Khadija, par
Marek Halter, dans la série "Les femmes de l'Islam".
Khadija, riche veuve, commerçante florissante, parmi les notables, les "puissants" à Mekka (La Mecque), fut la première épouse de Mahomet (Muhammad Ibn Abdallâh, dans le roman), simple et pauvre caravanier dans ses débuts. le monde arabe d'alors est polythéiste, polygame, patriarcal. La Ka'bâ est déjà un lieu de culte pour les idolâtres de l'époque (nous sommes à la fin du sixième et au début du septième siècle après JC).
Bien plus âgée que Muhammad (quinze ans dans le Coran, dix dans le roman),
Khadija lui donna deux fils, morts en bas âge (un seul, al Qasim, existe vraiment dans le roman), et quatre filles, dont
Fatima, prochaine égérie de
Marek Halter. le couple adopta Zayd, ancien esclave, adorateur de Christus, scribe du futur Prophète. Muhammad était très considéré à Mekka, car sincère, modéré, honnête.
Khadija crut en lui lorsqu'il eut dans la grotte la révélation d'un Dieu unique qui lui parla par l'intermédiaire de l'ange Gabriel (Djibril dans le roman). Elle fut la première musulmane et est considérée comme la mère de tous les Croyants. Voilà ce que disent
L Histoire et le Coran, avec un certain nombre de controverses, notamment sur les filiations.
À partir de cette trame,
Marek Halter écrit un roman tout à fait romanesque. Tel un conteur de talent, il invente, brode, construit sans vraiment argumenter, donne chair à ses personnages, principaux et secondaires, met de la consistance dans les divers évènements qui émaillent son récit : rivalités entre clans, razzia de la caravane de
Khadija, sauvée par Muhammad, épidémie de "peste" noire qui décime la cité, inondations qui s'ensuivent, affrontements entre puissants au sujet de la reconstruction de la Ka'bâ détruite par le déluge.
Le personnage de
Khadija fait tâche à cette époque : elle est dépeinte comme une femme de tête, volontaire, décidée, amoureuse, une mère courage qui affronte vaillamment les épreuves comme l'épidémie de "peste" noire, la perte de son fils, les affronts des puissants, mais finit par être écornée, s'en remettant à son époux et à sa foi nouvelle. Muhammad est un homme calme, avisé mais décidé, même s'il paraît parfois dans le sillage de son épouse. Il accepte mieux les épreuves que
Khadija et semble faire son chemin, celui qui l'amènera à devenir le Guide des musulmans.
Marek Halter sait raconter des histoires, les mener à la baguette, les faire rebondir, il semble à l'aise dans le roman historique, et ses personnages, les situations baignent avec aisance dans leur époque. On s'étonnera que le monde arabe de la péninsule soit si fermé au reste du monde que les religions monothéistes établies y apparaissent presque clandestinement, que l'illettrisme soit la règle, alors que
Khadija, ses cousines, Muhammad semblent presque modernes dans leur moralité ou leurs arguments. On regrettera de ne pas découvrir la manière dont l'Islam s'est construit, comment se sont élaborés ses piliers conceptuels, à partir de quelles structures sociales, quel fut le rôle des tribus, du nomadisme. Mais ce serait un autre livre… En attendant, reconnaissons que
Khadija a su nous captiver.