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3,65

sur 213 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Megan Lindholm, alias Robin Hobb, nous livre un récit fantastique aux forts accents militants dans lequel nature et féminisme sont les thèmes dominants.
Evelyn n'en revient pas de sa chance. Elle, la jeune femme frêle et sauvage, habituée à courir dans les bois d'Alaska et à rentrer boueuse et déguenillée est mariée à un bel homme, au sourire facile et tendre. Eclipsée par cette personnalité solaire, elle accepte de se rendre chez sa belle-famille pour un court séjour. Sur place, alors que les relations avec sa belle-mère et ses belles-soeurs se révèlent compliquées, elle retrouve un ancien et inquiétant compagnon de jeu. Réel ou fantasmé, Pan, le faune, va bientôt prendre une place de plus en plus importante dans sa vie tandis que la solitude et le rejet pousse Evelyn dans les bras de cette ombre.

J'ai dévoré cette lecture.
J'en suis sortie assez marquée.
J'ai beaucoup aimé les thématiques abordées par l'autrice : la nature et le féminisme. Evelyn est un personnage touchant dans une société puritaine qui ne laisse que peu de place aux femmes en dehors du mariage et du foyer. Sa relation avec les ombres de la forêt en paraît d'autant plus salvatrice et le symbole de sa liberté.
J'ai toutefois eu plus de mal avec certains épisodes narrés par la protagoniste. On comprend vite que son caractère ne la place pas dans la catégorie femme au foyer. Or, c'est le seul rôle que son entourage lui permet de tenir.
J'ai trouvé que l'autrice insistait beaucoup trop sur ce point jusqu'à donner à son héroïne l'image d'une femme passive qui se complaît dans son malheur.
L'autrice égratigne la société puritaine américaine mais force un peu trop le trait par moment ce qui a eu l'inconvénient de m'agacer et comme avantage de me révolter.
Même si j'ai adoré l'héroïne, je l'ai trouvée bien complaisante, la faute à une société trop étroite pour les femmes.
En revanche, les passages où elle se laisser aller dans la forêt sont très poétiques. L'autrice met tout son talent au service d'une nature magnifiée et du lien que nous avons avec elle.
J'aime beaucoup la vision de l'autrice sur cette nature qui offre plusieurs visages. Réconfortante et salvatrice par moment, elle peut tout aussi rapidement devenir dangereuse et hostile sans l'instinct que la plupart d'entre nous ont perdu et que seuls les animaux ont parfaitement développé.
Le Dieu dans l'Ombre est le récit de deux mondes qui se rencontrent et s'apprivoisent sans contrainte, de façon innée, alors que leur nature respective ne cesse de rappeler leur différence.
Une magnifique lecture.
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Décidément, je suis une grande fan de cette auteure, même en dehors de son univers de L'assassin Royal. J'aime ses personnages, tout torturés qu'ils sont. Ils sont toujours d'un réalisme exceptionnel. Elle est capable de faire d'un univers fantastique, quelque chose de normal. Rien que par la profondeur de ses personnages.
Dans ce livre le fantastique est vraiment très peu présent dans la première moitié. On rencontre Evelyn, jeune maman d'un petit garçon, qui revient sur son enfance pour expliquer son parcours et pour montrer cet être étrange et fantastique qui a touché sa vie d'enfant. Elle raconte comme un témoignage, le délitement de sa vie qui n'aurait pas dû être la sienne, qui ne lui ressemble pas, mais qu'elle a passivement acceptée. Et tout ça jusqu'au drame qui va la faire basculer dans un monde qui semble irréel où elle va essayer de se reconstruire.
Ce livre m'a beaucoup émue. J'ai même eu plusieurs occasions d'écraser une petite larme, de tristesse ou d'émotion. C'est souvent l'effet qu'a sur moi la plume de Robin Hobb. Je sais que je me répète, mais l'humanité de ses personnages, très présente encore ici, m'a toujours beaucoup touchée.
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Pour les vacances, je vous propose une ode magnifique à mère nature, un roman très émouvant, un ovni dans ce vaste monde de la littérature.

Mais une petite mise en garde s'impose : Ce livre est assez contraignant à lire : monologue incessant, un point de vue unique, celui de l'héroïne, quelques passages que je ne  peux dévoiler sous peine de vous ôter de la curiosité, et qui heurtent régulièrement le lectorat. Chapitres parfois interminables… du coup, ces 500 pages peuvent avoir du mal à être lues. Robin Hobb cherchait encore son style égal à nul autre pareil.
Néanmoins, je vous conseille fortement sa lecture. Ce fut un véritable de coeur pour moi, que je vais relire tôt ou tard.

Nous sommes en Amérique, à la fin des années 1970. Evelyn à 25 ans, est une femme detestant les conventions et la société patriarcale, elle est solitaire, asociale et n'a pas vraiment confiance en elle. le récit commence par un séjour imprévu dans sa détestable belle-famille avec son mari et leur fils de 5 ans, ce moment est une plaie pour Evelyn. Ce séjour va tourner au cauchemar absolu. Une créature de son enfance, qu'elle nomme Pan, réapparaît pour l'emmener dans un voyage sensuel, extatique, existentiel et imprévisible, vers les forêts d'Alaska.
Pan est-il un personnage fantasmatique,  l'incarnation de Pan lui-même ou bien Evelyn a perdu la tête ?
Qui est le dieu dans l'ombre ?
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D'abord j'ai été surpris car venant de Robin Hobb je m'attendais à de la fantasy . Et c'était un roman très différent , intimiste et fantastique . L'histoire de cette jeune femme qui depuis l'enfance à un lien avec un faune , lien qui un jour devient une liaison est très émouvante , tissée d'angoisse , celle d'être entre deux monde , de culpabilité (ne pas correspondre aux normes dans cette Amérique rurale) , de peine et de joie , d'amour et de mort.
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Une des forces de ce livre réside dans le fait que cet élément merveilleux apparaît comme perturbateur, mais de façon plutôt positive : il remet en cause la vie à présent bien rangée et socialement acceptable – tout juste – de l'héroïne, qui est loin d'y trouver un bonheur parfait, en lui proposant une alternative faite de liberté totale, de solitude face à la civilisation humaine, et d'un amour également sans conditions – d'ordre à la fois émotionnel et sexuel. Cette complémentarité entre l'amour physique et l'attachement psychique, l'auteur le développe énormément – s'agissant d'une relation entre une humaine et un être mi-homme mi-bête, mi-humain mi-surnaturel, je pense que le pari peut être risqué. Certaines scènes sont très explicites, et même si j'en ai retenu la sensualité et le lien thématique avec la liberté et la nature, également extrêmement exploités par Megan Lindholm, j'imagine que ça passera ou pas selon les lecteurs. Je n'en reviens limite pas moi-même d'avoir autant aimé ce livre, je me suis retrouvée quelque part très en-dehors de mes sentiers battus !

Le réaliste contemporain m'ennuie souvent, et l'intrigue se développe autour d'une famille américaine tout ce qu'il y a de plus superficiel et conventionnel – cela m'a rappelé bien des débuts de romans de Stephen King. Evelyn s'y trouve piégée, et trouve un certain salut auprès du faune – l'élément surnaturel prenant ainsi une position à l'opposé de ceux du maître de l'horreur. L'héroïne a vécu longuement en Alaska, livrée à elle-même durant sa jeunesse, et la forêt est son environnement « naturel » – on pourrait presque parler de symbiose à la manière dont l'auteur en parle. Son attrait pour une certaine vie sauvage est renforcé à la fois par ces souvenirs de jeunesse, et l'effondrement de son couple/de sa psyché au-delà de ses relations avec sa belle-famille. (Je ne vous dévoile rien ici, si cette condition n'est pas remplie l'ensemble serait simplement invraisemblable)
Tout au long des événements qui s'enchaînent dans l'histoire, car la 4e de couverture est loin de tout nous raconter, le lecteur reste très proche de la nature, à travers les yeux d'Evelyne. Ayant moi-même passé de longues heures en forêt, également toujours les yeux en éveil concernant les plantes, traces, roches, éléments naturels en tous genres, et pas toujours sur le chemin, j'ai été particulièrement sensible à ces passages que j'ai trouvés justes et beaux. le sentiment de liberté est très bien rendu ; également l'immensité des choses, ciel, terre, étendue naturelle, force de l'eau courante, intensité et diversité des couleurs, etc. de même son incompréhension devant la cruauté gratuite de sa belle-famille, leur manque de conciliation, leur petite vie si rangée qu'il ne convient pas d'en bousculer un grain de poussière, leurs nombreux motifs de vexation, m'a beaucoup touchée. On sait dans le livre qu'Evelyne a du mal à comprendre le comportement social de manière générale, et elle tombe sur une famille particulièrement gratinée et peu tolérante ! En parallèle on trouvera également le thème de la féminité, là aussi développé plusieurs fois sur deux versants : social et individuel, apparence et comportement vs sexualité.

On peut regretter la dualité « Evelyne vs les autres » dans ce livre, car elle ne trouve aucun être humain, ou presque, à qui se comparer en termes de similarité. Cependant le morceau est très dense et aborde plusieurs thèmes qui auraient pu chacun faire l'oeuvre d'un livre entier. de plus sans cette très forte motivation l'élément surnaturel (le faune) aurait eu moins d'impact en termes de narration et aussi à l'intérieur de la narration. En cela (la structure et les motifs) je trouve que ce roman se rapproche d'un conte. En même temps j'y ai retrouvé beaucoup de thèmes chers au fantastique – la métamorphose, l'illusion, le rêve, la nature sauvage vs l'humain civilisé, l' »autre » enfin, tout simplement, qui n'est pas nous, et dont l'altérité nous dérange, nous fascine et nous effraie en même temps.

Un livre plus complexe que le résumé ne le laisse paraître, qui mêle drame familial, conte fantastique et une touche de sensualité.
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De Robin Hobb, alias Megan Lindholm, j'ai surtout lu son immense saga L'Assassin royal et ses multiples ramifications, et quand j'ai essayé d'aller vers un texte autre, différent, plus ancien avec Alien Earth, je n'ai pas été conquise par l'expérience. J'avais donc quelques appréhensions avec le Dieu dans l'ombre, texte fantastique singulier qui semble pas mal cliver les lecteurs. Mais c'était bien me tromper car ce fut une lecture coup de coeur et coup de poing !


Publié en 1991 par l'autrice aux États-Unis, sous le titre de Cloven Hooves, celui date de quelques années avant qu'elle débute la saga qui l'a rendue si célèbre, pourtant on y retrouve déjà les qualités d'écriture qu'elle développera plus tard avec ses différents héros et univers. Comme avec Fitz, elle a pris une héroïne qui ne semble pas facile à aimer au premier abord pour la rendre terriblement émouvante. Comme avec le Soldat Chamane, elle nous offre de superbes pages de nature writing. Et comme avec ses dragons, elle revient à la racine du mythe Du Faune, ici, le tout sans concession. Je suis fan !

J'ai adoré ma lecture, pourtant elle ne fut pas simple. J'ai eu le sentiment d'assister pendant plus de 300 pages à la déconstruction d'une femme, d'une mère et d'une épouse, ce qui m'a bouleversée. Nous sommes ici dans un texte qui fait très roman américain. Comme dans du Steinbeck ou du Kerouac, l'autrice nous emmène en plein coeur de l'Amérique, une Amérique des années 70 où les traditions patriarcales sont encore très fortes. Evelyn, notre héroïne, se retrouve obligée d'aller vivre avec son fils et son mari, chez les parents de ce dernier, bien loin de leur demeure en Alaska. Ce retour dans le giron familial de monsieur va sonner comme un lent couperet pour elle. L'air de rien, insidieusement, nous allons voir sa vie basculer et ce sera terriblement poignant. L'autrice met parfaitement en scène, avec une grande justesse et subtilité, l'aliénation de la femme en tant que mère et épouse, faisant disparaître son individualité. C'est terrible. L'air de rien, la famille de son mari et ce dernier, sans s'en rendre compte, la font disparaître. Ils l'enterrent sous leurs normes et leurs préjugés faisant disparaître violemment ce qui faisait d'elle une personne unique, montant, montant jusqu'à un point d'orgue qui fut tragique à vivre ! Il fallait toute la force et la beauté de la plume de Robin Hobb pour nous y prendre au piège et nous faire tressaillir de fureur, de rage et de tristesse.

En parallèle de ce drame humain inéluctable auquel on assiste de manière insidieuse et presque naturelle, - Je sais d'ailleurs que certains lecteurs y sont restés hermétiques voire sont passés à côté, alors que bon sang, c'est d'une violence ! - l'autrice va mettre au jour un refuge pour notre héroïne : la nature. Très proche de celle-ci depuis toujours, elle y a trouvé le moyen d'exprimer la liberté dont on la bridait dans la réalité et ce depuis enfant, car une fille "ne doit pas être ainsi"... C'est ainsi que petit à petit, insidieusement là aussi, Evelyn va être à nouveau attiré par ce lieu hors du temps, hors des normes, hors des traditions où elle pourra être elle-même, elle qui l'aime tant et qui aurait aimé être botaniste. Par ce biais que l'autrice va introduire une magique mais âpre dimension fantastique à son récit, mélange de mythologie romaine et de fascination pour la nature. Les pages qui en sont les porteuses ont un charme sombre et envoûtant. J'ai beaucoup aimé ressentir l'humidité, le souffle, les odeurs et les bruits de la nature à travers sa plume, mais aussi sa brutalité, sa solitude, sa bestialité. Ce fut étrange et singulier à la fois.

La consolation qu'Evelyn gagne ici trouve sa matérialité en une créature peu mise en avant dans la littérature à cause de sa nature bestiale et érotique : le faune. Au début, j'ai eu quelques difficultés avec l'évocation très crue de celle-ci et ses caractéristiques, notamment son appétit pour le sexe et les représentations du sexe entre une humaine et celui-ci. Mais petit à petit, Robin Hobb a tissé tout autre chose avec cette créature qu'elle dépeint telle qu'elle l'est dans la mythologie et non telle qu'on l'a transformée pour la rendre plus consensuelle. le Faune, qu'Evelyn a nommé Pan, est à la fois celui qui la sauve et la fait chuter. Elle va vivre quelque chose de très intense et fondateur avec lui, qui nous emmènera aux portes de la frontière entre réalité et fantastique, nous laissant longtemps dans le flou de ce qu'elle va vivre avec lui. Mais la répétition en miroir, dans cette nature, d'un schéma déjà vu avec ce qu'elle a connu dans la société humaine fait beaucoup réfléchir et remue également. Evelyn ne peut-elle être résumée qu'à son rôle d'épouse et de mère ? Une mère est-elle toujours subalterne des choix des mâles de son entourage pour élever son enfant ? Doit-elle revivre sans cesse le même instant tragique de la séparation, non pas voulue par l'enfant mais souhaitée par l'adulte avec parfois les répercussions tragiques qu'on connaît ? Robin Hobb ne nous donne pas de réponse mais nous laisse au contraire chercher les nôtres et sa conclusion abrupte m'a laissée toute chose...

Roman intime, roman puissant, le Dieu dans l'ombre est avant tout un récit très humain et très féministe où l'autrice déjà interrogeait sur le rapport de la société patriarcale aux femmes, ce qu'elle reprendra dans Les aventuriers de la mer, sur celui de la mère à son enfant, ce qu'elle reprendra également dans l'Assassin Royal ou les Cités des Anciens. Elle fait cela dans un texte puissant où se confondent critique société, fantastique et nature writing dans un mélange entêtant, âpre et douloureux. J'ai été bouleversée par le récit si dur de l'aliénation de cette femme qui peine tellement à s'affirmer comme telle dans ce monde d'homme. Un très grand texte !
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J'ai dévoré ce récit en une journée tellement j'ai accroché à cette histoire. J'aime beaucoup les ouvrages de Robin Hobb mais dès que je m'eloigne de l'assassin royal ou des aventuriers de la mer, je suis en général déçue. Ce n'est pas le cas ici, j'ai aimé les aventures de Evelyn et Pan, j'étais curieuse de connaître la suite et je n'ai pas été déçue.
Evelyn est un garçon manqué, ub peu sauvageonne, elle n'est pas comme ses soeurs. Elle adore chasser avec son père, dépecer les animaux. Elle adore la forêt et la nature et s'amuser avec le faune. Malgré ses difficultés à intégrer, elle réussi à se marier aveec Tom et elle a un enfant Teddy. Les choses se compliquent quand ils quittent l'Alaska et doivent aider la famille de son mari à la ferme. Elle a l'impression de perdre son mari et son fils au profit de sa belle famille. Un jour, elle revoit le faune et elle decide de revenir le voir avec son fils. Je vais m'arrêter la car j'en ai déjà trop dit mais j'ai adoré l'histoire, les personnages, les lieux... Si vous aimez le fantastique foncez, vous ne serez pas déçu !
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L'histoire : Amérique du Nord, années 70. Evelyn a connu une enfance libre et sauvage en Alaska, aujourd'ui elle suit son mari dans l'Etat de Washington pour s'intaller quelques temps dans la ferme familiale, où l'on manque de bras. Renfermée, complexée, elle a dû mal à se faire accepter dans cette famille nouvellement bourgeoise qui voit d'un mauvais oeil sa différence, toutes les différences. Etouffant dans cette atmosphère lourde et contraignante, elle glisse souvent dans ses souvenirs d'enfance, au temps où elle s'imaginait avoir pour compagnon de jeux sylvestres un jeune faune qu'elle avait baptisé Pan. Peu à peu, elle redécouvre son amour pour la forêt et sa sauvagerie, et se met à guetter des traces oubliées dans les sentes ombragées. Fantasme, réalité inacceptable ? La tragédie qui va la frapper sans prévenir va la jeter à corps perdu entre deux mondes, entre deux vies, entre deux réalités. Mon avis :Megan Lindholm, Robin Hobb, deux noms pour une même plume, deux styles distincts pour un même talent !
Qu'elle nous narre avec fougue les aventures épiques d'un Fitz ou d'un Nevare ou qu'elle se penche avec tendresse sur la vie et les fantasmes d'une jeune femme moderne et déboussolée, on retrouve la même capacité à nous émouvoir, à nous attacher aux personnages et à nous faire plonger dans leur vie !
Et ce roman est particulièrement original, fort et inclassable !
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Le Dieu dans l'ombre a été à l'origine publié en 1991 sous le vrai nom de Robin Hobb, c'est-à-dire Megan Lindholm. Cette année, une nouvelle édition est sortie chez ActuSF, qui me l'a gentiment fait parvenir en SP. Ce roman fantastique a reçu un accueil enthousiaste et je me suis plongée dans sa lecture avec une intense curiosité tellement il diffère des livres que l'on connaît de l'autrice.


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Dans les années 1970, en Alaska, Evelyn mène une vie paisible avec son mari Tom et leur enfant Teddy, jusqu'à ce que Tom propose de partir un mois dans l'État de Washington pour aider à la ferme de son père. Ils quittent donc leur chalet proche de la nature pour une vaste entreprise familiale, celle des Potter, dans laquelle Evelyn ne se sent pas à son aise. Simple et réservée, elle a du mal à s'intégrer à sa belle-famille, qui la juge constamment. En décalage avec la mère et les soeurs de Tom, qui sont des femmes de la ville très apprêtées et de parfaites ménagères, Evelyn se sent perdue. Elle tente alors en vain de se transformer en épouse dévouée et complaisante, s'occupant de Teddy et de la petite maison prêtée par les Potter, pendant que Tom aide son père. Très vite, ce quotidien aliénant ravive des souvenirs, ceux de son enfance à Fairbanks, lorsqu'elle passait ses journées dans les bois, à chasser et jouer en compagnie d'un étrange individu : un faune, qui... à l'aube de son adolescence, a disparu. Mais l'ombre de Pan ne l'a jamais totalement quittée, et dans l'ennui de la ferme des Potter, elle ressurgit, et l'appelle à se libérer...


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Le Dieu dans l'ombre est un récit surprenant, intime et pénétrant. On retrouve la plume sensible de l'autrice de fantasy Robin Hobb, mais on découvre une facette davantage poétique, je dirais même "féminine", avec Megan Lindholm. En effet, le point de vue interne permet de dérouler toute la palette d'émotions et de pensées d'Evelyn, une jeune femme partagée entre son envie de liberté et celle d'être aimée, de rentrer dans le moule. Ayant peu confiance en elle, elle s'est laissée prendre par l'assurance d'un homme et la vie de mère de famille, rôle qu'elle n'a pas remis en question tant qu'elle ne quittait pas l'Alaska. Se pensant terne et bizarre, elle vit dans la gratitude qu'un homme tel que Tom - grand, beau, fort - puisse s'intéresser suffisamment à elle pour l'épouser et lui faire un enfant. On va voir au fur et à mesure du récit cette facette hésitante et soumise d'Evelyn évoluer, notamment grâce à son envie de liberté, et l'attrait de Pan, revenu dans sa vie...


La forêt, décor central du roman, est tantôt baignée de soleil, tantôt couverte de givre, tantôt silencieuse, tantôt bruissante de toutes les vies qui l'habitent ; elle se pare de toutes les couleurs des saisons, elle sent l'humus, la rosée, elle protège et nourrit ; cette forêt, qui parcourent tous les États-Unis, est un havre, mais aussi un terrain de transition : Evelyn y trouve à chaque fois refuge et se découvre, s'initie, c'est le lieu des vérités, celles que l'on cache quand on est civilisé, au sens propre du terme. Mais même si l'esprit d'Evelyn et le dieu Pan évoluent dans son ombre, tout dans ce roman est lumineux.


En plus d'être un roman initiatique, le Dieu dans l'ombre est un roman d'amour. de plusieurs amours précisément : l'amour propre et l'amour profond et désintéressé. En effet, Evelyn apprend à reconnaître sa propre valeur, à accepter qui elle est, c'est-à-dire une jeune femme sauvage qui préfère cueillir des champignons et chasser le lapin dans les bois plutôt qu'une pimpante épousée qui flâne dans les magasins ; quant à l'amour désintéressé, c'est Pan qui va le lui apprendre, en lui enseignant le lâcher prise et en l'aimant inconditionnellement. Mais aussi amour animal, amour hybride, amour maternel, toutes ces formes se présentent dans ce roman pour dresser un portrait de déesse d'Evelyn. Elle est la Déesse-Mère, l'amante et la mère, elle réconforte et nourrit, se soumet pour mieux prendre l'énergie.


Le roman se scinde en deux parties, qui sont à mettre en corrélation avec les deux hommes qui partagent la vie d'Evelyn : Tom et Pan. Tom est l'envers de Pan : c'est l'humain policé, qui refoule son animalité et n'accepte ni l'échec ni la mort, ne prend pas ses responsabilités. Pan est le dieu discret, mi-bouc mi-homme, il vit depuis des milliers d'années au fil des saisons et ne connaît que l'instant présent et ses désirs. C'est auprès de lui qu'Evelyn trouve consolation et réaffirme son appartenance au monde boisé et sauvage. Mais pour un temps, car on la quitte alors qu'elle retrouve son chalet en Alaska, en peine mais délivrée. Car la simplicité et les bras chauds de Pan ne signifient pas éternité ni bonheur, mais simplement vérité et confiance.


Enfin, je voudrais insister sur la côté mystique de ce long roman. Plonger dans cette lecture, c'est plonger dans une expérience sensorielle et spirituelle. Les chapitres se référant à l'enfance d'Evelyn enfoncent le lecteur dans l'incertitude : est-ce que la petite Evelyn rêve ? le faune existe-t-il vraiment ? Ami imaginaire devenu plus tard amant imaginaire ? le dernier tiers du livre soulève le voile, mais nous dépose à la porte du chalet d'Evelyn confus. Comme nous l'avons dit plus haut, la forêt permet l'initiation de la jeune femme aux secrets de Pan et de la nature. La construction du roman suit ce chemin : le réveil d'Evelyn à elle-même et à Pan l'emmène dans ces bois, elle marche jour après jour, remontant les États-Unis jusqu'au Canada, pour finir dans une grotte au sommet de montagnes, symbole par excellence de la fertilité et de la maturation. Lorsqu'il est temps d'en repartir, c'est le printemps, donc un nouveau cycle qui commence, et il est temps pour elle de revenir au monde, armée de nouvelles connaissances et expériences.


Il y aurait tant à dire sur le Dieu dans l'ombre ! Les pistes de réflexion que je propose ne sont que des esquisses et ne rendent pas hommage à la diversité des thèmes et interprétations de ce roman. J'ai pu lire ici et là qu'il s'agissait d'un roman féministe. Je ne lui donnerais pas ce qualificatif, car malgré tout, Evelyn se réalise à travers un pendant masculin, mais par contre, je le rapprocherais du féminin sacré, car la figure féminine y est traitée d'une manière mystique.


Pour conclure, pas de points négatifs à apporter à ce roman brillant, dont on ressort comme d'un rêve ou d'une longue balade en forêt.
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Merci beaucoup à Jérôme et aux éditions ActuSf pour l'envoi de ce service presse !
Ce titre m'a fait de l'oeil quand je l'ai découvert dans le catalogue des éditions ActuSF, notamment au vu du nom de l'autrice dont j'ai déjà pu apprécier la plume avec l'Assassin Royal (une saga qu'il faudrait bien que je poursuive d'ailleurs !). L'idée de découvrir Robin Hobb dans un autre registre et à travers un titre plus ancien me plaisait bien ! Toutefois, au moment où je l'ai reçu, ce n'était plus le genre de lecture qui m'attirait ! J'avais besoin de légèreté (du Feel Good ou de la romance) et de romans addictifs (comme des thrillers ou de la littérature Young Adult). Je l'ai, de ce fait, mis de côté, préférant le savourer pleinement plus tard à un moment où j'en aurais à nouveau envie.
Et j'ai bien fait d'attendre ! En effet, début août, après avoir lu des ouvrages plus légers et « faciles », j'ai ressenti le besoin de lire un roman un peu plus complexe, plus lent, différent tout simplement ! le Dieu dans l'Ombre est alors apparu comme le titre idéal. le terme « complexe » ne lui rend peut-être pas vraiment justice (bien qu'il y ait une double lecture) mais clairement, il ne se dévore pas comme une romance ou un thriller. Au contraire, il faut prendre son temps pour le lire et goûter toutes les subtilités (de mon point de vue du moins).
Les dialogues ne sont pas légion dans ce récit. Sans être totalement absents, ils se font parfois rares au vu des nombreux passages plus narratifs ! Cette histoire, en général, a un côté très contemplatif, descriptif et introspectif. Nous suivons, en effet, Evelyne qui nous conte son histoire à la première personne du singulier. Outre nous rapporter les faits marquants de sa vie, elle nous décrit également les sensations qu'elle éprouve lors de ses escapades en forêt ou encore les réflexions et les débats qui l'agitent. C'est une enfant, une adolescente puis une jeune femme un peu à part, qui a du mal à trouver sa place dans le monde moderne, plus dans son élément au sein de la nature que parmi les hommes et leur Société. Suite à sa rencontre avec Tom, elle parvient à se créer une sorte d'équilibre mais celui-ci est plus fragile qu'elle ne le pense et ne va pas résister à sa confrontation avec l'implacable famille de son mari. Tout vole alors en éclat. Et Pan refait son apparition….
Pan est un personnage étrange, mi-homme mi-bouc, réel ou imaginaire ? Même Evelyne a du mal à faire la part des choses. Elle ne sait pas si la folie la guette ou si cet ami d'enfance existe réellement. Quand il revient dans sa vie c'est à la fois un réconfort et un tourment. Elle se sent en sécurité avec lui mais a également peur d'être mise à jour et que sa psychose ne s'étale aux yeux de tous. J'ai apprécié cette ambivalence, de ne pas savoir trancher une bonne partie du roman entre ce qui est issu de la réalité et du songe. Jusqu'à la fin, je trouve, la question reste, en un sens, entière même si la dernière partie du récit semble davantage pencher dans une direction que dans l'autre. Pan étant aussi la personnification de tous ses désirs enfouis.
Cette histoire est, en effet, coupée en trois partie, de mon point de vue. Dans la première, nous suivons parallèlement (lors de chapitres alternés) une Evelyne adulte, dans le présent, et une Evelyne enfant-adolescente, de ses 9-10 ans à ses années universitaires (bien que plus brièvement). Ensuite, dans un second temps, seule l'Evelyne adulte subsiste. La troisième partie prend place, selon moi, après un événement qui va changer la donne et faire prendre au récit un tout autre tournant. J'ai particulièrement apprécié la première et la deuxième partie, moins la dernière.
La vie d'Evelyne avec son mari et son fils, Teddy, avant l' « événement » m'a plu parce que, malgré une certaine lenteur, il y a une tension sous-jacente. Notre héroïne est confrontée à la famille de son mari avec laquelle elle a du mal à composer. Elle ne se sent pas intégrée, a l'impression d'être en décalage et rejetée, incomprise…Parallèlement, elle se reproche ce rejet, persuadée que c'est elle qui ne réagit pas bien, qui n'est pas une « bonne épouse ». de temps en temps, elle a un sursaut de fierté, une étincelle de rébellion qui lui fait dire que tout n'est peut-être pas sa faute mais sa peur de perdre son mari et son fils l'empêche d'aller au bout de ses idées. Bref, j'ai aimé voir l'évolution de ces relations complexes entre les personnages et j'avais hâte de savoir où tout cela allait mener. Plus d'une fois, j'ai eu envie de secouer Evelyne, de la forcer à taper du poing sur la table, à faire valoir son opinion (et de donner une bonne claque à son mari par la même occasion !). J'étais frustrée et énervée…. D'un autre côté, je ne pouvais que comprendre sa situation, sachant que le récit se déroule aux Etats-Unis, dans les années 70-80…Ce sont d'autres moeurs et d'autres mentalités et même si j'aurais préféré qu'elle se rebelle davantage, je comprenais ses angoisses et ses peurs. Se sentant à part et différente, elle pense « bêtement » que c'est elle qui est en tort, que c'est à elle de faire des efforts pour s'adapter.
Si j'ai apprécié ces questionnements, j'ai encore davantage gouté aux nombreuses descriptions sylvestres qui parsèment ce récit et sollicitent tous nos sens. Elles m'ont un peu rappelé celles que j'ai pu lire dans « Un bûcher sous la neige » ! L'héroïne nous partage tout ce qu'elle voit, touche, respire, entend, goûte,… : la rugosité de l'écorce, le léger roulis de l'eau dans la rivière, le chant des grenouilles, le bruissement des feuilles, l'odeur des primevères, la douceur de l'herbe,…Je me suis rapidement immergée dans cet univers bucolique et, grâce à lui et à la qualité de la plume de l'autrice, je me suis facilement plongée dans ce roman et identifiée à Evelyne. Sans être addictif, j'ai trouvé ma lecture très fluide. Les pages se tournaient sans peine et je n'ai jamais eu de sensation de longueurs ou de lenteurs excessives (malgré les choix narratifs de Megan Lindholm) ! L'ensemble fonctionne très bien selon moi et a réussi à me tenir en haleine jusqu'au bout !
En bref, un roman particulier qui ne plaira sans doute pas à tout le monde ! Une narration très contemplative et introspective avec une touche non négligeable (selon le moment du récit) de fantastique ! Je pense que si vous arrivez à vous attacher à Evelyne et si vous aimez les descriptions en lien avec la nature, vous dégusterez cette histoire et y trouverez votre compte ! Dans le cas contraire, vous aurez peut-être du mal à en voir le bout ! Pour ma part, j'ai été embarquée et je vous le recommande donc chaudement ! 😊

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