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3,43

sur 304 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Traduit par Marina Boraso

1845, tout le monde le sait,  la Grande Famine frappe l'Irlande. Un épisode de l'histoire de l'île d'Emeraude dont la population n'aime pas trop parler, bien qu'il y ait à Dublin et ailleurs dans le pays, mémorial et musée. Même si elle vous montrera, toujours avec colère, dans le Burren, les routes qui ne mènent nulle part, construites par les Irlandais qui crevaient la faim sous la houlette du colonisateur britannique, mais aussi de la gentry qui se gavait. Sinead O'Connor en a fait une chanson, Famine, où elle dénonce quelque chose fabriqué de toute pièce pour faire crever les Irlandais pendant qu'un partie de la population mangeait à sa faim. En littérature, le thème est aussi abordé : on peut citer Famine de Liam O'Flaherty, pour ne citer que lui. A son tour Paul Lynch nous embarque sur les routes de la famine dans un copieux roman de presque 500 pages, le temps qu'il faut pour se faire une idée de ce qu'ont vécu les Irlandais.

L'histoire débute à Samhain, un "octobre du déluge" à Blackmountain. Grace est brutalement arrachée de son rêve par sa mère, Sarah, qui lui coupe sa longue chevelure en lui disant "C'est toi qui est forte, maintenant". On comprend que le geste de Sarah vise à soustraite sa fille de 14 ans aux mains libidineuses de Boggs, le propriétaire. Sarah est enceinte pour la cinquième fois... Grace est l'aînée, et puis il y a Colly, son frère de 12 ans. On comprend ce qu'est obligée de faire Sarah pour nourrir ses enfants. Ce jour, elle demande à Grace de manger sans partage, malgré l'indignation de celle-ci. "La récolte est perdue. Tu le sais aussi bien que moi. J'ai demandé partout, mais personne n'est prêt à faire l'aumône. Moi, je suis trop avancée dans ma grossesse, il faut que tu t'occupes de toi. Tu dois chercher un emploi et travailler comme un homme - aux filles de ton âge, on ne propose rien qui vaille. Reviens-nous à la fin de la saison, quand tu te sera rempli les poches." Grace est travestie en garçon et quitte la maison, accompagnée de Colly qui tient à venir avec elle. Elle ignore tout de ce qui l'attend. Sa mère a cru bien faire.

Dans un style à la fois âpre et lyrique, Paul Lynch nous plonge dans une histoire peuplée de personnages effrayants, quelquefois attachants, parfois agaçants mais la plupart ne sont trop sympathiques, C'est toute une galerie de portraits qui défile pendant les kilomètres de route à pied que vous allez faire, entre Blackmountain, Limerick, Ennis... J'ai eu une tendresse particulière pour cet homme qui s'est taillé les dents en pointe !  :) Des morts et des vivants ou plutôt des morts vivants, des vivants morts, voilà ce qui vous attend. Si le roman commence à Samhain, ce n'est pas pour rien... La mort est omniprésente. Grace semble aussi avoir un don, celui de voir les trépassés et de pouvoir parler avec eux. Surtout ceux qui ne peuvent reposer en paix, comme cette Mary Bresher à qui on a pris le bébé, et puis son cher frère, bavard comme une pie... Ses compagnons de route la prenne un peu pour givrée quand ils la surprennent à parler toute seule.

Grace est un personnage lumineux, qui n'a pas sa langue dans sa poche mais elle est pourtant naïve. Habillée en homme, elle finit par se comporter comme tel (mais en même temps, pourquoi y aurait-il une façon de se comporter comme une femme ou comme un homme, hein ? ). Même si un jour elle croit mourir en découvrant du sang qui lui coule sur les cuisses. Même si elle est devient quasiment amoureuse d'une paire de bottines. Même si elle s'aperçoit bien que le regard des hommes sur elle se modifie au fil de cinq années que vont durer son périple sur les routes. Grace est comparée à Grace O'Malley, la célèbre reine des pirates, figure emblématique du Mayo. Pour survivre, elle devient bergère, voleuse, puis sera embarquée par ce qui ressemble à une secte dont toutes les membres s'appellent  Mary, obéissant au Père. Un coup de griffe à l'Eglise et à leurs adeptes qui trouvent des explications bien commodes à tout en invoquant Dieu.

"Les nantis, les richards de ce monde, ils se foutent éperdument de ce qui peut arriver au commun des mortels. (...). Pour des gens comme nous, c'est peut-être la fin du monde, mais eux, ça ne les gêne absolument pas". "Les affamés qui errent sur les route continuent de croire qu'on va leur porter secours. Mais qui va les secourir ? Ni Dieu ni les Anglais assurément, ni personne dans ce pays. L'espoir les fait vivre. (...) C'est l'espoir qui les aide à tenir debout. Qui les convainc de rester à leur place et les empêche de se rebeller."

Paul Lynch signe là une épopée apocalyptique, gothique, un chouïa mystique aussi, où "la pluie ruisselle, (...) s'immisce dans vos chaussures, ronge le tissu de votre cape et vous mâche la cervelle au point d'accaparer toutes vos pensées", où "les doigts fouillent la terre et trouvent la viande", où maître corbeau guette. Un roman dont il y a temps à dire qu'une chronique n'y suffit pas ! Je pourrais encore parler du folkore irlandais sous-jacent, par exemple.

Je me suis laissée bercer par l'univers de l'auteur, dont j'ai lu tous les romans. Je sais qu'un autre est déjà en cours de parution dans les pays anglophones. On devrait bientôt le revoir donc !
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Quatrième voyage avec Paul Lynch, auteur irlandais qu'on commence à bien connaître en France. Il existe à Dublin un groupe de statues décharnées, la Famine des Patates, triste et célèbre tragédie insulaire des années 1850. le mildiou, et aussi l'Angleterre un peu, ont jeté sur les routes et sur l'océan un tiers des Irlandais. Des centaines de milliers de morts, plus encore de migrants pour l'Amérique et l'Australie. Les Highlands écossais payèrent aussi très lourd lors de ce cataclysme.

Famine

Grace, octobre 1845, quitte le Donegal, envoyée par sa mère pour trouver du travail et une chance de survivre. Son jeune frère l'accompagne, à sa manière. le roman porte son nom, et elle porte le roman, camouflée en vêtements d'homme, en une quête apocalyptique sur les chemins et les forêts d'Irlande. Une Irlande bien peu hospitalière, aux mauvaises rencontres quotidiennes, sans foi ni loi, où l'on vole le moindre objet, où l'on égorge pour une miche de pain, où même les rats sont très recherchés. le roman va tambour battant, sans répit, la haine, la faim et la misère chevauchant sans trêve près de ces hordes de migrants de l'intérieur. C'est le temps où les hommes s'ensauvagent. La prose de Paul Lynch est parfois hallucinante, cauchemardesque.

La dernière partie du roman est un peu différente et à dire vrai borde le fantastique avec la réapparition du religieux, pas forcément réconfortant. Ce septième chapitre s'appelle Lumière et, curieusement, est séparé des six précédents par quatre pages totalement noires. Il y a dans Grace de la malédiction, comme une punition divine. C'est très impressionnant. Comme j'aime ce pays, mais je sais aussi sa dureté passée.

Elle passe quelques nuits dans une église délabrée. Surplombant le porche, cinq effroyables faces sculptées dans la pierre. Ses rêves sont habités de visages affamés. Une rumeur de vent s'exhale par leurs bouches. Quand elle se réveille, la lune éclaire la pierre comme une bougie. Il lui arrive de rester allongée sans dormir, évoquant tout ce qu'elle a vu, ces routes tellement remplies de malheur qu'on os à peine les regarder. Où va ce pays? se demande-t-elle.

Grace est un roman féroce, très peu traversé d'amitiés, ou de solidarités. Un roman où le diable des Irlandais ne se contente pas de les faire joyeusement danser au son des violonneux à la lueur d'un feu de camp.
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Irlande, milieu du XIXème siècle. le pays est alors frappé par la famine et, pour de nombreuses familles, c'est la survie qui devient leur leitmotiv.

Ne sachant plus faire face à la situation, Sarah, mère de 5 enfants dont Grace, son aînée, prend une décision délicate et tragique afin de protéger sa petite fille, plutôt que de lui faire subir les violences sexuelles de son propre père, Boggs.
En effet, ce dernier ne remplit pas son rôle de père de famille, mais se contente d'apparaître parfois dans leur masure à l'état misérable, pour assouvir ses pulsions avec sa femme. Mais Boggs commençait à s'intéresser à sa fille, Grace.

Sarah décide de donner une apparence de petit garçon à sa fille. Ainsi, elle lui coupe les cheveux et lui bande la poitrine afin de la laisser battre la campagne afin de trouver un travail pour survivre. Débute alors le parcours de Grace à travers l'Irlande, pendant plus de 4 années. Un périple à la fois bouleversant dans un pays dévasté et au climat atrocement froid et humide.
Au fil de ses aventures, Grace ne se laisse pas gagner par l'effroi. Au contraire, elle s'affirme, prend de l'assurance et brave ses peurs.
Pour l'accompagner, elle peut compter sur la voix de son petit frère décédé, qui lui sert de guide.

Un livre qui retrace la misère, la noirceur et la violence de l'Irlande d'alors grâce à une écriture sensible et qui décrit à merveille le climat hostile et oppressant du pays.

La traversée d'un tunnel qui m'a semblé interminable tant il est inhospitalier et terrifiant mais dont il existe bien une issue lumineuse.
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Irlande 1845. le mildiou détruit les récoltes, la famine s'installe et va se prolonger sur plusieurs années.
La mère de Grace travesti sa fille en garçon pour qu'elle puisse plus facilement trouver un travail et la chasse de la maison, car elle ne peut plus nourrir ses enfants.
Grace, 14 ans va entamer un long chemin dans le froid et la misère. Elle va pour survivre devenir vacher, ouvrier, et même bandit pour pouvoir manger. Et manger un chou ou boire du lait avec des épluchures à cette époque c'est la paradis !
C'est un récit très dense qui demande beaucoup de concentration. Tout est mélangé, les pensées, le récit, les dialogues. C'est un roman d'ambiance, très noir sur la misère et c'est tellement bien décrit qu'on s'y croirait, mais j'avais hâte d'en sortir.
C'est à la fois très beau et en même temps trop long. le style et l'écriture de l'auteur sont très particuliers qui peuvent demander un investissement du lecteur, parfois, je décrochais et je devais relire pour bien comprendre. Il ne se passe pas grand-chose, pas d'action, mais la misère et la famine sont toujours là. Grace va devenir une jeune femme et retournée des années plus tard chez elle à Blacmoutain...
Tout est noir, très noir et très froid...
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Un roman découvert par hasard chez un bouquiniste.
Après la lecture du coeur battant du monde de Spitzner, j'avais très envie d'approfondir ma connaissance de l'histoire anglaise et irlandaise et notamment la période de la Grande Famine qui a poussé tant d'Irlandais sur les routes.
1845, la famine ravage l'Irlande. En effet, le mildiou a contaminé l'ensemble des champs de pommes de terre créant le pourrissement des cultures. Cet aliment constitue à l'époque 80 % de la nourriture de la population.
La jeune Grace est confiée à la route par sa mère Sarah, enceinte pour la cinquième fois. Tondue, fagotée de frusques trop grandes pour avoir l'air d'un garçon, Grace part sur les chemins suivie par son jeune frère Colly. Elle affronte la perte, le froid, la fatigue extrême, la faim et la nature hostile en partant du Donegal. Tour à tour garçon vacher, ouvrier dans une carrière, bandit de chemin, la jeune Grace peine pour s'en sortir et lutte à dissimuler sa féminité naissante. Hantée de visions, elle trouve en Bart, jeune homme maladroit, un compagnon de route. Ensemble ils croisent les visions fantomatiques des corps mendiants que la famine et la maladie ont mené sur les chemins.
La plume de Paul Lynch est peuplée de métaphores et de poésie. Un grand lyrisme anime ses phrases et nous plonge dans la beauté hostile des paysages irlandais mais nuit parfois, selon moi, au bon suivi de l'action partagée entre rêve, réalité et perception sensorielle. L'avant dernier chapitre m'a également semblé assez déconnecté du reste du récit.
En complément sur cette période, j'ai adoré visionner l'émission de Nota Bene sur la grande famine. Très éclairant pour comprendre le contexte du roman.
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Quelle noirceur dans ce roman de Paul Lynch ! Grace est à peine adolescente quand sa mère la chasse de la maison un jour d'octobre 1845, elle doit partir travailler et ne revenir que les poches pleines. La nourriture manque cruellement à cette mère qui ne peut plus nourrir tous ses enfants. La Grande Famine sévit alors en Irlande. Entre 1845 et 1852, le mildiou anéantit les culture de pommes de terre, nourriture de base de la population, les irlandais deviennent fous des douleurs de la faim, les morts s'entassent par millions. C'est terrible !

C'est terrible à lire aussi. Il n'y a aucun espoir, aucune lueur dans ces paysages sombres et humides. Nos petits héros se battent pourtant pour survivre, avec rage et courage. Ils avancent sans jamais s'arrêter, sans regarder en arrière, sans plainte. C'est terrifiant ! Et pourtant, impossible de s'arracher à ces pages accablantes mais magnifiquement écrites.
Lien : http://www.levoyagedelola.com
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De 1845 à 1849 en Irlande, la famine exterminera un million de personnes. L'auteur part de ce fait historique et nous entraîne dans les pas de Grace, jetée sur les routes par sa mère pour trouver du travail. Cette jeune fille de 14 ans entreprend ce voyage terrifiant vers le sud avec l'aide du fantôme de son petit frère décédé. Sa seule façon de survivre est de s'adapter aux événements, aux autres et d'entendre la voix de Colly. C'est un souffle épique qui caractérise ce livre. Il est empli de souffrance, de terreur, des ravages de la faim, des fous de Dieu, du froid, de la terrible misère et de fantômes. Il faut accepter le rythme lent, les longues et merveilleuses phrases, il faut accepter de se laisser conduire dans le cauchemar de Paul Lynch. Magnifique.
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Paul Lynch est un des plus grands romanciers irlandais de notre époque avec Colm Toibin, avec Grace il signe son roman le plus bouleversant.

SUBLIME. Voilà c'est dit, fin de la chronique.

Non j'ai fait une petite blague, soyons sérieux quelques instants si vous le voulez bien.

Paul Lynch possède une plume magnifique, une plume poétique qui sublime les descriptions et nous bouleverse profondément, son écriture est d'ailleurs traduit avec brio par Marina Boraso. Ce style est unique, il est merveilleux, c'est une prouesse littéraire qui démontre à quel point Paul Lynch est un immense écrivain.

Au-delà du style il y a cette histoire. Une histoire terriblement émouvante, tragique qui touche la moindre parcelle de sensibilité du lecteur. C'est un roman qui nous frappe en plein coeur du fait de ce destin dramatique où deux enfants, une jeune fille et son frère doivent affronter la terrible réalité qu'est l'Irlande du XIXe, une Irlande ravagée par la famine et la misère.

C'est ainsi que Paul Lynch nous entraîne dans un voyage dont on ne peut sortir indemne, un périple initiatique et bouleversant. Au travers des paysages dévastés, des rencontres avec des êtres brisés, des désillusions de chaque être qui compose ce livre, le lecteur suivra pas à pas la route des protagonistes, les accompagnera tout le long du chemin jusqu'au dénouement final.

En définitive, Grace est un magnifique et tragique roman, un roman qui confirme mon amour et ma fascination pour les histoires de Paul Lynch.
Lien : https://leatouchbook.blogspo..
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Irlande, la grande famine.
Paul Lynch décrit l'indescriptible, dit l'indicible, la fuite, l'horreur, la faim, la mort, le désespoir absolu, dans une langue poétique et glaçante, onirique et charnelle.
Un grand livre, poignant, sombre, avec peu, si peu de lueur.
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Irlande 1845, le pays est décimé par la famine liée à la maladie de la pomme de terre et à une très forte humidité. On ressent tout au long du roman cette humidité, le gris du paysage, la morosité, la détresse de la population. La jeune Grace est l'héroïne de ce roman obligée de se faire passer pour un garçon pour survivre. Elle fait un voyage hallucinatoire avec son jeune frère. Heureusement la lumière perce ce ciel sombre et ténébreux dans les dernières pages !
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