Hermann Hesse écrit «
le voyage en Orient » en 1931. Il parait l'année suivante. L'Allemagne est au bord de la faillite, le parti nazi et
Adolph Hitler font une percée foudroyante dans le paysage politique.
Le roman de Hesse narre la marche vers cet Orient, destination onirique, voyage initié par un mouvement spirituel, une secte, l'Ordre. C'est en fait pour l'auteur le prétexte pour une recherche de sa propre identité intérieure, de ses propres choix. le mouvement est le révélateur des pérégrinations spirituelles de l'auteur et de son héros, H .H., de ses interrogations, de la recherche d'un sens à donner à sa vie et de sa propre place et du rôle qu'il joue dans celle-ci. C'est la migration d'un point A incertain et perdu dans le passé vers un point B inconnu et indéfinissable dans le futur. C'est la métamorphose de la chenille en papillon. C'est enfin le moment de la révélation sur la véracité des croyances, la remise en question perpétuelle des certitudes.
Les deux personnages principaux, H.H. et Léo, ne sont qu'une et même personne,
Hermann Hesse lui-même, confronté à sa propre dualité, ses incertitudes, ses doutes par rapport à une organisation référente, l'Ordre. Peut-on y voir la position de l'auteur par rapport à la montée du nazisme, parti dont il condamne les thèses et pour lequel il comprend parfaitement les dangers ?
D'un côté une nation aux abois qui cherche un sauveur, Hitler, d'un autre côté les conséquences de l'adhésion et la soumission à ce nouvel Ordre et toutes les horreurs qui en ont découlées. C'est ce pacte avec le diable que dénonce
Hermann Hesse dans ce récit et le combat intérieur dans la prise de décision. Il écrit : « C'est la loi de la servitude. Ce qui veut vivre longtemps doit servir. Mais ce qui veut dominer ne vit pas longtemps ».
La fulgurance de cette histoire, seulement 119 pages n'est qu'un leurre car la lecture est ardue et la compréhension complexe. L'histoire narrée entre rêve et réalité entraine des interprétations multiples. La relecture permet de découvrir d'autres sens cachés.
L'écriture est belle, poétique.
Traduction de
Jean Lambert.
Préface d'
André Gide.
Editions Calmann-Lévy, le livre de poche, 119 pages.