A la fac, on vous apprend que le but de l'entreprise est la maximisation du profit. Christophe est ouvrier et n'a pas de telles pensées. Que sa fille obtienne son bac ES et aille à la fac est son objectif à lui. Quand sa fille lui parle du Paradoxe d'Anderson, le principe passe au-dessus de lui.
Quel imbécile cet Anderson : « malgré un niveau de diplôme supérieur à celui de leurs parents, les enfants ne parviennent pas à atteindre un statut social plus élevé que le leur. Par exemple, imagine que moi, après trois ans de fac ou cinq ans d'école de commerce, je finisse caissière chez Simply… »
Puis la mondialisation arrive, et aussi les cadres aux dents longues qui veulent faire leurs preuves : une délocalisation réussie est le passage obligé vers les hautes sphères.
Aline la maman perd son boulot, Christophe perd ses revenus suite à une grève, Léa est amoureuse du fils du riche voisin et Mathis a parfois la tête à côté de ses épaules. C'est fou comme la descente aux enfers est rapide, les montagnes russes, c'est de la gnognotte à côté ! Et on a son honneur : on n'en parle pas à ses enfants.
Le scénario est peut-être classique, mais l'histoire vous prend aux tripes tant elle est réaliste. Et partout plane l'esprit de Léon, dit Staline, le grand-père communiste qui les avait pourtant alertés : « Les usines ne poussent qu'une fois et n'engraissent que ceux qui les possèdent. »
Un livre à la
Gérard Mordillat où tout est non seulement plausible mais véridique. Toute ressemblance à des faits réels est voulue et assumée.
Quelques phrases incisives :
« Quand on tutoie la misère, on peut bien tutoyer Dieu », pense Aline. »
« Dieu,
Karl Marx, Mark Zuckerberg se moquent bien d'eux. Les pauvres n'ont pas plus de chances de s'en sortir qu'un taureau dans l'arène. »
« Vivre sans usines, c'est vivre sans poumons. C'est par là qu'un pays respire, les gars. Sans elles il s'essouffle, contraint d'être en permanence sous assistance. La désindustrialisation, c'est le cancer. »
« Les années ont épaissi sa silhouette. le chômage et les acides gras sont saturés. (…) Désormais, plus on se serre la ceinture et plus on grossit. »