Les Aborigènes d'Australie nous ont tous fait rêver, peuple symbole de la vie de nos lointains ancêtres, vivant en harmonie avec le milieu naturel. Alors que l'écologie s'impose de nouveau à nous, comme le boomerang de l'agriculture et de l'élevage respectueux de la Terre pratiqués par nos aïeux, des enseignements sont à rechercher dans les expériences des habitants du bush austral...
A travers ses romans-policiers,
Arthur Upfield, nous a livré naguère quelques éléments de leur culture. Au fil de ses enquêtes, on découvre des natifs - gravitant autour du célèbre inspecteur Bony - pratiquant encore des rites ancestraux. Mais ces récits montrent aussi la fragilité de leur mode de vie ancestral face à l'apport occidental triomphant !
Que reste-t-il des connaissances que les premiers habitants de la Grande Ile ont développées depuis quelques 50 000 ans ?
Ce grand livre écrit par
Jennifer Isaacs nous rassure sur la pérennité des savoirs immémoriaux des Aborigènes. Cette auteure a d'abord étudié l'anthropologie et l'histoire à l'Université de Sydney. Ensuite, elle a mis en oeuvre des actions novatrices au service des Aborigènes tout en recueillant, avec leur plein accord, des éléments précieux de leur culture traditionnelle. Deux ethnies d'Australie (les Rirratjingu et les Thanaquith) l'ont faite membre à part entière de leur communauté !
Comme s'il devenait soudain ami de tel ou tel groupe de chasseurs-cueilleurs du bush, le lecteur découvre avec naturel la vie quotidienne sur le « continent du Gondwana » : traversant les forêts, les savanes arborées et les dunes côtières, voire des hauteurs rocheuses, chacun peut se pencher sur les plantes, les fruits, les graines et les tubercules exotiques, appétissants, colorés, juteux, sans, hélas, pouvoir les goûter !
Les photographies originales montrent le milieu, et leurs occupants, dont le beau regard, sans aucun artifice, montre que l'écrivain - photographe est avec eux, en ce peuple, partageant leur quotidien.
On suit au fil des pages la traque des grands mammifères par les hommes, la pêche, les cueillettes et récoltes dans la brousse par les femmes (légumes, oeufs, coquillages...). Regardez ces enfants qui chassent de petits marsupiaux, des varans dans leur terrier...
L'auteure nous présente les règles et tabous qui régissent ces activités. Les techniques de prédation et de cuisson raviront plus d'un lecteur se posant des questions sur la vie avant l'abattoir moderne et le micro-ondes !
Quel plaisir de découvrir des baies succulentes ou des graines nourrissantes parfois au creux d'un vallon d'un désert torride !
Les qualités alimentaires et les vertus médicinales de nombreux végétaux sont détaillés et vous aurez plus d'une fois, au fil des chapitres, envie de sauter dans un avion pour y quêter le remède que vous cherchiez depuis si longtemps !
L'ingéniosité humaine se révèle sans cesse : on rapporte le miel au campement dans un joli récipient d'écorce fabriqué sur le lieu de la récolte !
Si les lapins, cochons et buffles introduits par les européens sont aussi consommés, les aborigènes raffolent des mets disponibles ici depuis toujours, y compris les larves et les insectes d'aspect plutôt répugnant pour nous !
En plus de la pharmacopée, extraordinaire, on trouvera les utilisations en cosmétique de feuilles et huiles diverses.
Un long répertoire résume les données concernant les principales plantes médicinales : noms vernaculaires et scientifiques, milieu naturel et utilisations.
Avec courage, l'anthropologue - devenue aborigène - a rédigé une riche biographie et un index très précis.
Ouvrez vite cet ouvrage où certaines photographies (telles les xanthorrhées du bush, la main d'un jeune aborigène prélevant l'écorce d'un Buchamania arborescens en vue d'un traitement oculaire...) sont autant d'oeuvres artistiques !