Des pensées, des silhouettes et des événements passés lui traversent constamment l'esprit sans qu'il puisse rien y faire. Il a énormément de peine à distinguer les lieux et les époques. Il est partout et nulle part en un seul et même instant.
La tristesse s’abattait par vagues, la peur se mêlait à la colère et au sentiment d'impuissance.
Bientôt, cette histoire, les destins de ces gens, leurs vies emplies de deuils et de victoires, sombreraient dans l'oubli. Tout cela finirait par disparaître dans une éternité de silence, enterré dans les tombes d'un cimetière où personne ne viendrait à l'exception du vent sous lequel les brins d'herbe frissonnent.
Il sait que le grattement qu'il entend sous la terre n'est que le fruit de son imagination, les gémissements lointains qui lui parviennent sont des bruits qui n'existent qu'à l'intérieur de sa tête.Il connaît leur origine et ne les redoute pas.
Sa conscience sombre à nouveau dans le néant.
D'autres sons l'assaillent .des paroles qu'il a prononcées dans un passé lointain, avec lesquelles il a vécu toute sa vie , mais qu'il n'aurait jamais dû laisser sortir de sa bouche.
des mots tellement insignifiants.
Des mots tellement gigantesques.
Derrière eux, la maison vibre sous la chaleur de l'été. Devant eux, la lande est accueillante, elle sent bon l'herbe et les plantes. Il lève les yeux vers le rocher d'Urdarklettur et les failles de Hraevarskord, parés d'un air estival.
Il attrape la main de Bergur. Puis tous deux longent la rivière et entrent dans le matin limpide.
[…] Il avait en mémoire d’autres enquêtes sur lesquelles il avait travaillé et qui, chacune à sa manière, l’avaient marqué. Elles étaient nombreuses et de nature diverse, mais aucune d’entre elles ne l’avait conduit à pénétrer dans un cimetière à la faveur de la nuit, une bêche à la main.
[…] Erlendur défendait depuis longtemps une théorie selon laquelle, parmi toutes ces disparitions, aussi diverses soient-elles, se cachaient sans doute quelques meurtres ici et là.
"Il aimait s'allonger sur le dos, la tête posée sur son sac, les yeux levés vers les étoiles en méditant sur ces théories qui affirmaient que le monde et l'univers étaient encore en expansion. Il appréciait de regarder le ciel nocturne et son océan d'étoiles en pensant à ces échelles de grandeur qui dépassaient l'entendement. Cela reposait l'esprit et lui procurait un apaisement passager de pouvoir réfléchir à l'infiniment grand, au grand dessein".
Tout ce qu'il savait, c'est qu'à un moment de son existence, le temps s'était arrêté et il n'était jamais parvenu à le remettre en route.
"Il y a un moment et un lieu pour toute chose."