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Voilà un livre étonnant : on croit découvrir un récit de voyage et finalement non, c𠆞st une véritable enquête de terrain sociologique que Jack London nous livre.
N𠆞spérez pas retrouver le grand frisson de Martin Eden dans ce livre, mais soyez sûr que l𠆊venture de Jack London dans les quartiers pauvres de Londres au tout début du XXème siècle ne vous laissera pas insensible. On retrouve là le talent de Jack London et son engagement politique pour une société plus juste. Certains personnages pourraient être ceux de quelque fabuleux roman de cet auteur hors normes, mais ce sont des personnes bien réelles que Jack London décrit, celles qu’il a croisées lors de son immersion dans ce „peuple d𠆎n bas“ ... et c𠆎st cela qui donne tant de relief à ce livre très particulier. Quand la réalité de la pauvreté dépasse la fiction, c𠆎st à l‘Humanité tout entière que Jack London s�resse : tout cela reste malheureusement terriblement d�tualité.
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On a du mal à y croire tant ça paraît improbable. Et pourtant... Jack London ne fait pas dans la fiction. Il n'écrit pas un roman. Il décrit simplement une réalité qu'il n'a pas fini d'observer dans cet East End londonien, ce coeur des ténèbres, ce bas fond misérable qui abrite des milliers d'âmes perdus et affamés.

L'empire britannique, alors le plus puissant au monde, ne sait effectivement pas, malgré son oppulence et sa richesse, prendre soin de ses sujets, de ses citoyens qui souffrent, comme jamais on aurait pu l'imaginer, de la misère économique et sociale. Ils sont pauvres, affamés, sans toit, sans logis. Ils ne travaillent pas suffisamment ou pour une petite bouchée de pains. Ils sont maltraités, soumis et totalement démunis. Ils sont serviles et entièrement exploités. Ils sont des parias, ne sont plus bons à l'emploi.Ils sont complètement oubliés. Volontairement relégués. Ils vivent dans l'attente de leur mort.

C'est affligeant, consternant. C'est une horreur à penser, à concevoir. C'est, malheureusement, encore une réalité dans certaines parties de notre monde qui croule, pourtant, sous la production effrénée.

Ce livre doit être lu, malgré ses derniers chapitres qui se répètent et qui ne sont pas nécessaires. Il doit être lu parce qu'il montre qu'un monde sans foi,ni loi; sans régulation, sans protection sociale; uniquement régit par la loi marchande est un monde qui ne connait ni justice, ni humanité. Dans ce monde, les uns, minoritaires, s'empiffrent sur le dos des autres, majoritaires; la misère humaine domine et la mort rôde. Dans ce monde, on a envie de cracher sur tous ceux qui profitent d'une mauvaise répartition des richesses.

On ne le dira jamais assez: sans bataille, sans mouvements sociaux, sans contestations, les droits économiques et sociaux n'existent pas. Les droits, toujours, s'arrachent. Ils ne se quémandent pas.
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"Laisse toute espérance" est-il écrit à l'entrée des Enfers nous a déjà dit Dante. Oui, le Narrateur reporter laisse ses espérances lorsqu'il pénètre dans cet enfer moderne qu'est East End, banlieue ouvrière de Londres érigée en symbole des quartiers pauvres de l'Angleterre, au temps où Britania est la puissance mondiale grâce à son empire colonial. L'Empire approvisionne toute la ville et l'enrichit grâce à ses docks et à son port, mais lui amène tous ses rebuts, tous ses marins sans travail, tous ses dockers qui se tuent à la tâche.
Oui, c'est une descente aux enfers, dans les sept cercles de l'Enfer : logements insalubres et trop petits, travail mal-payé, nuit à la rue, prostitution, alcoolisme, violence sur les femmes et les enfants, tentatives de suicide qui échouent à cause du manque de connaissances et de moyen de désespérés qui ne connaissent même pas le sens du mot espoir.
Une description quasi clinique, scientifique, où peu à peu le Narrateur s'efface, le récit de son expérience personnelle s'arrêtant lorsqu'il retrouve des draps propres et mange à sa faim, tout en saluant ceux dont il a partagé la souffrance pendant une nuit et une journée de suite. le ton passe ensuite à celui d'un détachement clinique, sociologique voire ethnologique, pour mieux se centrer sur les faits.
Une autre plongée chez ces Misérables, ces exclus de la croissance qui font pourtant vivre le pays. Oui, pour reprendre les mots de Victor Hugo : „Tant qu'il existera, par le fait des lois et des moeurs, une damnation sociale créant artificiellement, en pleine civilisation, des enfers, et compliquant d'une fatalité humaine la destinée qui est divine; tant que les trois problèmes du siècle, la dégradation de l'homme par le prolétariat, la déchéance de la femme par la faim, l'atrophie de l'enfant par la nuit, ne seront pas résolus; tant que, dans de certaines régions, l'asphyxie sociale sera possible; en d'autres termes, et à un point de vue plus étendu encore, tant qu'il y aura sur la terre ignorance et misère, des livres de la nature de celui-ci pourront ne pas être inutiles.“
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Dans beaucoup de villes le côté Ouest regroupe les quartiers riches, et l'Est le quartier pauvre.
L'East end de Londres porte cette différence à son comble.
Jack London devait partir en reportage sur la guerre des Boers, qui est finie quand il arrive en escale a Londres. Il décide alors de rester pour visiter l'East end. Lui qui a fait tous les petits boulots, qui a vécu l'exploitation (remplacer deux ouvriers dont l'un s'est suicidé pour un salaire misérable) , comprend assez vite qu'il doit s'habiller avec des hardes s'il veut échapper à la classification sociale : étant sale, personne ne lui demandera un pourboire pour un simple renseignement.
Il loue un appartement à la frontière de ce qu'il appelle le Ruisseau, la fosse, l'abime, le ghetto, pour pouvoir écrire et destesser un peu.
Et il visite, il parle, il essaie de comprendre l'impubliable, l'impensable , selon ses termes.
L'expansion industrielle, les progrès de l'urbanisme ( banques, hôtels, usines, bureaux sortant de terre, et la construction des voies ferrées coupant la terre enrichissent beaucoup de monde, c'est « le bon vieux temps ».
Corrélativement, l'appauvrissement poussent les meilleurs ouvriers vers la « marée nauséabonde et bourbeuse de l'humanité »; peu importe si des masures se font détruire, pour respecter les rails, obligeant leurs habitants à émigrer plus à l'est , à dormir le jour puisque dormir dehors la nuit est interdit, à baisser inexorablement vers la pauvreté la plus misérable, la faim, l'alcoolisme, la prostitution ( pour un quignon de pain rassis parfois) la maltraitance et le suicide.
Jack London, me semble t il exprès, s'exclame au début que tous ces mal payés sont des alcooliques et n'ont que ce qu'ils méritent, puis il raconte le fossé toujours plus grand entre les riches et les pauvres, les misérables.
L'humanité dans ce qu'elle a de plus barbare.
Pas d'espoir, aucun espoir.
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A côté des théoriciens Friedrich Engels et Karl Marx, Jack London se pose en praticien. Sans vouloir pour autant comparer les deux ouvrages, j'ai envie de dire que "le peuple de l'abîme" est un peu "le manifeste du parti communiste pour les nuls", et sans que cela fasse injure ni à l'une ni à l'autre de ces deux oeuvres. le mérite de l'essai de l'auteur de Croc Blanc, écrit plus d'un demi-siècle après "le manifeste", lequel est inscrit depuis juin 2013 dans le Registre "Mémoire du Monde de l'Unesco", est le sentiment de vécu qui en émane. Et pour cause ; durant l'été 1902, Jack London s'est transformé en clochard pour vivre dans les quartiers populeux et sordides de Londres. il fait le récit de ses nuits passés dans les hospices crasseux pour pauvres ou pire, dans la rue pourchassé par les bobbies qui l'empêchent de dormir sur un banc, dans un parc ou sous un porche, de ses journées à chercher un travail mal payé qui ne lui permettra pas de se nourrir correctement, réduit à mendier un repas infâme à l'Armée du Salut. Il nous éclaire ainsi sur les conditions de vie des 800 000 londoniens qui s'entassent dans des taudis immondes dans le East End de la capitale britannique, synonyme d'extrême pauvreté, de surpopulation, de misère, de maladie et de criminalité.
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"Je suis descendu dans les bas-fonds londoniens avec le même état d'esprit que l'explorateur, bien décidé à ne croire que ce que je verrai par moi-même"

écrit London dans la préface du livre. Ce n'est donc pas un roman mais plutôt un essai,  un témoignage, un reportage journalistique.

London se met lui-même en scène.  D'abord comme "touriste" il s'adresse à l'agence Cook.  Il se rend ensuite chez un fripier et se déguise en clochard, prend pension à la limite de l'East End. Il s'invente un personnage : un marin américain qui aurait perdu ses économies et qui serait contraint de partager le sort des habitants des quartiers déshérites.

"Je découvris un tas d'autres changements, survenus à cause de mon nouvel accoutrement. Lorsque je traversais, par exemple aux carrefours, les encombrements des voitures, je devais décupler mon agilité pour ne pas me faire écraser. Je fus frappé par le fait que ma vie avait diminué de prix proportionnellement avec la modicité de mes vêtements"

Tout d'abord, il cherche une chambre. Il découvre les conditions de logements des ouvriers et d'abord de la "saturation" qui joue sur le prix des loyers et qui fait fuir les classes

Elle m'expliqua le procédé de la saturation, par laquelle la valeur locative de tout un quartier monte en même temps que la qualité des ses habitants descend : "vous voyez, monsieur, les gens comme nous ne sont pas habitués à nous entasser comme les autres....."




En s'adressant à la tenancière d'un café pouilleux, il découvre que des ouvriers "des gens tout à fait comme il faut", se partagent une chambre à trois lits. Il découvre enfin comment des familles s'entassent dans des chambres insalubres où il faut aussi travailler, coudre des chaussures ou des cravates. Et encore ! il s'agit de travailleurs qui gagnent leur vie (mal) et ont un toit au dessus de la tête.  

Il existe encore des malheureux plus mal lotis dont il va partager le sort : ceux qui doivent fréquenter les Asiles de nuit ou prendre un repas à l'Armée du Salut. London nous fait partager  les rencontres dans les queues  avec des personnages réduits à cette extrémité : parfois des ouvriers qualifiés seulement vieux ou après un accident du travail,  incapables de retrouver un travail, dockers, anciens soldats  ou marins, des cueilleurs de houblons dans les campagnes environnantes. 

Pire encore, il va "porter la bannière" expression imagée décrivant le calvaire des clochards sans toit qui marchent toute la nuit sans pouvoir se reposer un instant, fuyant le policier qui les chasse du moindre recoin où ils pourraient se poser un moment. 

Des rencontres, des aventures, des personnages pittoresques suffiraient à rendre passionnante cette lecture. Mais ce n'est pas tout. London ne se contente pas de raconter les péripéties de ce reportage. Il décrit les conditions de vie, logement et sous-alimentation avec des chiffres  et comparaisons avec le régime alimentaires de soldats ou gardiens de prison, il donne les salaires de tous les travaux. Toutes les données sont extrêmement précises.

Il analyse les rouages économiques : la concurrence qui entraîne les baisses de salaires

"L'exploitation de la main d'oeuvre; les salaires de misère, les hordes de chômeurs, et la foule de sans-abri et des sans-maisons, c'est ce qui arrive lorsqu'il y a plus d'hommes pour faire le travail qu'il n'y a de travail à faire."

même un syndicat puissant, disons de vingt-mille adhérents, ne peut tenir le taux des salaires s'il a en face vingt-mille chômeurs qui essaient de rivaliser avec les syndicalistes. 

De même quand les syndicats essaient de faire interdire le travail des enfants de moins de quinze ans, ce sont les ouvriers eux-même dépendant des gains de leurs enfants qui refusent cette mesure.

Il analyse aussi l'inaptitude au travail et ses causes : la sous-alimentation, l'alcoolisme ou les conditions de vie déplorables : logement, pollution, il prend comme exemple le saturnisme des ouvrières dans les usines de plomberie....Certains arguments sont encore actuels! Chaque fois on perçoit l'empathie de London et surtout l'absence de jugement moral. Il explique, ne juge pas.

Au contraire, il porte un regard très critique sur les "bienfaiteurs" qui n'apportent que des solutions dérisoires comme une exposition d'art japonais ou une journée à la campagne pour les enfants. Il est assez sceptique sur les bienfaits de la Civilisation, comparant le mode de vie des Inuits loin de toute civilisation et des Anglais. 

Aucune erreur n'est possible. La civilisation a centuplé le pouvoir de production de l'humanité, et par suite d'une mauvaise gestion, les civilisés vivent plus mal que des bêtes, ont moins à manger et sont moins protégés de la rigueur de éléments que les sauvages Inuits, dans un climat bien plus rigoureux. 

Ce reportage d'une réalité vieille de 120 ans, est toujours actuel. Peut-être les lieux ont changé mais l'analyse des mécanismes demeure intéressante.
Lien : https://netsdevoyages.car.blog
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Un livre formidable ! Actuel encore120 ans plus tard .
Un style net . Un livre palpitant malgré le sujet .
Une découverte.
A faire lire à tous les dirigeants de n'importe quel bord .
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Lu aux éditions de l'antre, sous le titre "les bas-fonds de Londres" mais le titre anglais demeure le plus évocateur "people of the abyss". Jack London démontre ici son talent de reporter, doté d'une sincérité à toute épreuve. Son honnêteté intellectuelle paraît évidente, tant il écrit avec son coeur et n'hésite jamais à plonger dans la fange. C'est aussi un reporter humain, à l'écoute des miséreux dont il collecte les témoignages saisissants. Parfois, il interpelle le lecteur sous sa couette, confortablement installé. On termine le livre avec un sentiment de révolte. On découvre l'envers de la révolution industrielle dont les échos sont malheureusement contemporains..
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De London, j'ai lu Croc Blanc, qui m'est resté en tête très longtemps, et peut-être ce livre y est-il encore. J'étais heureuse de me replonger dans ses mots. Ici, nous sommes en 1902. London décide, contre l'avis de tous, d'aller faire un tour dans le quartier populaire, à l'est de Londres. Un quartier réputé comme étant le dur de la capitale. Il y vivra pendant quelques temps. Un quartier où la misère est omniprésente. Où les travailleurs s'entassent dans des chambres qu'ils louent au prix de toute leur paie. Où la crasse est de mise. Où les gens étouffent sous la poussière et la saleté. London y décrit des scènes d'une grande tristesse. Nous sommes complétement immergé dans cette atmosphère. Notre ventre crie famine. Notre vision est brouillée de larmes pour les vies difficiles. Et encore aujourd'hui, le texte est porteur de messages, de prises de conscience. Nous conditions se sont certes améliorées, mais... la pauvreté est toujours présente. Et encore trop d'histoires de précarité persistent. Un texte engagé envers les travailleurs qui peinent à joindre les deux bouts. Qui défens leurs droits, leurs conditions... Bref, une lecture très marquante. Une plongée directe dans l'abîme.
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Il s'agit ici d'un Jack London explorateur, qui enquête sur la société des pauvres dans l'East End londonien.
Un très beau texte de Jack London à découvrir.
Une expérience profondément humaine.
C'est avec beaucoup de courage et de finesse que Jack London vit, observe, et analyse la misère, la précarité de la vie, et qu'il critique parfois de façon acérée, la société et la politique de son époque, qui, selon lui, seraient
"à remanier".
C'est également un "terrible portrait" du peuple d'en bas.
Passionnant, bouleversant.
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