Citations sur Le livre du roi (54)
Il ne parlait jamais de son amour. On aurait dit qu’il voulait garder sa mémoire à l’abri des mots inutiles, lui qui, mieux que quiconque en connaissait le pouvoir.
(Métailié, p.114)
Je jetai un coup d'oeil par la fenêtre du train. Il m'était agréable de me déplacer avec ces lents serpents dans lesquels on peut se tenir debout et voir le paysage défiler, même quand il fait sombre et qu'il y a de l'orage et qu'il pleut, comme ce soir-là, et que le véhicule n'est pas de toute première qualité : un wagon qui date de l'entre-deux-guerres et qui a fait son temps.
C’est ainsi que je commençai à apprécier les grandioses récits de héros et de vengeances, d’amour, d’honneur et de droiture, les histoires qui parlent d’hommes entiers, de femmes subjuguantes, d’affrontements exaltants et de morts héroïques qui m’arrachaient des larmes. P 27
… les héros ont toujours été des hommes qui s’étaient trouvés confrontés à une situation où deux choix également mauvais s’offraient à eux.Je ne saurais décrire mon tourment lorsqu’il m’est apparu que, dans ces circonstance, les héros avaient toujours accompli des actes qui leur avaient valu d’intolérables tourments.
(Métailié, p.327)
Importants ou non, les livres voyagent partout. Bons ou mauvais, ils ne choisissent pas leurs propriétaires, pas plus que le genre de maison dans laquelle ils vont se retrouver ou l'étagère sur laquelle on les rangera.
Un jour ils atterriront sur la lune et le Livre du Roi en sera témoin, parce qu'il est notre histoire et aussi l'histoire de la terre et du temps.
Le professeur prit une profonde respiration.
-Il est lui-même le temps, Valdemar. Notre pauvre séjour sur terre n'a aucune importance, comparé au Livre du Roi. Nous n'en sommes que les dépositaires.
Il buvait sec et plus que quiconque de ma connaissance, mais malgré cela et le fait qu'il prisait, il pouvait en remontrer à des régiments en matière de savoir, de délicatesse et de sagesse.
-Ca t'est déjà arrivé de perdre un être cher , Valdemar ? demanda-t-il .
-Non , répondis-je , et je me rendis compte que je n'avais pas grand monde à regretter .
-C'est difficile à expliquer . Difficile à expliquer la solitude qui survient alors et la douleur d'avoir perdu une personne aimée dans la fleur de l'âge . Elle te manque tous les jours , et cela jusqu'à la fin de ta vie .
-Je peux l'imaginer .
-Il n'y a rien de plus douloureux . C'est une part de soi qui meurt , mais cette part n'est pas enterrée , elle est au contraire omniprésente . Elle te suit où que tu ailles et entretient le souvenir . C'est la mort qui habite en toi . Et , bien que tu saches que la vie ne te doit rien et qu'on ne peut rien exiger d'elle , on ne se débarrasse jamais de ce deuil et de ce manque .
Quand je regarde en arrière et que je repense aux événements de cet automne-là, j'ai l'impression d'entendre le sourd murmure de la ville, de voir devant moi l'ancien campus de Copenhague avec sa Tour Ronde et la Petite Pharmacie, de respirer l'odeur des hot-dogs sur la place de l’Hôtel de Ville en me laissant porter par le courant de la foule sur le Stroget. Je crois que je n'ai jamais pu surmonter ma première impression de cette ville. Tout ce que mes yeux voyaient me procurait une douce ivresse et quelque chose me disait que, jusqu’à la fin de mes jours, mes chemins repasseraient par Copenhague.
Importants ou non, les livres voyagent partout. Bons ou mauvais, ils ne choisissent pas leurs propriétaires, pas plus que le genre de maison dans laquelle ils vont se retrouver ou l'étagère sur laquelle on les rangera.
P 227