Juste avant le début des vacances, le groupe avait stocké son rudimentaire matériel dans une grange désaffectée appartenant à l’oncle de Puce. Premier morceau : le fameux « What’d I say » de Ray Charles dans sa version hexagonalisée par Dick Rivers et Sylvie Vartan, « Est-ce que tu le sais ? ».
– Il ne vous manque plus qu’un nom ! s’était ecriée Marylou le lendemain de son arrivée, après que je lui aie révélé nos intentions et nos ambitions musicales.
– Il nous manque pas mal d’autres choses aussi, avait tempéré Babar, raisonnable et lucide.
– Quoi ?
– De bons instruments, des amplis, des micros, un bassiste, des morceaux à nous, de la technique, de la pratique... À la dernière répète, ça ne gazait pas fort, surtout moi, je n’arrive pas à sortir l’intro correctement.
La scène se jouait dehors, sur la terrasse abritée par une treille, autour d’une table blanche un peu bancale. Nous étions assis sur des pliants à rayures. Marylou, le visage mangé par ses longs cheveux, appuyait son front sur deux mains fines et encore blanches qu’aucun bijou ne déparait. Elle semblait plongée dans une profonde et sérieuse réflexion. Le silence s’installa et j’en profitai pour observer le cou et les oreilles de ma cousine. Ces détails-là me rassuraient quant à son âge, ils contredisaient les yeux, la bouche, les seins... mon regard tomba sur sa cuisse rougissante d’une première exposition au soleil. Je dus me retenir pour ne pas y poser la main. Justement, un rayon coquin perçait au travers les feuilles de vigne et, encouragé par une douce brise matinale, tentait de s’infiltrer par l’entrebâillement du petit short blanc. Je suivais le manège, m’abîmais dans cette vision, oubliais l’environnement, me sentais tout chose...
– Eh ! cousin ! à quoi tu rêves ?