Citations sur Les mains du miracle (109)
"Et Himmler? Pourquoi allait-il à ce reniement complet, à cette abjecte humiliation? (...) Comment pouvait-il supposer qu'une rencontre si brève (...) allait l'excuser au regard des nations et de l'Histoire? Et ne serait-il pas plus vrai que, né pour l'obéissance la plus aveugle, hanté toute sa vie par le besoin éperdu, organique, d'être commandé, il lui a été nécessaire, quand, enfin, ses yeux se sont ouverts sur le désastre inéluctable et sur le gouffre où allait rouler bientôt son idole déchue, d'accepter, pour une soumission suprême, un autre maître?"
Mais, dans l'incroyable jeu que le destin avait engagé cinq ans auparavant, le maître, en cet instant, n'était plus le Reichsführer, le grand chef des S.S. et de la Gestapo (...). C'était un étranger sans aucun pouvoir, un gros homme débonnaire : le docteur Félix Kersten.
Tout le chagrin de Himmler venait non point de ce qu'il avait des millions de Juifs à détruire, mais de ce que Hitler ne lui faisait plus une entière confiance pour mener à bien cette tâche, cet holocauste où devaient périr, par millions, hommes, femmes et enfants juifs, et que Himmler offrait à son idole.
Himmler :"savez-vous pourquoi les gardes S.S.ont l'ordre de photographier les tortures, toutes les sortes de tortures infligées dans les camps ? c'est afin que, dans 1000 années d'ici, on sache comment les vrais Allemands, pour leur plus grande gloire, ont combattu les adversaires du Führer germanique et la race maudite des juifs. Et les générations futures vont admirer les images du siécle d' Adolph Hitler et lui en seront reconnaissantes pour l'éternité." Kersten avait envie de se boucher les oreilles.
Le Führer est décidé, après la victoire du IIIe Reich, à supprimer le christianisme dans toute la Grande Allemagne, c’est à dire l’Europe, et à établir, sur ses ruines, la foi germanique. Elle conservera la notion de Dieu, mais très vague, très confuse. Et le Führer prendra la place du Christ comme Sauveur de l’Humanité. Ainsi des millions et des millions d’hommes invoqueront, dans leurs prières, le seul nom de Hitler et, cent ans plus tard, on ne reconnaîtra plus que la religion nouvelle qui durera des siècles et des siècles.
Chaque matin, le miracle se renouvela. Chaque matin, les griffes et les serres de la douleur étaient matées par les mains dont Himmler apprenait à aimer jusqu’aux élancements qu’elles lui infligeaient.
J'ai appris une chose : les guerres passent, la terre reste...
« La fidélité n’est plus la fidélité, quand, du service d’un homme sain, elle passe au service d’un fou. »
Le roi des fous, au lieu de porter une camisole de force, disposait du sang des peuples pour alimenter les jeux de ses démences.
Pourtant, à cet homme beau, raffiné, brave, prestigieux, on ne connaissait pas un seul ami, pas même un camarade. Les fonctions de Heydrich et l’espèce d’aura sinistre qu’elles lui donnaient ne suffisaient point à expliquer cela. D’autres hauts fonctionnaires de la Gestapo, et spécialisés dans les besognes les plus inhumaines, tel Müller, par exemple, chef des arrestations et de interrogatoires, tortionnaire avéré, possédaient des compagnons avec lesquels ils partageaient leurs plaisirs ou leurs amertumes. Sa solitude, Heydrich l’avait lui-même choisie. Les gens ne comptaient pour lui que dans la mesure où ils étaient utiles à son métier, à sa carrière. Ensuite, il les rejetait froidement. Avec les femmes, ses rapports étaient brefs, brutaux, cyniques. Il ne vivait que pour sa propre gloire.