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sur 139 notes
Délicate et poétique, la forme littéraire dont use l'autrice Han Kang est aux antipodes du massacre de centaines de milliers de civils (10% de la population pour la seule île de Jeju) à la fin des années quarante, en Corée. Les traumatismes circulent de génération en génération, et il aura fallu des dizaines d'années avant que ne commence un travail de reconnaissance de cette extermination. Les fantômes du passé sont bien loin d'avoir trouvé le repos, et Han Kang s'essaie à emprunter les voies de la littérature pour adoucir le sort des vivants.
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Ce récit de la coréenne Han Kang vacille constamment entre le réel et le fantastique, sème le trouble dans nos perceptions, nos impressions, nos certitudes. Si l'on croit lire d'abord une histoire d'amitié qui conduit la narratrice Gyeongha sur l'île de Jeju, dans une mission de sauvetage de l'oiseau blanc de son amie, on se retrouve soudain entourés des fantômes du massacre advenu sur cette même île dans les années 1948-1949, résurgences des souvenirs de familles massacrées et traumatisées.

Comme Gyeongha lorsqu'elle tente de rejoindre la maison de son amie, j'ai eu envie de me perdre, de me laisser ensevelir par ce récit onirique et mélancolique, qui invite autant à la contemplation de la nature qu'à celle des cicatrices toujours vives que le passé traumatique de l'histoire coréenne a laissé dans la mémoire collective. Mais j'y ai finalement trouvé mon chemin vers une oeuvre unique et marquante, qui a creusé un sillon durable dans mon imaginaire, enneigé et solitaire.

La voix de Han Kang m'a profondément touchée.

Une envoûtante lecture que j'ai adorée!
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Voici un roman que je m'apprêtais à lire posément mais que j'ai presque lu d'une traite tant je me suis laissé emporter par l'histoire de Gyeongha et d'Inseon, deux amies dont les douleurs du passé se font écho et réunies par un rêve transformé en projet.

L'histoire s'ouvre sur le rêve de Gyeongha, la narratrice : elle est au milieu d'une plage plantée de milliers d'arbres noirs sans cime ni branche, de tailles différentes, érigés comme des pierres tombales. Il neige à gros flocons et l'eau se met à monter sous ses pieds. Impossible de déplacer tous ces ossements avant que la mer ne les recouvre.

Elle est autrice et vit seule à Séoul, ce rêve qui la hante est apparu lors de l'écriture de son dernier roman. Contre toute attente, sa parution n'a pas apaisé ses cauchemars. Son désir d'écriture est à présent envolé.
Alors qu'elle erre dans les rues de Séoul dans un état de profonde déprime, elle reçoit un texto de son amie Inseon la priant de rejoindre sans tarder l'hôpital où elle séjourne après un accident de tronçonneuse. Là, Inseon demande à son amie de se rendre chez elle sur l'île de Jeju pour nourrir son perroquet blanc resté seul après l'accident. Malgré la tempête de neige et une migraine atroce, Gyenongha s'envole sur l'île.

Le passé et le présent, le réel et l'irréel s'entremêlent dans ce récit qui se dévoile à la lueur d'une bougie et sous les battements d'ailes d'un oiseau revenu du royaume des morts, nous révélant petit à petit le passé douloureux de la famille d'Inseon sur cette île coréenne où une purge anticommuniste a entraîné le massacre de milliers de personnes à la fin des années 40.

Dans une écriture onirique et délicate, l'autrice nous emmène à la rencontre de trois femmes d'une volonté à toute épreuve dans leur quête de vérité et de mémoire. Ce roman empreint de symbolisme est à la fois douloureux par son histoire et lumineux par l'amour et l'amitié qu'il transporte et par les voies qu'il ouvre vers la résilience.

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Gyeongha est usée. le dernier livre qu'elle a écrit, retraçant des massacres commis dans son pays, la Corée, l'a laissée exsangue, solitaire et malade.

Mais lorsque son amie, Inseon, lui demande de la rejoindre dans un hôpital de Séoul, elle se précipite au chevet de la jeune femme.

Inseon, ébéniste de son état, est blessée et lui demande d'aller s'occuper de son perroquet, laissé seul à son domicile.

De tout quitter à l'instant, pour tenter de sauver l'oiseau qui n'a plus rien à boire et à manger. D'affronter une tempête de neige pour sauver ce petit volatile.

Gyeongha se sent dépassée par cette quête qui lui paraît futile mais par amitié, elle va affronter les éléments pour cette mission de sauvetage.

Ce faisant, elle va devoir se confronter aux fantômes qui ne cessent de la hanter depuis son dernier livre. Des souvenirs qui hantent aussi son amie, Inseon.

Ce roman oscille entre passé et présent. Il confronte le lecteur à une période tragique de l'histoire contemporaine coréenne.

Il met en lumière la silence de l'Etat coréen et les pressions infligées aux proches des disparus pour ne pas rechercher la vérité.

Mais comment construire une vie lorsqu'on a été témoin de massacres ? Lorsqu'on reste sans nouvelles de proches disparus ?

Comment une société peut-elle faire l'économie d un travail de mémoire ?

Autant de questionnements qui irriguent ces pages avec une plume poétique. L'autrice interroge les silences familiaux, les non-dits et les blessures du passé qui ne peuvent guérir si elles ne sont pas affrontées. Un roman que j'ai trouvé touchant et réussi.
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Une lecture déroutante mais poétique.
La lecture de ce roman a été particulière et m'a un peu décontenancé (même si je savais un peu à quoi m'attendre avant de le commencer).
La première partie est très mélancolique et poétique avec l'arrivée de Gyeongha sur l'île de Jeju et l'évocation de ses souvenirs en lien avec son amie Inseon, les descriptions de la nature et en particulier de la neige sont très belles.

« Chaque fois qu'il neige, tout me revient. J'ai beau essayer de ne pas y penser, cette chose ressurgit sans arrêt. »

La seconde partie est plus difficile à lire et quelque peu éprouvante, on ne comprend pas tout car on nage entre réalité, fantasmes, cauchemars et souvenirs de la narratrice. Il faut se laisser porter par ce récit onirique, cette atmosphère particulière et cette sensation de froid présente tout au long du récit.
La lecture est aussi rendue complexe par le fait que ce livre aborde un pan tragique et méconnue de l'histoire coréenne (assassinat de 30 000 civils entre1948 et 1949, parce que soupçonnés d'être communistes) et nécessite quelques connaissances sur l'histoire de la Corée dans ces années-là.
Au final, je ne suis pas sûre d'avoir tout compris mais j'ai apprécié cette lecture et le style de l'auteure.
Un roman contre l'oubli et un hommage vibrant aux victimes et à leur famille toujours dans l'attente de réponse.
Merci à Babelio et aux éditions Grasset pour ce livre reçu dans le cadre d'une opération Masse Critique.
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En Corée du sud, Gyeonghan, une écrivaine un peu mélancolique, reçoit un appel d'une de ses très bonnes amies, Inseon. Celle ci a eu un accident, elle a un service à lui demander. Il faut que Gyeonghan entreprenne un voyage de plusieurs heures en pleine tempête de neige pour aller dans la maison de Ineon, sur l'île de Jeju, pour nourrir le perroquet. L'oiseau ne peut pas survivre plus de deux jours seul. Gyeonghan part donc affronter la tempête. Arrivée là bas épuisée, elle a alors des hallucinations et tombe sur des papiers qui l'oblige à affronter l'horrible réalité de l'île sur laquelle elle est. Des enfants, des femmes, des hommes ont été massacrés par milliers à la fin des années 40.
Je ressors totalement chamboulée de ce roman. Déjà parce que j'ai trouvé très beau, très poétique et en même temps très sincère sur la réalité de l'histoire de la Corée. Histoire que je ne connaissais pas du tout, que je découvre ici, et qui me donne envie d'en apprendre d'avantage sur l'histoire de ce pays que nous connaissons au final assez peu en France.
Merci à Netgalley et Grasset pour cette lecture.
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Gyeonga, écrivaine vivant à Séoul, reçoit de son amie Iseon un sms. Elle s'est sectionné deux doigts en travaillant le bois, et a été rapatriée d'urgence depuis l'île de Jeju en abandonnant son perroquet. Elle conjure Gyeonga de s'embarquer pour son île afin de sauver son oiseau.

Juste avant cette entrevue, Gyeonga a fait un rêve particulier, celui d'une forêt d'arbres noirs sans ramure, plantée dans un champ de neige.

La neige, c'est elle qui rend sa mission quasi impossible. Après l'atterrissage, Gyeonga peine à trouver un autocar pour se rendre dans le village isolé d'Iseon. C'est ensuite dans la tempête de neige qu'elle doit retrouver un chemin devenu invisible jusqu'à la bâtisse, où les fantômes de la famille d'Iseon l'attendent.

Ce roman onirique, je m'y suis enfoncée très doucement, comme dans une légère poudreuse. Comme Gyeonga, j'ai ensuite senti chaque flocon fondre sur ma peau et, avec la nuit tombée, me glacer le coeur.

Han Kang se saisit de cette histoire d'amitié et de projet artistique irrésolu pour aborder un pan méconnu de l'histoire coréenne : celle du massacre de l'île de Jeju après le ralliement d'une partie de ses habitants au communisme. Exercice périlleux et tout à fait réussi, en ayant évité les écueils du roman historique barbant et du romanesque mal placé, le résultat est délicat et vrai comme un flocon se déposant devant vos yeux.
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C'est un titre très curieux, non dépourvu de qualités, mais qui me laisse dubitative. Han Kang a déjà publié aux Éditions Zulma, ainsi qu'à feu Les Editions du Serpent à Plume. La littérature sud-coréenne me laisse, à chaque fois, l'impression de pénétrer dans un pays différent, tellement les univers des autrices (il se trouve donc que je n'ai lu que des autrices sud-coréennes) sont dissemblables. L'autrice Han Kang est multiprimée dans son pays aussi bien qu'à l'international, j'ai donc décidé de tenter l'aventure avec la lecture du dernier roman de cette autrice largement reconnue par ses pairs dans son propre pays comme à l'international.

Dubitative, parce que pour moi, ce roman est composé de plusieurs parties dont je ne suis pas arrivée à faire le lien, et que j'ai fini le roman avec quelques questions qui n'ont pas trouvé de réponse. Plein de qualités, car il évoque une page d'histoire de la Corée du Sud, dont il faut dire que je n'ai absolument aucune notion ou repère, pas la plus belle des pages certes, pas celle que l'on se remémore avec nostalgie, bien au contraire. Mais une page marquée au fer rouge dans l'histoire du pays et les arbres généalogiques d'une partie des Sud-Coréens. Ce roman, je le disais, est composé de trois parties : Oiseaux/Nuits/Flammes. La personnage principale est une autrice qui raconte un rêve fait cinq ans avant le fil narratif qui de déroule en 2019, deux mois après la parution de son livre dont le sujet est un massacre dans une ville, dont on ne sait pas le nom, dans les premières dizaines de pages du moins. Un rêve menaçant, entre neige et mer, qui l'avait profondément marquée, mais qu'elle avait remisé dans un coin de son cerveau. Un présent, constellé de deuils récents, plongée dans une solitude absolue, sans plus aucune famille, un travail perdu, comme l'envie d'écrire, dans un appartement d'une banlieue de Séoul : c'est la léthargie dans laquelle s'est lentement enfoncée la femme, en train de composer son testament. Jusqu'à ce qu'elle retrouve la force de revenir sur ce qui est l'une des causes de cette apathie : la consultation des documents pour les besoins de son livre en 2012. Des réminiscences de massacres de toute une frange de la population dite communiste post-Seconde Guerre mondiale.

Gyeongha, la narratrice, vit dans un rêve – qui tourne au cauchemar bien souvent – éveillé, celui d'une réalité perturbée par des éléments sortis tout droit des documents dont elle s'est servie pour rédiger son livre, et c'est déroutant. Ce procédé est utilisé tout au long du livre, brouillant les repères narratifs sur la temporalité ou bien même sur le bien-fondé de la réalité que l'on présente. On apprend très progressivement les événements auxquels se réfère l'autrice de fiction, quelques éléments révélés ici et là, nous, lecteur prenant progressivement compte de l'horreur qui se révèle au fur et à mesure.

C'est la réapparition dans sa vie de son amie, photographe, Inseon, qui va faire office de déclencheur à la résurgence, celle qui habite l'île de Jeju, située au sud du pays, où a lieu en 1948 le soulèvement éponyme : une insurrection qui a vu près de 30 000 sud-coréens être massacrés par l'armée en charge de réprimer l'insurrection. Et c'est en retournant là-bas, chez son amie dont les aïeux comptent parmi ces disparus, sur les lieux du crime commis soixante-dix ans plus tôt que le récit de cette révolte, et des assassinats méthodiques et froids des insurgés ressurgissent et s'emparent de la réalité. Impossibles Adieux, c'est aussi dans ce livre le projet des deux amies, l'une photographe, l'autre journaliste, pour établir une oeuvre d'art, pour commémorer les disparus, qui restent d'une façon ou d'une autre rattachés à cette réalité.

On a perdu le curseur de la mort, à ce point de l'histoire, et de la réalité, je ne suis pas vraiment parvenue à comprendre ce que l'autrice a voulu faire de Inséon, une entité dédoublée, le corps à l'hôpital, l'esprit en compagnie de son amie chez elle à Jeju ? Sans doute, faut-il y voir la tentative de se sortir de leur propre réclusion mentale, pour elle comme pour son amie, aux côtés de ces ombres hantant mémoires, lieux et esprits, ombres d'enfants, femmes et hommes qui n'ont jamais reçu de sépulture, rendant de ce fait ces Adieux impossibles. Un hommage essentiel qui leur permet de renouer.

Si le texte peut se voir comme une mise en abyme de ce que l'autrice sud-coréenne fait de son texte, un hommage aux personnes massacrées puis oubliées par tous, ce qui m'a surtout marquée, en dehors naturellement de cet abyme dans l'histoire coréenne, c'est cette écriture délicate, toujours sur le fil, peut-être un peu trop allusive certaines fois, mais toujours élégante, mêmes dans les moments les plus rudes de la narration.
















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Tout commence avec un cauchemar. La neige. Un vaste champ de troncs d'arbres comme des sépultures. Gyeongha, la narratrice, s'y promène. La mer à l'horizon. La marée qui galope et vient tout engloutir.

Un cauchemar qui la hante depuis l'écriture d'un livre sur un massacre et des deuils personnels.

Un cauchemar qui sert de trame de fond à l'histoire qui s'ouvre quand Gyeongha reçoit un jour de décembre un texto d'Inseon, une amie photographe qu'elle a rencontrée au début de sa carrière de journaliste. Hospitalisée pour une grave blessure à la main, Inseon demande à Gyeongha de se rendre sur son île natale, l'île de Jeju, pour nourrir son perroquet auquel elle tient beaucoup.

Aussi folle que paraît cette requête, Gyeongha part. C'est alors qu'elle essuie une énorme tempête de neige. Et si le cauchemar refaisait surface ?

Sur l'île de Jeju, Gyeongha déterre d'autres fantômes, ceux de la mère d'Inseon. Elle lève le voile sur des morts qu'on a trop longtemps occultés : les massacres de civils après le soulèvement du 3 avril 1948. Des dizaines de milliers d'hommes, de femmes, d'enfants massacrés par l'armée sud-coréenne sur plusieurs mois, plusieurs années même. La chape de plomb sur leur sort. L'impossibilité du deuil pour les survivants.

Lire « Impossibles adieux » est loin d'être simple : la narration est assez complexe avec différentes temporalités. Nous nous demandons sans cesse, surtout à partir de la seconde partie du roman, si nous sommes dans la réalité ou le rêve. le flou est maintenu volontairement. Beaucoup de choses restent en suspens. Il faut vraiment se laisser porter par l'histoire, se laisser porter par ce froid intense et les errances, se laisser porter par l'écriture splendide de l'autrice.

Dire, écrire. Se faire violence. Avoir mal comme une aiguille que l'on plante dans les chairs d'un doigt amputé pour que le sang circule encore. Pour que la vie circule encore, même avec ce qui a disparu.

C'est durant cette nuit intense de neige épaisse que jaillit la flamme, que palpite le coeur, que la mémoire lutte contre l'oubli.
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Roman un peu difficile à critiquer pour moi car si j'ai aimé le rappel historique sur les massacres perpétrés en 1948/49, l'implication psychologique sur la population, et ce sur plusieurs générations, le récit a été beaucoup plus compliqué à suivre et à comprendre.
On sent qu'une tragédie a touché Gyeongha au début du roman mais on ne sait pas trop laquelle même si on la devine. Quand Inseon lui envoie un message, elle n'hésite pas et part aussitôt à l'hôpital rejoindre son amie. Celle-ci est dans l'incapacité de retourner dans sa maison pendant plusieurs semaines et son oiseau doit absolument être abreuvé et nourri. Ce service, Gyeongha va lui rendre et part directement, en urgence sur l'île de Jeju où réside Inseon.
C'est donc le récit d'une amitié très forte mais aussi d'un pan tragique de l'Histoire Coréenne, les massacres de Jeju entre autres après la 2ème Guerre Mondiale. Mais tout est racontée avec un appel incroyable à l'imagination et il est parfois difficile pour le lecteur/trice de garder le fil de l'histoire.
J'avoue avoir eu un peu de mal à suivre parfois mais c'est malgré tout plutôt poétique et ce malgré un sujet très dur. Ce rappel historique est fort et ce récit de l'histoire de la famille d'Inseon montre bien l'impact de ces tragédies sur plusieurs générations et surtout la force de ces familles pour garder cette mémoire et lutter contre l'oubli du temps.
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