Molosses

- Je ne sais pas si j'appellerais ça névrose
Un sourire vint adoucir ses traits
- Comment tu l'appellerais, dans ce cas ?
- Autrefois, Lucian parlait de SSPT, Syndrome de stress et pétoche sur le terrain.
...
- Et quels sont exactement les symptômes de ce SSPT ?
- Ils sont nombreux, le premier étant une envie très forte de trouver un autre moyen de gagner sa vie, de préférence un contexte professionnel où les gens n'essaient pas de vous couper en rondelles, en cubes, en lamelles et de vous cuire.
- Ça parait sensé.

- Ozzie, je suis vraiment content que vous ayez décidé de prendre les choses de cette manière. Je crois qu'ainsi beaucoup de susceptibilités seront ménagés.
Il continua à m'observer, et je pensai aux dégâts que l'on causait dans la vie simplement en étant soi-même et en se levant le matin.

- Quelle est la situation qui coïncide avec le commencement de ces symptômes ?
- Probablement le Combat des guerriers invisibles, en octobre.
- Le Combat des guerriers invisibles ?
- Ouaip, ou alors, c'est quand je me suis fait piétiner par un cheval, cisailler les jambes par un Vietnamien, écrasé par un Indien de 2,10 m, ou quand je suis tombé du pare-chocs arrière d'une voiture à Philadelphie, ou que je me suis battu avec un camé, ou que j'ai été bouffé par le gel dans la montagne. (Il poursuivit son examen, le visage inquiet.) Cette dernière année a été assez chargée, comme ne cesse de me le rappeler Isaac Bloomfield.

“On entendait un morceau de boogie western avec un accompagnement à l’accordéon à faire cloquer la peinture aux murs.”

Lucian et moi sursautâmes.
La Nation Cheyenne se retourna pour nous regarder , ses yeux noirs engloutissant les alentours comme une paire de puisards. Sa tête se retourna vers l'endroit où tout l'épisode s'était déroulé.
- Vous les Blancs, vous vous laissez trop entrainer par ces choses là

Henry se leva et me regarda.
- En ma qualité d'éclaireur indien qui a ta confiance, il est important que je te prévienne: tu es désormais sur un terrain terriblement glissant .

On était lundi, la deuxième semaine de février, et les gens parlaient moins, parce que le vent leur arrachait les paroles de la bouche et les expédiait directement jusqu’au Nebraska. J’avais l’image de toutes les conversations inachevées du Wyoming, empilées le long des talus jusqu’à ce que la neige les étouffe et qu’elles s’enfoncent dans la terre noire. Peut-être renaissaient-elles au printemps comme les fleurs des champs, mais j’en doutais.

Pour poser mon visage, j'avais un oreiller rond en forme de donut ; c'était un objet dont Ruby avait fait l'acquisition à une période où elle avait eu maille à partir avec des hémorroïdes. Ce qui ne cessait d'alimenter les quolibets de tout le personnel du Bureau du shérif du comté d'Absaroka.

- Vous avez vendu un fusil à un homme pieds nus et en peignoir ?

Elle avait appris que, pour fasciner les hommes, il fallait leur accorder la plus grande attention. Cela ne faisait que dix minutes que j’étais avec Gina dans le camion et j’avais déjà la tête qui tournait ; cela dit, la raison en était peut-être les vapeurs bien peu orthodoxes qui se dégageaient de mes deux passagers.