J'ai trouvé cette pépite il y a fort longtemps dans la bibliothèque de mes grands-parents et je suis ravie qu'il y en ait une réédition numérique, la version papier étant quasi introuvable. C'est de loin le livre le plus drôle que j'ai lu et il est en plus merveilleusement écrit et superbement illustré.
J'espère que, comme moi, de nombreux lecteurs seront enthousiasmés par ce livre.
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A peine avait-il le dos tourné, Isidore lui fit un pied de nez. A cet instant précis, les planches qui se trouvaient encore sur le camion s’écroulèrent dans un fracas de tonnerre. Le colonel se retourna. Repliant prestement les doigts de la main, le coupable fit semblant de se gratter le nez. Mais Wilburce ne fut pas dupe : il fusilla l’insolent du regard, et poursuivit son chemin.
— Tu crois qu’il m’a vu ? murmura le soldat, en se tournant vers Gérasime.
— A l’air qu’il avait, et à moins d’être aveugle...
— C’est embêtant !
— Très ! approuva l’autre, sinistre.
— Pourquoi dis-tu ça comme ça ?
— Tu sais ce que l’on mange dans les prisons anglaises ? Des saucisses de conserve réchauffées et de la marmelade d’oranges amères.
— Pouah ! cracha Isidore, horrifié. Et qu’est-ce qu’on boit ?
— Que du thé ! affirma son camarade d’un ton encore plus funèbre. Et il t’a « photographié ». Ces Anglais ont une mémoire d’éléphant.
— Je ne pouvais pas prévoir que les planches allaient faire ce boucan !
— Et le pied de nez ? Tu ne pouvais pas le prévoir non plus ?
— Je n’y peux rien ! Je rencontre un Anglais, la main me monte au nez et se déploie en éventail !
— En somme, c’est un réflexe conditionné ?
— Comme tu dis, acquiesça Isidore, qui ignorait absolument ce que c’était.
La brochette était trop cuite.
« Ces damnés fils de Thémistocle sont véritablement peu sophistiqués », songeait Wilburce, en mastiquant un rognon qui paraissait découpé dans un vieux pneu d’avion. « Ce cuisinier semble capable de transformer le meilleur veau des Downlands en revêtement pour chenillettes caterpillar. »