MILLENIUM, FIN DE SAGA
À bout de souffle
Clap de fin. Il était temps de tirer le rideau : manque de souffle et d'inspiration. le filon suédois s'épuise après les formidables premiers Millenium de Steig LARSSON relayé, suite au décès brutal du créateur, par
David LAGERCRANTZ, écosystème romanesque et récurrence des personnages, comme de vieilles connaissances ou compagnons de route rendus familiers au fil de la série.
Avec le trop lisse Mikael Blomkvist, à l'impeccable éthique journalistique, éclipsé par l'irruption sur le devant de la scène de l'ombrageuse, froide et déterminée Lisbeth Salander, gothique surdouée, géniale experte en intrusion informatique (hackeuse), profondément traumatisée par le calvaire d'un tragique feuilleton familial, devenue la star incontestée de la saga.
David Lagercrantz en avait bien saisi l'importance et la complexité dès son Millénium 4 en l'imposant comme personnage central de justicière aux super-pouvoirs de bande dessinée, reprenant jusqu'au nom Wasp, clin d'oeil à l'héroïne de la série Avengers des comics américains édités par Marvel.
L'intrigue assez mince s'articule autour d'usines à trolls russes diffusant des infox, de mafia, d'agents doubles, des délires désespérés d'un SDF éméché dans les rues de Stockholm - quelle est son identité ? - et de l'ascension de l'Everest dans l'Himalaya, ses drames et ses arrangements avec la vérité - inspirés de tous les récits de conquête des sommets les plus dangereux du monde, l'exploit d'Hillary et du sherpa Tensing, le célèbre K2 vaincu par une équipe italienne et les calomnieuses attaques contre Walter Bonalli ou l'Annapurna premier 8000 du français Herzog.
Un polar d'espionnage manichéen beaucoup moins saisissant que les oeuvres antérieures, à la psychologie de pacotille, construit comme les précédents en courts épisodes alternant dans le temps et délocalisés en plusieurs lieux du monde. Un essoufflement au fil du récit, sans réel suspense, comme une corvée trop bâclée par LAGERCRANTZ, pour remplir son contrat auprès des éditeurs.
Même Lisbeth Salander, moins présente, sauf dans l'épisode final, ne porte pas le poids du récit, comme lassée désormais de son rôle de championne du camp du bien. Mais l'héroïne de fiction survit à son créateur disparu : démonstration que les personnages vivent en autonomie et en arrivent comme chez
Pirandello à se lancer eux-mêmes en quête d'auteur. Plus tout à fait une extravagance !