez les hommes de sa condition, lui furent plus d’une fois reprochés. La bienveillance qu’il témoignait aux artistes excita les jalousies, souleva les murmures des gentilshommes ignorants et entichés de leur naissance. On blâmait sa hauteur, une certaine excentricité voulue. Que le noble protecteur des arts ait joint à ses rares qualités quelques défauts de caractère, peu nous importe. De semblables vétilles ne sauraient entrer en balance avec le rôle glorieux que le comte d’Arundel a joué de son temps.
A la même époque appartient encore un tableau célèbre, l’Arrestation du Christ au Jardin des Oliviers, désigné dans le catalogue du musée de Madrid sous le titre de il Prendimiento. C’est la toile que Van Dyck offrait à Rubens avant de quitter sa ville natale, en témoignage de gratitude, comme nous l’avons dit plus haut.
On connaît jusqu'à trois répétitions de cette scène. La toile du musée de Madrid est, dans tous les cas, d'une incontestable authenticité. Rubens la conserva dans sa collection jusqu'à sa mort et ne cessa de la montrer à ses visiteurs comme une oeuvre du plus rare mérite. Elle figure à son inventaire après décès. Mise en vente, elle fut acquise par le roi d’Espagne Philippe IV, et depuis elle n’a quitté l’Escurial que pour trouver un asile définitif dans les salles du Pardo.
Tout artiste de Bruxelles ou d'Anvers devait donc, par un pèlerinage en Italie, façonner son talent sur l'exemple des maîtres en vogue. C’était abdiquer toute personnalité ; mais c'était la condition nécessaire du succès. Ainsi les hommes les mieux doués se traînaient misérablement à la remorque des peintres de la décadence italienne et l'école du Nord ne présentait plus qu’un reflet affaibli des artistes du Midi.
Un génie aussi personnel que le sien pouvait seul réagir contre les influences funestes des écoles méridionales, tirer de cet art étranger seulement ce qui convenait au tempérament des peuples du Nord pour consommer l’alliance entre l’idéal nouveau et l’ancien naturalisme.