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Critique de Antyryia



Il est rarement agréable de rentrer chez soi et de découvrir que sa porte d'entrée est entrebâillée. Pour ma part, il s'agit d'un très vieux souvenir de primaire : Ce jour-là mes parents avaient emmené notre petite famille à la mer et au retour, non seulement la porte béait mais nos voisins avaient envahi la maison. Une fenêtre de la salle à manger était brisée. Des cambrioleurs étaient venus nous faire un petit coucou pendant notre absence...

Quand Anne et Marco Conti reviennent de leur soirée, ils trouvent eux aussi la porte de leur maison entrouverte. Pourtant, ils étaient juste à côté, chez un couple de voisins, les Stillwell. Ils fêtaient l'anniversaire de Graham avec sa séduisante ( et provoquante ) épouse Cynthia. Leur baby sitter leur ayant fait faux bond, ils rentraient chez eux à tour de rôle toutes les demi-heures afin de vérifier que leur bébé de six mois, Cora, allait bien. Et ils avaient également emmené avec eux le babyphone pour pouvoir réagir immédiatement en cas de pleurs ou de bruits suspects. Ils n'ont certes pas été des parents très responsables mais les risques demeuraient quasiment nuls, et l'enfant, bruyante n'était pas la bienvenue à cette petite fête. Mais bien sûr, le berceau est vide à leur retour. C'est un kidnappeur qui semble leur avoir rendu une petite visite impromptue.
"Comment peut-on se rendre à un dîner chez les voisins en abandonnant son bébé seul à la maison ?"

Effondrés, les parents préviennent les autorités policières. L'inspecteur Rasbach interviendra sur les lieux de l'enlèvement. Ses soupçons se porteront immédiatement sur les parents et ils n'aura de cesse de les interroger. Il fera venir des chiens renifleurs de cadavres et trouvera une première contradiction dans le témoignage de la mère. Il soupçonnera Anne, atteinte de dépression post-partum et d'autres problèmes d'ordre psychiatrique, d'avoir fait tomber le bébé par accident et d'être couverte par son époux. Quant à Marco, sa boîte est en train de couler et il aurait pu mettre en scène ce faux enlèvement pour pouvoir réinjecter des capitaux dans son entreprise.
Mais pour le lecteur, l'innocence des parents ne laisse guère place au doute, et moins encore leur amour pour leur petite fille. Leur détresse ne fait qu'augmenter avec cet acharnement dont fait preuve la police.
"Rasbach leur met la pression, et on dirait bien qu'il ne les lâchera pas."
"Si tu faisais ton boulot et que tu retrouvais ma fille, connard."
"Tous deux se nourrissent principalement de café et de désespoir ces temps-ci."

La presse également s'en mêle. Alice et Richard Dries, mère et beau-père d'Anne, ont un patrimoine de quinze millions et aucune demande de rançon n'étant demandée, les parents finiront par proposer une récompense substantielle aux ravisseurs. Anne est fragilisée à l'extrême, culpabilise : "Un coup de vent pourrait la renverser", "Elle est trop émotive, frisant l'hystérie par moments", "Elle est clouée au pilori". Marco lui, se sent de trop dans son propre foyer.
C'est une descente aux enfers pour le couple. Même la présence d'une voiture roulant dans la ruelle tous feux éteints à minuit et demi ne détournera pas les inspecteurs de leur travail de sape.
"Leur bébé a disparu. Ils subissent une pression intense. La police est chez eux, la presse tambourine à leur porte."

Le rythme est très lent durant tout le premier tiers du livre, qui pose les jalons de l'histoire et des personnalités de chacun. Cette première partie se lit bien, mais le sujet a déjà été vu et revu et l'intrigue ne décolle pas de ces parents angoissés, et des soupçons pesant sur eux. Et on a alors droit à un premier rebondissement, un petit secret avoué de Graham et Cynthia, le couple d'à côté, qui apporte un nouveau souffle à une trame qui commençait à s'enliser.
A mi-livre, on a déjà une bien meilleure idée de ce qui s'est passé cette nuit-là. Et de secrets en révélation, de faux-semblants en rebondissements, la disparition de la petite Cora devient vraiment palpitante. A la rigueur, son destin - funeste ou pas - importe peu : Il devient juste indispensable pour le lecteur de reconstituer les évènements dans leur totalité. Parce qu'évidemment, dans ce type de suspense psychologique, les mensonges et cachoteries des uns et des autres permettant de reconstituer les faits vont avoir un rôle primordial. Certes, je me doutais que ce n'était pas la petite Cora qui avait organisé son propre enlèvement, mais à part ça je me suis vraiment laissé surprendre à plusieurs reprises par les évènements, qui relançaient l'intérêt de la lecture et de l'enquête très régulièrement, en lui donnant beaucoup plus de rythme en seconde partie.

Ce roman est pour l'instant une exclusivité France Loisirs mais devrait paraître dans quelques mois aux presses de la cité. Son titre s'explique probablement en partie parce que Linwood Barclay avait déjà signé un thriller intitulé "Les voisins d'à côté". Pour autant, mis à part Cynthia, cette femme sophistiquée et manipulatrice, ces voisins ne sont finalement que peu présents.
Un thriller psychologique de plus donc, traitant de l'éternel sujet de l'enlèvement d'enfant, principalement du point de vue du traumatisme vécu par les parents. Après une longue mise en route très lisible mais peu originale, l'histoire s'emballe et c'est très plaisant pour le lecteur d'évoluer avec des protagonistes qui ne contrôlent plus rien et d'assister à des retournements de situations surprenants et imprévisibles. Et pourtant, tout est tellement logique une fois la dernière page ( qui propose un ultime coup de théâtre ) tournée.

Ancienne avocate et professeur de lettres, Shari Lapena , qui habite à Toronto, s'est désormais tournée vers l'écriture et a vu ce premier roman notamment acclamé par Harlan Coben, Linwood Barclay, Lee Child, Sue Grafton, Lisa Gardner et Tess Gerritsen.
Un livre qui demeure un peu formaté tant dans l'écriture que dans le scénario, un page-turner de plus surfant sur la vague de succès des thrillers psychologiques, mais qui tire quand même son épingle du jeu alors je ne vais certainement pas bouder mon plaisir.
Le second roman de Shari Lapena paraîtra quant à lui en Angleterre dès le mois de juillet et s'intitulera A stranger in the house.
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