Un énorme coup de coeur pour ce roman qui m'a habitée, qui m'a hantée.
Je découvre l'univers, aérien et mystérieux de cette auteure qui nous embarque dans une histoire originale et intrigante, nous plonge dans l'Amsterdam du XVII ème siècle puis nous balade en Allemagne de Hanovre à Berlin puis à Paris.
La femme-écrevisse; une gravure qui depuis 4 siècles change de ville, de propriétaire, de salon. Elle est adulée, adorée, jalousée. Repoussante par sa tête de monstre, intrigante par son corps de femme nue.
La créature vit, elle avance à reculon, se terre dans son trou et observe. Elle magnétise son créateur, le plus grand peintre de l'âge d'or d'Amsterdam '' Rembrandt'' mais aussi des générations d'une grande famille bourgeoise ''les von Hauser''. D'abord, Margot veuve depuis peu, au service du plus grand peintre de l'époque. Elle s'occupe de son fils Titus, s'occupe de lui au lit, l'observe dans son atelier, contemple ses eaux-fortes, ses fusains mais est surtout absorbée par cette gravure troublante, happée par son appel, elle finit au ''Gouda'' enfermée où elle meurt.
Puis, au XXI ème siècle, Grégoire va la contempler à la salle 33 du musée du Louvre, elle l'obsède, s'incruste en lui comme elle l'a fait le siècle d'avant avec son grand père ''Ferdinand'' qui l'a vu la première fois dans le bureau de son père à Saint pétersbourg.
Une histoire écrite au fusain, en relief, parfois lumineuse, d'autre brumeuse, une ambiance vaporeuse y règne, où l'esprit se disperse, où une fêlure finit par briser les âmes.
Se cacher, s'effacer de la vue de cette femme écrevisse, se soustraire aux bruits de ses pinces, à ses murmures incessants. Fuir cette sensibilité, cette folie héritée, ce mal qui persiste depuis longtemps, qui tient tête, exactement comme cette écrevisse marbrée parthénogénétique, qui n'en finit pas de donner, de se multiplier, qui s'ancre au sol, y fait ses racines. S'accepter à défaut de se libérer devient primordial.
J'ai adoré cette lecture, cette écriture concise et fouillée emprunte d'un voile mystérieux enveloppant les différents personnages.
Séduite aussi par ce style et les innombrables références à l'art, au cinema muet allemand, à la mythologie grecque.
Une lecture indispensable de cette rentrée littéraire. Foncez les yeux fermés.
La femme écrevisse ne vous laissera pas indifférent.
Lu dans le cadre des explorateurs de la rentrée 2020 de lecteurs.com