le roman débute par: « En juillet 1888, aux alentours de la Saint Jacques, Oncle me fit grosse. »
Peu d'archives existent sur l'enfance d'
Adolf Hitler.
Régis Jauffret utilise la fiction pour raconter les 9 mois de grossesse de Klara, sa mère.
Comme de nombreuses personnes, j'ai toujours été intriguée par la nature des parents de personnes qui se révèlent être des monstres.
Régis Jauffret répond à cette question dans ce texte très fort, violent, difficile à lire, mais édifiant.
J'ai lu l'an dernier « L'ange de Munich » de Fabio Massimi et j'y ai trouvé des correspondances , des éclairages.
Deux livres passionnants sur notre Histoire. Klara est la domestique de son oncle. Agent des douanes, il l'épousera après la mort de sa première femme, avec une dispense de l'église catholique, puisqu'elle est sa nièce.
Le texte est à la première personne, écrit par Klara. Issue d'un milieu très modeste, sans instruction, elle raconte un mariage où la femme est soumise aux besoins du mari dans des relations qui relèvent du viol. Cantonnée aux tâches domestiques, elle n'a aucune liberté.
L'auteur ajoute le poids de la religion par le biais d'un curé pervers, obscurantiste qui fait de Klara une dévote insupportable, obsédée par le péché, à la limite de la folie. Elle se confesse quasiment tous les jours et parfois deux fois dans la même journée.
La soeur de Klara, un peu simplette qui vit avec eux, épie sa soeur sur ordre du curé et lui rapporte quotidiennement les péchés de Klara réels ou inventés.
Quant au mari, le personnage est odieux. Il méprise les femmes, rêve d'un empire autrichien puissant et d'une société où seuls subsistent les plus forts.
Régis Jauffret sème les éléments qui fabriqueront le monstre, même s'il ne sera pas le seul.
Le texte m'a surtout frappé par l'entremêlement de scènes de la Shoah aux pensées de Klara, rendant la lecture malaisée. le nom de Hitler n'étant jamais écrit dans le texte, ces visions ressemblent à des prémonitions alors que ce bébé n'est pas encore né, innocent de tout péché.
Klara a déjà perdu deux enfants du Croup. Ce bébé, elle l'aime, craint pour sa vie, rêve d'en faire un saint ou un soldat et espère qu'il lui sera reconnaissant de lui avoir donné la vie.
Le roman se termine à sa naissance. L' Histoire reste à venir.
« Les mères demeureront toujours comptables des péchés commis plus tard par l'enfant qu'elles ont porté. On nous accusera d'avoir concocté neuf mois durant un assassin, un monstre »