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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Qui aurait cru que derrière la légende de "Galant Ash", ce soldat grimpé dans un arbre pour recouvrir de sa veste les jolis atours échappés par inadvertance du corsage d'une bien belle jeune fille, se cache une autre femme, bâtie sur un tout autre modèle ?
Constance Thomson est ce qu'on appelle une "maîtresse femme", de celle qui vous retourne un champs, trime pour planter, cueillir, moissonner tout en maniant la gâchette comme personne, et se repose en fumant le cigare et buvant un verre sous la tonnelle ! Rien à voir avec une jeune donzelle, perchée dans les branches d'un arbre pour saluer les hommes qui s'en vont à la guerre !
Non. Sa noblesse et sa beauté à elle, elles sont ailleurs...

Il y a de multiples raisons de partir au combat. La guerre de sécession n'en a pas manquées. Celle du soldat Thomson est plus particulière. Constance Thomson s'est enrôlée par amour. Elle a pris la place de son époux, Bartholomew, garçon fragile et délicat, parce qu'elle savait qu'il ne survivrait pas aux conflits et qu'il fallait bien qu'il y en ait un qui y aille ! Des deux, elle est la seule qui peut espérer s'en sortir.

Les cheveux longs cisaillés, les pantalons enfilés, elle rejoint les troupes et arpente les champs de bataille, tue, soigne, achève, parle ou se tait, puis entre tout cela, marche, marche, à tomber, à se croire déjà morte.

La réalité de la guerre la plus crue, avec son lot de douleurs, de sangs, de crasses, de cris et de larmes nous est livrée à travers les yeux de Constance, mêlée à l'expression de ses sentiments : son amour pour Bartholomew et tous ses maux qu'elle lui livre dans ses lettres, le souvenir de sa mère (que de belles pages !), son courage, sa ruse... Et ce moment où la raison n'en peut plus et part, quand elle est à bout. Poésie du désespoir :
"Il y avait des morts assis contre les arbres, des morts les pieds en l'air, des morts pendus aux branches. Il y en avait qui étaient tombés à trois dans le lit d'un ruisseau et d'autres allongés à part dans une clairière, bien bordés jusqu'au menton par des couvertures de soleil toutes propres."

L'auteur grâce à un style soigné, nous fait glisser petit à petit vers cette autre réalité, ce discours intérieur qui tentent, seulement, uniquement, de se garder en vie. Il nous amène alors à une vision un peu fantasmagorique de ce monde, où les hommes racontent les rêves de leur cheval, où les yeux fuient goutte à goutte mais ne pleurent pas...
Et sans pour autant nous anesthésier, nous épargner.

Laird Hunt nous livre là un portrait de femme, rare. Au fur à et à mesure de la lecture, l'enjeu de la guerre devient secondaire. Gris ou Bleus, peu importe, seuls comptent le courage et la volonté farouche de s'en sortir, de revenir...
Combien ont vécu un tel destin ? Combien enrôlées volontaires, grimées en hommes, ont été découvertes et condamnées, au seul tort d'être femmes, peu importe le cran et la bravoure ? Combien d'hommes ont su partager et garder ce secret ?

"De femme avec un fusil entre les mains, il n'en est pas une seule dans cette pile de livres que j'ai."

C'est un livre beau et éprouvant. On a envie que cela s'arrête et dans le même temps, on n'a pas envie de la quitter. Et quand arrive la fin, c'est le coeur serré qu'on referme le bouquin.
Lien : http://page39.eklablog.com/n..
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La guerre de Sécession éclate, une jeune paysanne de l'Indiana part au front à la place de son époux à la santé fragile.
« Nous étions à peu près de la même taille, mais lui était fait de paille et moi d'acier ».

La robuste Constance, poitrine bandée, cheveux coupés, chapeau enfoncé sur les yeux, devient le soldat Ash Thompson.
C'est à travers ses yeux que nous voyons la guerre, la vie brisée des hommes au combat. C'est à travers ses mots, ceux qu'elle écrit à son mari, que nous soupçonnons ce qu'elle traverse.
Dans ses lettres, elle raconte son quotidien de soldat, l'horreur des batailles, l'absurdité des vies perdues pour une cause qu'elle ne comprend pas vraiment.
Elle s'engage aussi dans un dialogue intérieur avec sa mère, disparue depuis quelques années. Son ombre l'accompagne dans sa longue errance dans une campagne dévastée lorsqu'elle perd son régiment.
« Neverhome » n'est pas seulement un roman de guerre, j'y ai lu la belle histoire d'amour d'une femme hors du commun pour son homme, pour la vie.
Laird Hunt signe un livre magnifique, où la nature tient un place prépondérante, tant par son hostilité que par sa magnificence.
Encore un coup de coeur.

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Constance. Personnage inoubliable.

« Toute la douleur de ce monde et du monde d'après. »

Cette phrase extraite du roman Neverhome de Laird Hunt est pour moi celle qui résume le mieux ce roman.

Non seulement cette citation incarne le destin de cette femme, engagée dans les troupes du nord lors de la guerre de Sécession, mais également elle reflète la situation sociale du pays -une douleur d'aujourd'hui et de demain- et restitue avec exactitude la tragédie de la guerre et toutes ses séquelles.

« le village n'était plus que gravats et décombres, et la cour d'école avait l'air d'une île voguant sur une mer funeste. »

J'ai dévoré ce roman. La plume est belle et tellement juste. Les personnages et les situations évoquées sont travaillés, fouillés avec précision, on se plonge réellement dans une autre époque. Une lecture enrichissante et très prégnante.
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Constance Thompson alias Ash Thompson, alias Gallant Ash, s'engage côté bleu dans la guerre de Sécession.
Elle s'engage pour épargner à son mari, le fragile Bartholomew, de le faire. Elle s'engage parce qu'elle veut voir le monde, elle s'engage parce que veut éprouver sa bravoure.
Travestie en homme, elle se coule en un rien de temps dans sa nouvelle identité : entrainement, marches forcées à travers la campagne, au milieu des charniers, corvées, coups de poing, whisky, batailles….
Elle supporte tout, endure tout, ne recule pas… Ces seuls moments de douceur sont les lettres que lui envoie son mari qui sait en quelques mots faire revivre la douceur de la vie à la ferme.
Son seul témoin est sa mère morte à qui elle demande sans cesse de valider son courage.
Faite prisonnière, blessée, enfermée dans un asile de fous, elle s'en sort pour reprendre la route de l'Indiana, retrouver sa terre, retrouver son homme.
Entre rêve et réalité, nous suivons les errements de Ash-Constance qui a retrouvé ses jupes, ses pensées vagabondes, qui naviguent entre les horreurs de la guerre, la brutalité des hommes, la lucidité du Colonel, ses souvenirs d'enfance, de sa rencontre avec Bartholomew, celles faites sur la route et les histoires qu'on lui raconte, sa préoccupation de ne pas être découverte…
Quelle découverte que ce destin de femme ! Quelle idée formidable que de nous raconter à travers ce personnage de Constance, le sort de ces femmes soldats !
J'avais déjà rencontré la plume de Laird Hunt. Ici, je suis totalement séduite.

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Constance Thompson, forte et déterminée, travestie en homme,quitte sa ferme de l'Indiana pur l'Ohio lorsque la guerre de Sécession éclate, à la place de son mari bien-aimé, Bartholomew, de santé trop fragile pour rejoindre les rangs des confédérés.
Avec en poche, vingt dollars, six pommes flétries,du corneed-beef, une couverture et des biscuits elle affrontera les violences qui ruinent et dévastent les paysages, anéantissent les individus, pour défendre la République.
En bras de chemise, le chapeau enfoncé jusqu'aux yeux, elle rejoint ceux qui sont destinés à finir estropiés ou à mourir........
Se présentant sous le nom d'Ash Thompson, "Gallant Ash ",pour avoir donné sa veste à une femme, elle fait merveille avec son "Springfield 1861"à percussion.
Elle peut découper les oreilles d'un lièvre à cent cinquante mètres et devient une légende.
Sa guerre est surtout faite de longues attentes et de marches forcées.
Constance ne recule jamais, coupe des rondins, creuse des tombes pour y déverser des cadavres, assiste à des funérailles expédiées en cinq minutes ainsi que d'autres divertissements raffinés comme le vol, l'alcool ou la bagarre .......
Elle rêve à sa vie d'avant , compte les étoiles, fuit à toute vitesse après une bataille féroce où elle a été blessée et dépouillée de son uniforme.
Nous suivons le parcours de Constance à travers les lettres adressées à Bartholomew, son cher amour,pensant le retrouver un jour..........
Elle traverse sans faiblir les charges de cavalerie , la fumée des batailles, le gémissement des blessés , le silence et la stupeur qui suivent.
Un trés bel ouvrage à l'écriture magistrale où la nature berce les âmes et se montre au gré des combats enchanteresse, carnassière, violente ou périlleuse !

Un beau portrait au souffle puissant , une forme d'épopée aux frontières du réel ,qui montre la fragilité des certitudes, où les esprits des morts , notamment la Mére de Constance viennent hanter les êtres qui se nourrissent de souvenirs à travers le parcours de cette femme- soldat , Constance,courageuse, frondeuse, farouche et lumineuse plongée dans le chaos de la guerre et les sordides coulisses des champs de bataille !
Merci à Marylin , mon amie de la Médiathéque qui m'a fait connaître cet ouvrage .
Je ne suis jamais déçue par les éditions "Actes Sud" et les romans étrangers ........
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Chattanooga, Guettysburgh, Appomatox...La guerre de Sécession fut une boucherie épouvantable, la première guerre moderne, si toutefois la guerre puisse être une chose moderne, avec tranchées, artillerie et mortalité importante sur les champs de bataille, et dans la population civile des régions touchées. Avec 750 000 morts en 4 ans, les cicatrices sont encore sensibles dans la mémoire des descendants des belligérants.

150 ans après, Laird Hunt pose sur ce fait fondateur de l'histoire de son pays un regard différent. Point de récit de stratégie, point de généraux célèbres, pas de développement idéologique sur l'esclavage, ou sur la nature de l'Etat fédéral, mais une tentative de reconstitution du quotidien des combattants de l'Union, par l'intermédiaire du destin de son héroïne engagée dans le conflit travestie en soldat. Ainsi le dit l'épouse du général, c'est comme si Pénélope allait faire le siège de Troie pendant qu'Ulysse restait à la ferme.

On est dans l'uniforme râpeux avec Constance, à manier un fusil Springfield sur le champ de bataille, où les soldats avancent au feu comme des soldats de Napoléon en se faisant décimer par l'artillerie. On voit et on ressent avec elle, qui est un excellent soldat, un tireur d'élite. C'est un chaos sans nom. Et puis il y a l'attente, le temps perdu à retrouver sa compagnie, et les longues marches qui épuisent des soldats faméliques, l'omniprésence de la mort. le récit nous emmène dans ces zones intermédiaires à l'arrière des lignes, peuplées de cadavres non enterrés, de fermes détruites, de bandes armées et déserteurs de tous bords.

C'est un excellent roman, très prenant, qui distille habilement le mystère d'un personnage singulier qui devient universel. Elle a une dureté ordinaire, acquise avec un mode de vie rude, et un passé fait de deuils . Elle nous emmène sur les routes dangereuses d'une Amérique en guerre pour une histoire de survie passionnante, dans laquelle les femmes sont loin d'être faibles et fragiles .


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« Le monde a tant de visages. » Constance, partie faire la guerre, en 1864 sous le drapeau de l'Union, fait cette constatation. Elle qui a eu l’audace de prendre la place de son homme, Bartholomew, plus doux, plus faible, moins bon tireur. Sous le nom d’Ash Thompson, un chapeau enfoncé sur les yeux, elle se présente dans un régiment de l’état voisin.
Les deux premiers chapitres remplissent déjà rempli les yeux d’étoiles tellement ils sont pleins, ronds et solides, comme il se doit pour un roman qui commence fort et bien.
Et la petite musique qui se lève ne me lâche plus jusqu’à la fin du roman. Très vite, la question ne se pose plus de savoir si Constance va être découverte, ou si elle va résister à cette succession d’épisodes traumatisants, tant le charme des mots est puissant.
Je copierais d’ailleurs bien volontiers seulement des citations, pour laisser ce texte magnifique parler. L’auteur réussit à donner un rythme hypnotique aux phrases, et plus encore à l’ensemble du texte, à coups de chapitres brefs, d’une force peu commune, sans oublier les nécessaires instants de soulagement. Au plus fort de la bataille ou lorsqu’elle doit traverser des champs de cadavres, Ash se remémore le parfum du carré de menthe de son jardin ou les jours où elle rasait son mari, et cette belle histoire d’amour, qui ne se contente pas de rester à l’arrière-plan, est une respiration aussi pour le lecteur.
La nature intacte, la terre natale, le passé reviennent aussi hanter la jeune femme. Au fur et à mesure du temps passé dans des lieux inhospitaliers, et des séquelles laissées par les combats et les rencontres infâmes, la question du retour possible, ou impossible, devient centrale et lancinante…
Je vous souhaite simplement de croiser la route de ce superbe roman auquel je ne rends pas forcément service avec cet avis désordonné.
Lien : https://lettresexpres.wordpr..
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"Neverhome" étrange et attachant roman qui traverse une guerre fratricide américaine, sans drapeau, sans colère, sans ressentiments. On pourrait le sous titrer "La ballade de Gallant Ash", chant polyphonique en l'honneur "d'une femme mariée, loin de chez elle, qui voyage avec une armée en temps de guerre" (je cite)
Une langue parlée et rude souvent, une écriture sobre faite d'échappées, de ruptures, détonnante et inattendue, où la somme des petits riens de la vie d'un camp militaire côtoient le funambule, le rêve, comme si des fantômes insouciants parcouraient au clair de lune un champ de bataille dévasté, où s'est déchaînée la folie meurtrière des armées. D'un côté la violence des hommes, le fracas des armes, les brutalités d'une armée de soudards, et d'un autre un récit lunaire avec la distanciation stendhalienne d'une voix intérieure.
Constance notre héroïne, fraîchement mariée part au front dans les armées de l'Union. Elle prend sous le nom d'Ash Tompson, la place de son mari souffreteux, pour mener un combat que sa conscience lui dicte ( Laird Hunt s'est il inspiré d' exemples authentiques de femmes qui ont combattu sous un déguisement d'homme dans les rangs du général Grant ? ) Faite de droiture et d'active fraîcheur dans un monde barbare, Ash croise entre autre un étonnant colonel qui médite sur la condition humaine, alors que le canon gronde, qui l'entretient de ses pensées, lui accorde son estime et lui propose un poste de tireur d'élite car Constance est une fine gâchette. Entre deux bivouacs, deux combats elle tient une correspondance avec Bartolomew son cher époux, avec qui elle réveille les souvenirs d'un bonheur qu'elle espère un jour retrouver quand la guerre sera finie.
Le récit du livre se déplie avec l'enchaînement de scènes de bataille chaotiques, l'enfer d'une maison de fous où elle est enfermée, quand elle est soupçonnée à tord d'espionnage de l'armée de l'Union, avec la corvée des latrines de campagne par grand froid, la torture d'une chaise pour mater sa nature rebelle. En alternance, "j'ai l'impression dit elle d'être sortie d'une histoire et entrer dans d'autres", Ash connait des moments de pur silence dans la beauté des lieux, où volent des colibris, quand le pain est chaud et que des fleurs coupées agrémentent une table de fortune. Et ses rencontres tout au long de son périple sont inattendues, contrastées par un mélange détonnant de tendresse, de sauvagerie, ainsi cette esclave noire en fuite dont on a violé la mère, qui lui refuse sa compagnie, le couteau sous la gorge. Ainsi l'infirmière Neva Thatcher qui la recueille et l'héberge avec une affection si peu désintéressée, qu'elle la dénoncera comme espionne quand Ash décidera de partir. Ainsi le merveilleux Weatherby et la femme du colonel qu'elle visite dans sa dernière fuite, juste avant de rejoindre sa ferme dans l'Indiana pour retrouver son cher mari. Cette femme au grand coeur ne sait pourtant que lui répondre quand Ash lui demande pourquoi son mari colonel devenu depuis général, n'a rien fait pour lever l'accusation de traîtrise et la faire libérer.
Il est de vrais moments qu'enchante la beauté sereine des choses simples, naturelles, délicates. Mais Ash revenant des combats, ne connaîtra pas le repos des braves, la paix des anges, quand elle devra flinguer à son retour cinq hommes qui en son absence sont venu occuper sa ferme et humilier Bartolomew devenu leur valet, réglant in fine un vieux contentieux de l'enfance qui remonte au suicide de sa mère et celui d'un viol que l'on n'efface pas.
Constance, femme guerrière est d'une telle rectitude morale que jamais la rancune, la méfiance, l'avide méchanceté prendront le pas sur la droiture de ses actes qui viennent simplement réparer une injustice faite à sa mère et l'outrage subi par Bartolomew. Sa dernière lettre est pour le colonel devenu général, où elle se repent de "l'avoir maudit lors de sa visite chez les fous". On croit rêver avec cette contrition. Aucune récrimination, aucun ressentiment sur la lâcheté présumée de ce chef militaire respecté, qui aurait pu la sauver. Elle est sans haine, elle efface vite les larmes, c'est un coeur loyal, une belle personne. Si elle prend parti c'est pour un combat désintéressé. Elle s'engage simplement pour la cause de l'Union car elle la croit juste. Un de ses rares étonnements est d'avoir été terrassée par la violence et la haine d'une esclave noire dont elle épousait pourtant la cause.
Gallant Ash ou le glamour féminin, à l'épreuve de la sauvagerie des guerres. le miroir inversé, élèvé à hauteur d'une vraie chanson de geste, de notre célèbre Scarlet O Hara , confinée dans les intrigues aristocratiques d'un planteur du Sud profond. Et Laird Hunt que je découvre avec ce roman ovationné par la presse, est rentré dans la cour des grands écrivains américains. Jim Harisson qui vient de nous quitter à dû l'adouber.
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Hanté par ses fantômes, le récit singulier d'une femme partie sur le front pendant la guerre de Sécession.

Jeune femme physiquement forte et pleine de ruse, avide de voyager et fine gâchette, Constance a laissé son cher époux, son doux ami Bartholomew, pendant la guerre de Sécession ; elle est devenue le soldat Ash Thompson, et a quitté leur bonheur et leur ferme dans l'Indiana pour aller combattre aux côtés des Bleus.

«J'étais forte, lui pas, ce fut donc moi qui partis au combat pour défendre la République. Je franchis la frontière, quittant l'Indiana pour l'Ohio. Vingt dollars, deux sandwiches au petit salé, accompagnés de biscuits, de corned-beef, de six pommes flétries, de sous-vêtements propres et aussi d'une couverture. Il y avait de la chaleur dans l'air donc je me mis en marche en bras de chemise, le chapeau bien enfoncé sur les yeux. Je n'étais pas la seule à chercher à m'engager et au bout d'un moment, nous étions toute une troupe. Les fermiers nous acclamaient au passage. Nous donnaient à manger. Leur meilleure place à l'ombre pour nous reposer. Ils jouaient pour nous de leurs violons : enfin tout ce que vous avez entendu dire sur les commencements, même si un an déjà avait passé depuis Fort Sumter, et que la première bataille de Bull Run avait eu lieu, que Shiloh avait emporté son lot d'âmes, et que c'en était fini des commencements, et pour de bon.»

Montée au sommet d'un arbre pour offrir sa veste à une jeune fille dont la chemise est déchirée, elle gagne le surnom de Gallant Ash, et réussit à dissimuler son identité réelle, en dépit des doutes de quelques-uns, et malgré la reconnaissance innée et immédiate de sa singularité par les rares autres femmes combattantes croisées au combat.

Racontant son aventure à Bartholomew dans ses lettres, en conversation intérieure permanente avec le fantôme de sa mère disparue, cette jeune femme puissante est jetée dans un univers broyé par la guerre, découvre l'enfer du champ de bataille, les terres transformées en mers funestes dépouillées et calcinées, et va éprouver tout ce qui meurt au départ et au retour de la guerre, au milieu des cadavres, des ossements et des âmes des disparus.

«Ma mère avait fait un voyage en train une fois et je lui avais dit que je voulais voyager comme elle. Filer à travers la campagne, flotter le long de ses eaux infinies en bateau. Je voulais, lui disais-je, m'allonger sous les étoiles et humer l'odeur d'autres brises. Boire à d'autres sources, éprouver d'autres chaleurs. Me tenir debout avec mes camarades sur les ruines d'antan. Aller en avant avec un millier d'autres. Planter le talon, durcir mon regard et ne pas m'enfuir.»

Finalement, le sens de ce récit d'une intensité rare, raconté par une Constance hantée par des rêves de séparation d'avec sa mère et son mari, par l'idée d'un retour impossible et de la fin du monde, par l'histoire de sa mère et par des souvenirs lourds qu'on devine peu à peu, ne sera révélé qu'à son retour dans l'Indiana.

«La terre sous mon corps semblait lourde. Comme si elle pouvait se mettre à chuchoter. Chuchoter quelque secret. Je m'endormis et rêvai que le monde était arrivé à sa fin.»

Retrouvez cette note de lecture sur mon blog ici :
https://charybde2.wordpress.com/2015/10/14/note-de-lecture-neverhome-laird-hunt/
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Etats-Unis, la guerre de Sécession fait rage. Constance, fermière dans l'Indiana, s'engage travestie en homme dans les troupes nordistes. N'écoutant que son courage et ses convictions, elle participe aux batailles et côtoie l'horreur. Son amour pour son mari et les souvenirs de son enfance l'aident à tenir. Il ne lui restera ensuite qu'à revenir chez elle. Mais à quel prix ?
Ces confessions sont émouvantes. C'est un roman qui nous parle de la difficulté de retourner à une vie normale après avoir vécu la guerre. Son originalité est de donner la parole à une oubliée de l'histoire. Environ quatre cent femmes, blanches et noires, ont participé à la guerre de Sécession. Elles ont occupé différents postes parfois au grand jour, parfois en secret. Certaines ont publié leurs mémoires. L'auteur s'en est inspiré pour créer le personnage de Constance dont la simplicité et l'humilité touchent au coeur.
Neverhome est un magnifique texte, écrit avec une touche de « nature writing » et raconté avec subtilité et pudeur.
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