Comme beaucoup, je n'avais jamais entendu parler des îles Chagos, quelques atolls perdus en plein océan indien. C'est normal, vu le blackout organisé par la Grande-Bretagne pour occulter une page scandaleuse de son histoire coloniale.
Les Chagos étaient gérées administrativement par l'île Maurice. Cette dernière fut libérée de la domination britannique par référendum en 1968. Et donc Chagos aussi ? Non, car les Britanniques refusèrent, louèrent ce territoire aux USA pour le transformer en une base militaire. Avec la complicité du gouvernement mauricien qui fut bien sûr grassement arrosé. Mais il y avait une condition : tous les habitants devaient déguerpir. Et un beau jour, des soldats américains rassemblèrent les habitants sur la plage, leur donnèrent une heure pour prendre quelques affaires avant de les embarquer pour Maurice. On leur avait promis un logement décent, ils durent se débrouiller et vécurent dans de sinistres bidonvilles.
C'est dans ce cadre historique que
Caroline Laurent a planté son décor. Avec pour personnage principal Marie, une jeune et belle Chagossienne, libre, volontaire, allant toujours pieds nus malgré ses grands pieds, préférant les amants aux maris, qui se battra envers et contre tout pour retourner sur son île natale. L'autrice dépeint avec talent la vie de ce petit peuple qui vivait plutôt heureux sans les vicissitudes de notre monde actuel, jusqu'à ce que l'inqualifiable arriva.
Caroline Laurent a cru bon d'ajouter une histoire d'amour improbable à son roman. C'est bien de lier Marie la rebelle au distingué secrétaire de l'administrateur mauricien des Chagos, mais il s'agit ici de l'Amour avec majuscule, éternel (amour/toujours), totalement réciproque, qui m' a semblé bien naïf: ce côté mélo a quelque peu terni mon plaisir en fin de lecture. Mais ce défaut (à mes yeux) est largement compensé par l'intérêt historique du roman.
A noter : les Nations-Unies et le Tribunal International de la Haye se sont penchés plus d'une fois sur cet acte politique (encore en 2019) et l'ont à chaque fois condamné. Sans perturber les Britanniques qui ont sans doute d'autres chats à fouetter !