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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Comme Shams de Tabriz, fondateur du soufisme et de l'ordre des derviches tourneurs, Mani prône une foi ouverte et éclairée, en harmonie avec les autres religions. C'est d'ailleurs plus une spiritualité qu'une vraie religion (avec divinité, rite,...).
Mais comme souvent les esprits ouverts et tolérants, il fut victime de persécutions (surtout à la fin de sa vie) et connu l'oubli. Son enseignement fut dévoyé.
Amin Maalouf, avec son ses mots et son souffle poétique, ressuscite Mani, rétablissant au passage quelques vérités. Les choses pour lui n'étaient pas pour lui aussi tranchées que la doctrine qui survit veut le faire croire. Pour lui, chaque homme porte les Lumières et les Ténèbres. Libre à lui de choisir qui il veut servir.
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Amin Maâlouf retrace la vie tumultueuse d'un homme, parmi les hommes, «venu du pays de Babel, disait-il, pour faire retentir un cri à travers le monde», et ajoutant, avec le dépit de toute sa conscience naïve, «Au milieu de ces hommes, j'ai cheminé avec sagesse et ruse...»
Mais qui est ce personnage dont l'histoire semble se perdre dans la nuit des temps et dont le seul nom «Mani» demeure sur les lèvres pour exprimer, à l'emporte-pièce, une tendance gnostique souvent douteuse, et donc étrangère à l'authentique philosophie religieuse fondée sur la connaissance inspirée particulièrement du zoroastrisme, du bouddhisme et du christianisme? Cependant, sans entrer dans le détail de cette philosophie qui fit du personnage de Mani, en son temps, le messager de tous les défis t «le temps n'est que le fût où les mythes mûrissent» , «ses fidèles, observent notre auteur et les chroniqueurs chez qui, il a puisé abondamment, se jurèrent de ne plus l'appeler autrement que «Mani-Hayy», Mani le-Vivant. Termes devenus inséparables dans leurs récits comme dans leurs prières, au point que les Grecs n'entendront qu'un mot unique qu'ils transcriront «Manikhaios». D'autres disant «Manichaeus» ou encore «Manichée» (...) de ses livres, objets d'art et de ferveur, de sa foi généreuse, de sa quête passionnée, de son message d'harmonie entre les hommes, la nature et la divinité, il ne reste plus rien. de sa religion de beauté, de sa subtile religion du clair-obscur, nous n'avons gardé que ces mots «manichéen», «manichéisme» (...) Car tous les inquisiteurs de Rome et de la Perse se sont ligués pour défigurer Mani, pour l'éteindre. En quoi était-il dangereux qu'il ait fallu le pourchasser ainsi jusque dans notre mémoire?»
Amin Maâlouf, avec Les jardins de lumière ne fait pas seulement le récit des «aventures» de l'homme à la jambe torse, il en fait une passionnante analyse sociologique, et forcément très humaine, Mani est né dans un pays où les dieux sont nombreux, ont des yeux, des oreilles et une langue terrible. Ils sont sans âge et infaillibles, tout comme le sont aussi nécessairement leurs serviteurs, tels que Sittaï de Palmyre, le maître et guide des Vêtements-Blancs de la Palmeraie et qui se présente toujours en ces termes: «Je suis un chercheur de vérité!». Il sera «le voleur» de Mani qu'il arrachera «en douceur» à ses très jeunes parents. Mani est né d'un père nommé Pattig, portant «dans le regard une candeur enfantine», fils de la haute noblesse parthe, originaire d'Ecbatane, et de Mariam, une jeune femme dont la Médie est la patrie d'origine et qui appartient à la noble famille des Kamsaragan (dont plusieurs membres furent massacrés par les Romains), plus noble et plus ancienne encore qui fut associée au règne des Parthes.
Il est né à Mardibu, un village non loin de la ville de Ctésiphon, métropole du pays de Babel et résidence des rois parthes. Ici commence l'histoire de Mani. Notre auteur écrit: «L'histoire de Mani commence à l'aube de l'ère chrétienne, moins de deux siècles après la mort de Jésus. Sur les bords du Tigre s'attardent encore une foule de dieux. Certains ont émergé du déluge et des premières écritures, les autres sont venus avec les conquérants, ou avec les marchands.»
Dès lors, le roman va se développer comme une suite d'événements programmés montrant progressivement la naissance d'un être exceptionnel. Sa foi en l'homme sera sa priorité exercée comme un sacerdoce: sa raison de vivre. Il sera le peintre, puis le médecin, puis le prophète d'une société pour laquelle, il essaiera de construire un monde profondément humaniste. Cependant, son discours, sans cesse inspiré, s'enflamme, se précise: «...aux commencements de l'univers, deux mondes existaient, séparés l'un de l'autre: le monde de la Lumière et celui des Ténèbres. Dans les Jardins de Lumière étaient toutes les choses désirables, dans les ténèbres résidait le désir, un désir puissant, impérieux, rugissant. Et soudain, à la frontière des deux mondes, un choc se produisit, le plus violent et le plus terrifiant que l'univers ait connu. Les particules de Lumière se sont alors mêlées aux Ténèbres, de mille façons différentes, et c'est ainsi que sont apparus toutes les créatures, les corps célestes et les eaux, et la nature et l'homme... En tout être comme en toute chose se côtoient et s'imbriquent Lumière et Ténèbres. Dans une datte que vous croquez, la chair nourrit votre corps, mais le goût suave et le parfum et la couleur nourrissent votre esprit. La Lumière qui est en vous se nourrit de beauté et de connaissance, songez à la nourrir sans arrêt, ne vous contentez pas de gaver votre corps...»
Toutefois, de tels discours ne tarderont pas à provoquer l'irrémédiable. L'ignorance, le fanatisme, l'intolérance, la trahison, les excès du pouvoir, la haine, l'envie malsaine, tout cela et d'autres choses que toute une vie ne pourrait connaître, et même la vérité qui est dite et qui n'est pas bonne à dire, livrent au supplice des fers, tuent les rois et les princes, les dominateurs et les dominés, les croyants et les non-croyants, les fidèles et les infidèles... Bientôt «le fils de Babel» est banni, puis, il est arrêté et jeté dans une prison dans les quartiers de Beth-Lapat. le prophète est persécuté. Il subit un affreux martyre: «Une lourde chaîne scellée autour du cou, trois autres autour du buste, trois à chaque jambe, et trois encore à chaque bras...Sous le poids, sa vie allait s'épuiser goutte à goutte...Au vingt-sixième matin s'acheva le dernier acte de sa passion...C'était en l'an 584 des astronomes de Babel, le quatrième jour du mois d'Addar pour l'ère chrétienne le 2 mars 274, un lundi, la passion de Mani se confond depuis, avec la nôtre.»
Et Amin Maâlouf de conclure: «Ce livre est dédié à Mani. Il a voulu raconter sa vie. Ou, ce qu'on peut en deviner encore après tant de siècles de mensonge et d'oubli.» Pour l'auteur, comme pour nous, Les jardins de lumière constituent un témoignage fort et juste sur un espoir humain brisé par la haine et la sottise malfaisante des inquisiteurs de tous les temps.
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Qui dit manichéisme oppose le principe du bien et celui du mal.Le terme manichéen est employé aujourd'hui dans un sens péjoratif. Comment Mani, fondateur de cette philosophie tolérante et humaniste qui visait à concilier les religions, nommé en son temps(III° siècle) le Bouddha de lumière et l'apotre de Jésus a t il pu être trainé dans la boue,haï,rejeté,torturé, supplicié,tué et surtout comment sa doctrine à priori bonne a t elle pu tomber dans l'oubli et mener au bûcher les cathares qui y adhéraient?
Voilà le message que Amin Maalouf, auteur de "Léon l'africain" de "Samarcande"(prix des maisons de la presse 1988) et du "Rocher de Tanios" (prix Goncourt 1993) essaye de diffuser dans ce livre.Un fanatisme que l'auteur dénonce, lui le libanais déchiré dans son propre pays.
Entre roman et légende son récit nous mène sur les bords du Tigre, dans les jardins d'Ishtar à l'aube du christianisme. Une ère nouvelle s'ouvre alors de par le monde, une ère où les apôtres de Jésus parcourent les chemins pour répandre la bonne nouvelle, celle d'une nouvelle religion qui puise son essence dans l'amour de l'autre.
Mani,enlevé à sa mère dés l'âge de quatre ans par son père et élevé dans la secte stricte des vêtements blancs qui restreint plutôt que d'élargir la vision des êtres et des choses, n'aura de cesse après sa découverte de l'art mural et de l'écoute de la voix divine(celle des jardins de lumière) qui s'adresse à lui, que de diffuser les paroles de Thomas, disciple de Jésus. Sa jambe torse ne l'incommode pas et il guérit.Il a le don et veut plus que tout faire reculer les ténèbres dont il pressent la force.Mais il perturbe l'ordre établi et active par là même la haine de ceux qui le jalousent. Cette histoire vécue, relatée avec beaucoup de poésie est une fable qui nous interpelle car nombreux sont les bons bannis pour le seul fait d'être hors normes et d'avoir essayé de faire entendre leur voix et leur pensée différentes sous prétexte qu'ils les estimaient valables.A méditer!
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"Les jardins de lumière" (Ed.: le livre de poche, n°9516), une perle offerte par Amin Maalouf. On ne présente plus cet auteur à qui on doit, notamment, "Les identités meurtrières" ou "Les croisades vues par les arabes"...
Une fois de plus avec sagesse, il nous propose, ici, une biographie (romancée) de Mani (peintre, médecin et prophète du 3e siècle de notre ère) dont le mode de pensée a donné son nom au manichéisme... Mais sait -on vraiment ce qu'il disait? A quoi il invitait? Vers quelle sagesse il voulait pousser ses pas? Mani avait tellement bien mis le doigt sur les dysfonctionnements des croyances d'alors qu'il s'est mis à dos toutes les religions de son époque. Sa vision a été jugée dérangeante, trop tranchante, sans nuance et donc simpliste au point de ne pouvoir tenir la route face aux fondamentaux des doctrines qu'il bousculait.
Hé oui, la sagesse a toujours la vie dure face aux vies et croyances repliées sur elles-mêmes!

Avec son élégance de style, la lenteur apparente de son écriture qui permet à la pensée du lecteur de percoler de l'esprit au coeur, Amin Maalouf nous invite à entrer dans une vision humaniste du monde qui chercherait à concilier les différentes religions plutôt que les opposer. D'une brûlante actualité, il nous introduit dans à un travail d'ouverture sur nos racines et nos fondements philosophiques.

A lire, à partager ... à distiller dans nos quotidiens!
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Amin maalouf nous fait voyager à chacun de ses textes. Cette fois ci, il nous embarque avec lui au III ème siècle, en Mésopotamie découvrir le personnage de Mani.
Mani? Je ne le connaissais pas et je suis ravie de faire cette lecture qui a été très instructive.
De ce nom aujourd'hui il ne reste que "manichéen" et "manichisme", de ce personnage mal compris, qui ne voulait que répandre paix et amour, il ne reste qu'un souvenir.
Souvenir ravivé de manière splendide par maalouf. Grâce à ses mots tracés avec poésie et délicatesse.
Laissez vous emporter par ce récit, vous ne serez pas déçus.
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Malgré ses innombrables fidèles il semble que ses détracteurs aient gagné la partie pour envoyer l'oeuvre de Mani aux oubliettes de l'histoire et de la spiritualité. Que reste t-il de lui, jusqu'à aujourd'hui, si ce n'est un terme qui ne fait que mal décrire sa vision de l'humanité ? Manichéisme…
Merci à Amin Maalouf de cette belle biographie-hommage à un homme exceptionnel épris de beauté et de sincérité et d'une trop rare ouverture d'esprit.
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A l'époque antique, le territoire perse a été le lieu d'épanouissement de trois religions presque entièrement disparues aujourd'hui. Le mazdéisme, le zoroastrisme et le manichéisme concevaient le monde comme le lieu d'affrontement perpétuel entre le Bien et le Mal; elles n'étaient donc pas monothéistes. Ensuite, le manichéisme qui est en quelque sorte un syncrétisme du zoroastrisme, du bouddhisme et du christianisme a été prêché par le prophète Mani (216-274 ou 277 après J. C.). On ne sait pas grand-chose d'un tel personnage qui, de toute évidence, fut remarquable. On connait assez mal la religion qu'il a fondée (mais on a découvert récemment des manuscrits qui permettent de mieux en préciser les contours).

Malgré la pauvreté des sources, Amin Maalouf a osé écrire un roman historique sur Mani et sur le monde dans lequel il vivait. Le prophète apparait comme un homme fascinant, promoteur d'une éthique avancée et dépassant les sectarismes religieux. Il reçut d'abord l'appui décisif d'un souverain de la dynastie sassanide et aurait pu établir ainsi une religion pérenne, malgré l'opposition des Chrétiens. Pourtant, il tomba finalement en disgrâce et mourut d'une façon misérable.

Personnellement, j'ai trouvé ce roman fort intéressant pour l'évocation de Mani, mais aussi pour le contexte général (peu connu du grand public) dans lequel Maalouf l'a replacé.
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Le grand mérite de ce roman d'Amin Maalouf est de faire revivre Mani, philosophe éclairé du 3ème siècle. Dans l'empire des Sassanides, protégé par le roi Shabur, cet homme prêche la tolérance religieuse, convaincu que la lumière est présente dans chaque être humain, et que toute foi et croyance a droit d'existence. La jalousie des mages, craignant pour la perte de leur pouvoir, vaudra à Mani d'être discrédité et persécuté à la fin de sa vie.
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Pour oser se lancer dans le récit de l'histoire de la vie d'un homme du III° siècle, il faut avoir soit beaucoup d'érudition, soit beaucoup d'imagination, ceci d'autant plus que cet homme, ici, vivait et voyageait en Orient, entre l'Iran et les frontières de l'Inde d'un côté, et celles de l'empire romain de l'autre. Comment prétendre pouvoir raconter la vie des peuples d'alors en ces contrées? A.Maalouf a parfaitement bien réussi cette gageure. Son personnage, Mani, homme totalement désintéressé, sage, pacifiste et tolérant, est magnifique. Se sentant porteur d'un message quasi divin, il ira prêcher au travers des pays voisins sa "religion" généreuse, et s'attirera l'intérêt et l'adhésion à ces thèses d'un grand nombre d'adeptes. Il sera proche des puissants, et leur conseillera toujours la tempérance. Bien entendu, dans un monde où l'on craint toujours une agression ou une invasion venue d'ailleurs, et où l'on ne pense à les conjurer qu'en passant soi-même à l'attaque, la patience prônée par Mani ne rencontrera pas que des oreilles dociles, et le nouveau "prophète" se mettra malgré lui en danger.
Ce qui compte est la façon dont tout cela est raconté: c'est absolument parfait, et parcourir ce livre est particulièrement plaisant (et instructif ?). C'est vraiment une lecture à conseiller. Et l'on a alors une envie: lire un autre livre du même auteur.
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Très très joli livre, poétique et instructif. Il nous conte l'histoire de Mani, le prophète fondateur du manichéisme, qui a vécu au troisième siècle de notre ère. L'auteur nous apprend que le sens moderne du terme manichéen, qui évoque une présentation simpliste des choses ou toute blanche ou toute noire, ne correspond en rien à la véritable vision de Mani. Celui-ci prêchait en effet que l'on ne peut distinguer radicalement le bien du mal, la lumière de l'obscurité, qu'en toutes choses réside une part de lumière et d'obscurité et que, d'ailleurs, sans l'obscurité on ne saurait ce qu'est la lumière. Malheureusement le pauvre Mani eut à souffrir de la concurrence du Christianisme, alors en plein "décollage", les chrétiens d'alors contribuant à répandre du manichéisme une image qui l'a finalement discrédité. Je me souviens d'un livre très solaire. Une bonne lecture pour l'été...
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