Toute la vie de l'homme parmi ses semblables n'est rien d'autre qu'un combat pour s'emparer de l'oreille d'autrui.
Tout homme a deux biographies érotiques. On ne parle en général que de la première, qui se compose d'une liste de liaisons et de rencontres amoureuses.
La plus intéressante est sans doute l'autre biographie : la cohorte des femmes que nous voulions avoir et qui nous ont échappé, l'histoire douloureuse des virtualités inaccomplies.
Mais il y a encore une troisième, une mystérieuse et inquiétante catégorie de femmes. Elles nous plaisaient, nous leur plaisions, mais en même temps nous avons bien vite compris que nous ne pouvions pas les avoir car, dans notre rapport avec elles nous nous trouvions de l'autre côté de la frontière.
Cette phrase, "c'et out à fait comme moi, je..." semble être un écho approbateur, une manière de continuer la réflexion de l'autre, mais c'est un leurre : en réalité c'est une révolte brutale contre une violence brutale, un effort pour libérer notre propre oreille de l'esclavage et occuper de force l'oreille de l'adversaire
L’invention de la presse à imprimer a jadis permis aux hommes de se comprendre mutuellement. A l’ère de la graphomanie universelle, le fait d’écrire des livres prend un sens opposé : chacun s’entoure de ses propres mots comme d’un mur de miroirs qui ne laisse filtrer aucune voix du dehors.
C'est dans les dossiers des archives de la police que se trouve notre seule immortalité.
Le roman est le fruit d'une illusion humaine. L'illusion de pouvoir comprendre autrui. (p.142).
On ne veut être maître de l'avenir que pour pouvoir changer le passé. (p.41).
En Bohème, l'Histoire a mis en scène une situation jamais expérimentée. Là-bas, ce n'est pas, selon les anciennes recettes, un peuple qui s'est dressé contre un autre, mais des hommes (une génération d'hommes et de femmes) qui se sont soulevés contre leur propre jeunesse. (p.29).
Il était amoureux de son destin et même sa marche à la ruine lui semblait noble et belle. (p.25).
Celui qui écrit des livres est tout (un univers unique pour lui-même et pour tous les autres) ou rien. Et parce qu'il ne sera jamais donné à quelqu'un d'être tout, nous tous qui écrivons des livres, nous ne sommes rien.