Passage des ombres nous instruit sur la situation de l'Islande pendant la seconde guerre mondiale. Dès 1940, le Royaume Uni, qui veut empêcher les allemands d'occuper l'Islande, envoie 25 000 soldats occuper l'île qui compte alors 120 000 habitants. L'Islande est ensuite occupée par 40 000 soldats américains en août 1941 qui s'installent dans les bases britanniques et en construisent de nouvelles. Bien sûr la présence sur le sol islandais de cet important contingent de soldats étrangers amène des rapprochements entre les soldats, éloignés de leur famille, et des jeunes femmes islandaises. Les soldats recherchent d'abord du sexe facile, faisant miroiter à leurs victimes qu'ils se marieraient après la guerre et qu'ils les emmèneraient dans ce pays qui fait rêver qu'est les États-Unis! Car ces flirts ne sont pas sans conséquences : d'abord des tensions entre les jeunes femmes concernées et leurs parents et puis aussi des naissances non désirées (la pilule contraceptive n'a été inventée qu'en 1955) ou des avortements effectués par des faiseuses d'anges.
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L'auteur nous fait suivre deux enquêtes qui se déroulent à 60 ans d'intervalle. La première, pendant la seconde guerre mondiale. Deux policiers, Thorson et Flovent enquêtent sur le meurtre d'une jeune femme, Rosamunda, dont le corps a été découvert près du Théâtre national de Reykjavik par un couple, une jeune femme islandaise et un sergent américain. La deuxième enquête est menée de nos jours par Konrad, retraité de la police criminelle de Reykjavik. Elle concerne le meurtre d'un vieil homme à son domicile, Thordason. Parmi les affaires du vieil homme, Konrad trouve des coupures de journaux qui relatent le meurtre de Rosamunda pendant la guerre. Pourquoi ce Thordason, qui parait bien inoffensif, a-t-il été assassiné? Pourquoi s'intéressait-il au meurtre du Théâtre national? Petit à petit des liens vont apparaître entre les deux affaires et Konrad va alors se replonger dans les circonstances de la mort de Rosamunda. Mais une grande partie des dossiers a disparu.
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C'est un roman essentiellement d'enquêtes policières où la vérité va apparaître progressivement. L'auteur a construit habilement son récit avec une alternance passé - présent parfaitement maîtrisée qui permet une très bonne compréhension du récit. C'est un roman profondément ancré dans la réalité islandaise avec d'une part la "situation" (expliquée plus haut) et d'autre part les références faites aux elfes, ces personnages mythiques semi divins associés à la fertilité, héros de contes traditionnels islandais. Deux jeunes femmes agressées et violées pendant la guerre ont affirmé à leur entourage que ce sont les elfes qui leur ont fait subir ça. Enfin, notons que c'est le dernier volume de la trilogie des ombres, avec Konrad comme héros, et l'activité peu glorieuse de son père, un charlatan qui associé à un médium, a exploité la crédulité d'Islandais prêts à croire à la communication avec l'au delà. Au final, un bon
Indridason, mais beaucoup de lecteurs regrettent Erlendur.