Ne lisant pas les Bernie Gunther dans l'ordre, il se trouve que j'ai lu "
Hôtel Adlon" en bout de course (après "
Bleu de Prusse"). Peut-être étais-je un peu fatigué par l'auteur ou son héros, mais ce roman m'a un peu déçu.
Plus qu'un roman policier, "
Hôtel Adlon" est un roman d'ambiance ayant pour thème la vengeance (20 ans plus tard!). L'aspect policier y tient une place assez marginale. Ce qui explique que je l'ai lu un peu tardivement.
Le roman a pour cadre le Berlin de 1934 à un moment où les persécutions antisémites sont quasiment institutionnalisées puis le Cuba de 1954 alors que l'île est un gigantesque lupanar américain. Les ambiances respectives de ces deux pays à deux époques différentes sont bien reconstituées. Mais les intrigues sont un peu faiblardes et ne contribuent qu'à servir de prétexte à la présentation assez détaillée d'une ambiance, objectif d'ailleurs réussi.
On voit au final que
Philip Kerr se fait ici plaisir en faisant étalage de son style assez flamboyant (parfois trop ?) et de sa grande culture historique, littéraire ou musicale. L'intrigue en elle-même manque de rythme. Elle ne tient que par des rencontres successives avec différents personnages d'ailleurs plutôt bien croqués. Mais il n'y a pas de réel suspense. La fin ou plutôt les fins sont prévisibles. On a d'ailleurs l'impression que celles-ci n'existent que parce que l'auteur s'est dit qu'il fallait finir (j'ai retrouvé le même sentiment que dans "
Bleu de Prusse" du même auteur que j'avais lu juste avant).
Le manque de dynamisme et de surprise dans l'intrigue aurait pu être contrebalancé par un récit mieux construit où 1934 et 1954 s'imbriquent l'un dans l'autre (un peu comme dans "
Une douce flamme" où cet exercice a été bien réussi). Au lieu de cela, on a un bloc "Berlin 1934" (deux-tiers du bouquin) et un bloc "La Havane 1954" (un-tiers du roman). Cet agencement procure un côté "20 ans plus tard" parfois assez artificiel qui ne met pas suffisamment en évidence la place jouée par l'esprit de vengeance. Bref, si chaque partie a un rythme qui lui est propre, l'ensemble manque de tension.
En définitive, c'est correct et ça se lit. L'ambianc
e sauve l'intrigue. Mais rétrospectivement, on a l'impression d'un roman de transition. En tout cas, je retiendrai de la lecture de "
Hôtel Adlon" que ce volume s'est avéré être le premier signe d'essoufflement de la série des "Bernie Gunther".